Les travailleurs de l'agroalimentaire confirment leur grève nationale et leurs marches dès le mois de septembre prochain. Au rythme où vont les choses, tout porte à croire que la rentrée sociale ne se fera pas sous les «bons auspices» souhaités aussi bien par le chef de l'Etat que par son principal partenaire social. Deux grains de sable de taille sont en effet venus se glisser insidieusement dans les rouages, censés être bien huilés, du dialogue social initié entre Ouyahia et Sidi Saïd, sous l'oeil vigilant de Bouteflika. Nous apprenons ainsi, de sources bien informées, que contrairement à toutes les spéculations qui circulent présentement, aucune issue favorable ne pourra être apportée au litige qui oppose l'Ugta aux pouvoirs publics à propos du nouveau statut de la Fonction publique. Le texte, rappelons-le, a été élaboré par le syndicat, mais les amendements proposés par le gouvernement sont venus remettre en cause l'emploi d'environ un demi-million de fonctionnaires. Alors que des concessions de taille ont été cédées sur tous les autres chapitres, y compris le Snmg devant passer à 12.000 dinars avec une abrogation du fameux article 76 de la loi 90-11, Ouyahia refuse catégoriquement de céder, concernant la Fonction publique. Si nos sources se montrent aussi confiantes dans leur vue, c'est que le représentant du gouvernement, au niveau de la commission bipartite chargée de plancher sur ce dossier se trouve en déplacement à l'étranger et ne sera sans doute pas rentré avant demain, considéré comme la date butoir de la remise des quatre rapports finaux destinés à la future bipartite. Ainsi, sont également démenties les informations indiquant que cette fameuse bipartite devrait se tenir au début du mois prochain. Preuve en est, comme nous le disent nos sources, que «les rapports attendus demain ne seront jamais prêts avant plusieurs jours, voire des semaines, cela dans le cas où le gouvernement accepterait de céder sur la question de la Fonction publique», ce qui paraît peu probable, à voir le ton adopté par le représentant d'Ouyahia au sein de cette commission. D'aucuns évoquent d'hypothétiques «injonctions» du FMI ne reposant sur aucun fondement depuis que nous sommes courtisés par les puissants de ce monde avec nos réserves de change et nos indices strictement macroéconomiques puisque aucune retombée sur le peuple ne s'en est encore fait sentir. D'autres, en revanche, sans doute plus proches de la réalité, se braquent sur le fameux rapport Sbih qui prévoit en effet une refondation globale de la structuration de l'Etat, qui juge l'encadrement «pléthorique» et qui en souhaite un «dégraissage» pour le moins conséquent. Bouteflika, qui avait fait sien ce rapport dès sa campagne électorale en faveur d'un second mandat, a bel et bien l'intention de réformer l'Etat à petites touches, d'où le blocage actuel. Le second «grain de sable», loin d'être négligeable non plus, concerne la fronde qui a gagné le secteur de l'agroalimentaire de base. Emboîtant le pas aux menaces de la fédération Ugta, les syndicats d'entreprises, dans un communiqué rendu public hier, ont maintenu leur mot d'ordre de grève générale et de marches au niveau de toutes les unités existant par centaines à travers tout le territoire national, et employant plus d'une centaine de milliers de personnes. Les secteurs les plus menacés par ce que l'Ugta qualifie de «concurrence déloyale» menaçant le devenir de pans entiers de l'économie productive nationale sont les unités qui fabriquent du lait, de l'huile, de la farine et de la semoule. C'est carrément une rentrée sociale explosive qu'annoncent les travailleurs de ces unités, battant dangereusement de l'aile à cause, nous dit-on, d'une économie de marché qui «au lieu d'établir une concurrence saine et loyale, a remplacé un monopole d'Etat par celui de puissants groupes d'intérêts privés». A voir l'état auquel sont arrivées les choses, seule une intervention directe du chef de l'Etat, dont le plan de soutien à la relance économique met sur la balance pas moins de 50 milliards de dollars, peut venir en aide aux entreprises publiques en difficulté mais viables.