Aujourd'hui, il paraît plus que logique de jeter les bases d'un débat serein au lieu de tenter de trouver des boucs émissaires pour les jeter en pâture à la vindicte populaire. Négligence, il y a eu mauvaise gestion du risque aussi. Mais faudrait-il pour cela faire sauter quelques fusibles et laisser les choses en l'état? Les inondations ont mis à nu bien des carences dans la gestion des affaires de la ville et c'est pourquoi, l'urgence aujourd'hui est de savoir où se situe le mal. Il y a ceux qui s'accrochent à un argumentaire purement technique pour pointer un doigt accusateur sur les services techniques des mairies. Les services de la météo ont annoncé la tempête, mais que pouvait faire une APC avec ses moyens limités face à une situation de catastrophe naturelle? Parler d'avaloirs bouchés, de bouches d'égouts obstruées, de cours d'eau détournés, de maisons construites sur des sites dangereux, paraît comme un raccourci facile à prendre. C'est par cette brèche que se sont engouffrés tous ceux qui veulent voir des têtes tomber et au plus vite. Mais le mal persistera et les affaires de la collectivité n'en tireront aucun profit. Elles resteront toujours à la merci d'une mauvaise gestion qui elle, continuera à reproduire les mêmes erreurs devant les mêmes situations. Un directeur des services techniques, un responsable de la voirie dans la configuration actuelle de fonctionnement des APC, a des prérogatives très limitées. Son rôle est purement technique et son avis est purement consultatif. Il propose et la décision finale est l'apanage de l'Assemblée communale. Ceux qui militent pour cette hypothèse (charger les services techniques) rendent un grand service aux tenants du replâtrage et aux adeptes du «On efface tout et on recommence.» Ces derniers qui se recrutent parmi la classe politique, ne voudront pas, à l'approche d'échéances électorales importantes, remettre en cause un mode de gestion centralisé et inefficace qui a fait l'administration locale jusque-là. Que ce soit à Mila, Alger, Oran, Tlemcen ou ailleurs, les citoyens ont dénoncé l'absence des élus des lieux du drame. Au mois d'octobre, des pluies diluviennes avaient déferlé sur Mila, mais les autorités locales n'avaient pas jugé utile d'assister les sinistrés dans leur détresse. A Arzew, des citoyens ont été égorgés au coucher du soleil, dans la proche banlieue de la ville, et tous les citoyens avaient remarqué l'absence des représentants de l'APC au moment où le wali et le chef de daïra tentaient d'organiser les secours. A Oran, au mois de mars dernier, au quartier Ederb, un immeuble s'est effondré sur plusieurs familles tuant 4 personnes. La presse à l'époque avait souligné l'absence des élus de la ville qui n'avaient visité les lieux du drame que 3 jours après les faits. Les dernières inondations qui ont endeuillé Alger ont montré les limites d'intervention des élus locaux. Pour illustrer cette situation, il faudrait revenir au mode de fonctionnement des Assemblées locales, à leur composante, à leurs moyens, à leurs prérogatives, à leur champ d'attributions. Une ville comme Oran fonctionne avec une Assemblée locale défaillante. Aujourd'hui, plusieurs de ses membres n'y siègent plus parce que faisant l'objet d'emprisonnement ou placés sous contrôle judiciaire. D'autres ont été nommés délégués de secteurs urbains, une structure administrative créée en 1997. Partant de ce constat, l'APC d'Oran a été amputée de plusieurs membres et son mode de fonctionnement en a pâti. Cette situation est aussi vécue par plusieurs communes du territoire national, c'est pourquoi il paraît clair, aujour- d'hui, que beaucoup de choses doivent changer au niveau des collectivités locales qui se sont retrouvées paralysées devant des situations les interpellant à plus d'un titre. Les pouvoirs publics ont, aujourd'hui, bon nombre d'arguments pour engager une réforme de fond des textes qui régissent les collectivités locales. Le code communal, le code de wilaya ont besoin d'«un coup de neuf». Les Assemblées communales, composées d'élus venus d'horizons politiques divers continuent de fonctionner avec des textes pondus du temps du parti unique. Quand un wali organise les secours, dresse les listes des sinistrés, distribue les logements, le couffin du Ramadan ou la prime de scolarité, on se met à penser qu'il existe un problème qui va au-delà du déficit de confiance entre un élu et ses électeurs. Les échéances électorales approchent et, pour cette fois, avant de choisir les hommes qui affronteront le quotidien des électeurs, il faudrait peut-être «pondre» des textes qui pourront faire d'un maire un décideur et d'une APC un organe souverain et comptable devant ses électeurs. Le code communal actuel a fait son temps, et les présidents des APC ne peuvent pas être les régulateurs des programmes de développement local retenu dans le programme du gouvernement. Ils ne font que gérer leur mandat en espérant qu'il ne pleuve pas ou que la canicule ne vienne pas faire des victimes.