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"Nous voulons attirer la jeunesse vers l'Afrique" WALID KHELIFI, PRODUCTEUR ET INITIATEUR DU PROJET MUSICAL ET AUDIOVISUEL EL FOUKR R'ASSEMBLY, À L'EXPRESSION
«Une relation basée sur la musique» C'est un bien joli et ambitieux projet que l'on devrait tous soutenir. Car l'engagement c'est aussi cela. El Foukr R'Assembly c'est d'abord cette fabuleuse rencontre de plusieurs musiciens algériens ayant le regard tourné vers l'Afrique subsaharienne. Un chauffeur de taxi et un agriculteur, un constructeur, un graphiste et un ingénieur du son, Walid Khelifi, s'étaient rencontrés en différentes parties de l'Algérie avant de poser les jalons d'un projet à long terme autour de court-métrage et de musique reliant le Maghreb et le reste de l'Afrique. Les membres de El Foukr R'Assembly n'avaient jamais joué ensemble avant, et deux d'entre eux n'ont jamais été sur scène, ni enregistré professionnellement auparavant. Il naît donc un album de six titres produits dans le cadre conceptuel d'Afreekyama collective. L'aventure ne fait que commencer. Elle nous est racontée par son producteur... L'Expression: El Foukr R'Assembly. Un mouvement qui rassemble plusieurs artistes d'Algérie. Pourriez-vous nous parler un peu de ce projet de fusion africain à l'issue duquel il ya eu un court métrage de 18 mn et un album de six titres.. Walid Khelifi: L'idée est née après avoir rencontré des musiciens algériens un peu par hasard. ça a commencé avec Amine Laichili le vocaliste et Labib Benslama, graphiste et designer, à Constantine. Le premier est chauffeur de taxi à Constantine ma ville d'origine. On est devenus potes. On organisait des soirées ensemble. Amine n'est jamais monté sur scène, il ne voulait pas vraiment faire une carrière dans la musique. C'était plutôt la survie en Algérie. Ces gens, je les ai trouvés branchés sur la musique subsaharienne. C'est ça qui était bien. Ils n'ont jamais vraiment voyagé mais connaissaient toute cette musique comme Fela Kuti, Tony Allen etc. Ils avaient toute cette musique sur leur ordi. Moi je vis en Afrique de l'Ouest. La relation au niveau humain a été construite autour de la musique notamment. Ensuite Labib qui est oudiste et joue de la guitare folk et flûtiste m'a présenté Abdelati qui vient de Béchar. Il a grandi dans une famille de diwan. Il connaît bien la percussion malienne, sénégalaise et musique du monde. Avec les trois, un jour, en partant réaliser un court métrage à Tamanrasset, j'ai rencontré à Djanet des Touareg qui nous ont invités chez eux. J'ai un peu filmé ces ambiances dans l'Oasis, vous pouvez voir ça dans le film de 18 mn. Etant journaliste multimédia, photographe et vidéaste je me suis dit qu'il fallait faire un petit film sur ces gens que j'ai pu rencontrer et enregistrer de la musique avec eux. Mais il fallait trouver l'espace et on n'a pas non plus de financement. J'avais rencontré là-bas, un type qui s'appelle Soltan, qui était pour cette idée. Je suis remonté à Constantine, j'ai appelé Abdelati. On s'est organisé et on est parti. Le 4ème musicien de la formation je l'ai rencontré à Djanet. Je l'ai vu un soir jouant sur des câbles de façon extraordinaire. Quand on est redescendu avec les autres, je l'ai cherché à Djanet, je lui ai expliqué le projet. Il est à moitié algérien, moitié nigérien. Moitié haoussa, moitié touareg. On s'est amusé et on a fait le film. Concrètement c'est quoi votre objectif en fait? Pour nous l'objectif, à travers le visuel et le son, c'est d'essayer d'attirer la jeunesse de lAfrique du Nord pour partir visiter son Afrique profonde. A la base c'est ça. Moi-même j'ai vécu à Abidjan, j'ai traîné pas mal au Mali, Burkina, Sénégal, Libéria etc. je trouve des gens des quatre coins du monde ils sont là. Ils travaillent dans tous les domaines. La croissance économique dans ces pays est à 11 ou 12%. Il y a plein d'opportunités. Je constate que beaucoup d'Européens, d'Américains, d'Indiens, mais aussi plein de Marocains y vont. Je les croise là-bas, il ne manque que nous. Nonobstant le panafricanisme bureaucratique qui se traduit par des gens qui partent là-bas pour des conférences, les Algériens, n'y vont pas. Le Maroc y est très mobile et dynamique, pas seulement dans la culture et la musique dans ce pays. Il y a des gens qui montent des entreprises. Les quatre dernières années de ma vie, j'ai vécu à 70% dans cette région et j'aimerais bien voir des gens, pas xénophobes, de chez nous venir investir là-bas par exemple. Car il y a plein de possibilités. Musicalement comment portez-vous cet idéal, ces revendications et cette philosophie? Justement, dans vos textes vous chantez et prônez quoi? On sent tellement d'influence maghrébo-africaine avec des sons gnawas, tamacheks notamment.. Oui effectivement, il y a des sons targuis, de l'arabe fousha, un morceau raï, etc. La musique, pour moi est universelle, après il y a les influences des gens. Ce que j'ai proposé à la base est de faire un film pilote et un album pilote. C'est ce que nous avons pu faire avec les moyens du bord en l'espace de onze jours. Et ça a marché. Il s'agit d'une production née d'un financement participatif sur le Net. Autrement, les gens qui aiment bien le projet, la vision qui est derrière, le néo panafricanisme qu'on propose, cette mobilité pour l'échange et le partage, peuvent nous soutenir. On est certes berbères et arabes, mais aussi africains. C'est ce qu'on essaye de raconter en musique et en film. On est à 35% du projet en ce moment. Tout est sur Internet, transparent et visible. Le mois prochain on compte partir au Ghana. Là, on va faire de la musique et réaliser quatre courts métrages avec des artistes locaux que j'ai déjà repérés pour avoir vécu là-bas (musique, danse, performance de rue, etc). Nous leur raconterons dans ces films leur vie ou situation sociale et artistique. On va y rester cinq semaines. On enregistra également un nouvel album de six titres. Donc le but est de voyager, faire une escale dans plusieurs pays africains, rencontrer des gens, des artistes et enregistrer le pouls de chaque région, via des enregistrements sonores, des images et des titres. Oui et on retourne en Afrique du Nord. Après on ira peut-être au Cap-Vert. Au Ghana, on va aussi monter sur scène. On a déjà quatre dates programmées. Il y a de l'intérêt un peu partout. A quand une scène algérienne? Le plus tôt possible. On aimerait bien. On rentre du Ghana au mois de mars. J'ai déjà été contacté par des gens du ministère de la Culture algérien. Mais je refuse de travailler avec eux. Ils nous ont proposé de l'argent mais je préfère rester indépendant. J'aimerai bien un jour pouvoir travailler dans ce pays sans qu'on nous colle cette étiquette «sous le patronage de...» et qu'on nous oblige à mettre ces logos etc. c'est notre droit. c'est mon choix. Je ne veux pas compromettre le projet à ce stade. Mais un jour j'espère pouvoir me battre en tant qu'Algérien pour les fonds dont on a tous le droit et inconditionnellement. On m'a contacté pour ce projet puisqu'ils ont vu le film. Certains, ont été voir d'autres de mes courts métrage dont un que j'avais fait dans le cadre d'une résidence au Cap-Vert. Ils ont osé me reprocher de montrer une femme nue dans mon film qui porte sur la vie et les croyances d'une danseuse de strip-tease, parce que cela ne passe pas dans le milieu algérien. C'est pourquoi je ne veux pas de leur argent. Mais je me battrai pour l'argent des artistes et qu'il n y ait pas de censure.