Les quelque sept ou huit articles censés façonner l'Algérie de demain sont le fond de cette réforme nécessaire. De tous les chantiers politiques engagés par le président de la République, celui de la révision de la Constitution semble être le plus ardu. Cela tombe sous le sens, estiment les observateurs de la scène nationale, du seul fait que c'est bien de la loi fondamentale que découle toute l'architecture institutionnelle du pays. Les équilibres au sein de chaque pouvoir et entre les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire constituent l'essence même de tout régime. En Algérie, ce sont justement ces détails qui font polémique au sein de la classe politique. Les comptes rendus de dizaines de rencontres initiées par Abdelkader Bensalah sur instruction du président de la République et ceux rédigés par l'équipe de Ahmed Ouyahia qui, lui aussi, a reçu beaucoup de monde au siège de la présidence de la République, sont parmi les secrets les «mieux gardés» de la République. En fait de secret, ce n'en est pas un, peuvent répliquer les deux hauts responsables de l'Etat. Leurs invités s'étaient publiquement exprimés sur les discussions qu'ils ont eues avec les représentants du président de la République. On aura compris de leurs déclarations que tout l'éventail des scénarios possibles et imaginables a été abordé par les hôtes de la Présidence. Du régime présidentiel avec les pleins pouvoirs au chef de l'Etat, au parlementaire donnant d'immenses prérogatives à l'Assemblée populaire nationale en passant par le semi-présidentiel où l'Exécutif se distingue par deux centres de décision, la Présidence et la chefferie du gouvernement, toutes les options ont leurs partisans. Le débat, aussi vieux que le multipartisme en Algérie, a pris une signification plus urgente, à la lumière des événements qui ont semé la discorde dans plusieurs pays arabes. Ainsi, en avril 2011, en plein chaos «révolutionnaire», le dossier de la révision de la Constitution a été ouvert avec la volonté affichée de donner à l'Algérie une Constitution moderne, pratique et qui transcende les considérations idéologiques et claniques. Près de quatre années plus tard, plusieurs Etats arabes ont avancé sur cette question, tandis que chez nous, le débat n'est même pas encore sérieusement ébauché. Et pour cause, en l'absence d'un «brouillon» de Constitution soumise à l'opinion nationale, la scène politique fonctionne aux rumeurs, à la polémique et aux procès d'intention. Les hésitations du pouvoir à trancher pour l'un ou l'autre modèle de gouvernance, a donné à une partie de l'opposition l'opportunité de disserter sur le sujet et, partant, de proposer une période de transition politique, avec pour seul issue le départ du pouvoir actuel et son remplacement par un autre selon un principe d'alternance, dont on ne sait rien du tout. Le faible poids de cette opposition inspire une certaine crainte de voir les scénarios «printaniers» se répéter en Algérie. Aussi, les quelque sept ou huit articles censés façonner l'Algérie de demain et qui ont un rapport avec le poste de vice-président, la limitation des mandats présidentiels et autres droits constitutionnels de l'opposition, restent toujours le point d'achoppement de cette réforme nécessaire et devraient couronner un processus de révisions constitutionnelles, déjà au nombre de sept pour une République qui a moins de 53 ans d'âge. Le couronnement, de l'avis du pouvoir, tient dans le rassemblement d'un large consensus de la classe politique autour d'un projet commun. Est-ce possible?