Une vue du dernier procès Rien que pour avoir couvert des milliers de dossiers dits de «gros calibres», un autre renvoi est très possible. Renvoyé à cause de l'absence de Maître William Bourdon, un des avocats de Medjdoub Chani, accusé du crime de corruption, le procès de l'affaire «autoroute Est-Ouest» est programmé pour aujourd'hui, premier jour de l'ouverture de la session criminelle du printemps 2015. Attendu avec une certaine curiosité, ce dossier, qui verra 23 accusés et inculpés dont six «muraux», comparaître devant le trio Ahmed Hammadouche, Tayeb Hellali, Hadj Mihoub, Sidi Moussa, trois magistrats triés sur le volet sur deux gros critères criants: compétence et courage. Ce qui a fait réagir une avocate des années 1990 qui a dit sa certitude que les débats seront chauds mais justes, car le «politique» a été mis sous «mandat de dépôt» le temps du procès que beaucoup d'amateurs de procès publics boudent car, encore une fois, «on nous a ramené que les ides et non les requins et autres baleines de la corruption!». Côté magistrats, devoir de réserve oblige, pas ou peu de commentaires sur la qualité du trio qui va rendre justice: «Monsieur juste pour rigoler, disons que pour l'honneur du prénom 'Tayeb'', Hellali devra ne pas oublier qu'il a... trois 'Tayeb'' qui suivent le procès: Louh, le ministre de la Justice, Belhachem, l'inspecteur général, et... Belarif, un des avocats de Chani!». Attendons encore quelques heures (pour ceux qui ont le journal entre les mains) pour voir si les avocats se sont préparés à livrer bataille en vue de sauver leurs mandants dont beaucoup se plaignent des conditions catastrophiques dans lesquelles ils ont été interpellés, ramassés, embarqués, entendus et... écroués. Un des avocats d'un inculpé dont la place est celle de... témoin, a déclaré sans sourciller que les «principes juridiques et moraux ont f... le camp des tribunaux et cours nationales...» Une autre jeune avocate ne prend pas de gants: «C'est honteux pour un juge d'instruction ayant prêté serment de se passer des témoins a décharge!». Un autre conseil dont le client risque gros, veut que «tous les moyens que la loi met à la disposition des accusés et de leurs défenseurs soient déployés et mis en place: les preuves, les témoins doivent être vus et entendus avec une loyauté indestructible». La question est, pour ce deuxième rendez-vous avec la justice: est-ce que toutes les conditions seront réunies pour que chacun se sente en sécurité, «armé» d'une foi des magistrats et des jurés prêts à respecter les conditions d'équité et de régularité?» Quant au volet «interprètes», il faut espérer qu'ils seront tous dans la salle d'audience. Reste l'organisation et la place réservée à la presse nationale et internationale, les organisateurs se font un sang d'encre avec comme souci: la sono. Qu'elle soit fonctionnelle pour un bon déroulement des débats où il est question, selon l'arrêt de renvoi, d'une grave atteinte à l'économie nationale et aux énormes préjudices causés par des hommes en qui l'Etat a placé la confiance. Evidemment, entre ce qui se colporte des ministères aux salons des grandes villes et le contenu de l'accusation, demeure le procès d'où jaillira la vérité, à condition que tout le monde joue le jeu y compris les avocats dont la majorité a exigé l'audition de tous les témoins et surtout réclamés par la défense qui a même souhaité qu'ils soient amenés à comparaître, même par la force publique, force de loi oblige. Le greffier de l'audience ne doit pas attendre un signal du président ou du procureur pour prendre acte de toute déclaration susceptible de faire avancer le procès. Seront étalées et discutées à l'audience toutes les preuves, tous les documents ramenés par le parquet, appelé à jouer son rôle de représentant du ministère public et non celui du triste enfonceur venu inutilement attendre le moment pour réclamer de lourdes peines que l'on lira le lendemain sur les canards en Une, comme si ces demandes sont le verdict! A suivre donc...