«Errare humanum est» Maxime latine La première série en français qui a réussi à réunir tous les membres d'une même famille autour du vieux téléviseur noir et blanc vendu par les services de la RTA à la fin des années 1960, fut sans doute Le Fugitif. C'était une série propre que l'on pouvait voir et commenter en famille, toutes générations confondues (les ciseaux de la censure de l'Unique n'ont pas eu à intervenir). Elle reposait sur un canevas assez simple: le docteur Richard est injustement accusé du meurtre de son épouse. L'assassinat aurait été commis par un certain individu dont le signe particulier est qu'il est manchot. Le docteur va fausser compagnie à l'intraitable policier qui le poursuivra durant tous les épisodes de la série, pour mettre la main sur le vrai coupable et le livrer à une justice aveugle. Quoi de plus séduisant pour de simples citoyens frustrés que l'erreur judiciaire qui n'est l'apanage d'aucun régime. La justice américaine n'en est pas exempte. Une erreur judiciaire est une «erreur de fait» commise par une juridiction de jugement dans son appréciation de la culpabilité d'une personne poursuivie. Nombre d'oeuvres littéraires et cinématographiques ont connu un vif succès pour avoir traité ce délicat sujet qui a toujours révolté les braves et honnêtes gens. Le roman le plus célèbre fut sans doute la fiction que l'on doit à Alexandre Dumas: Le comte de Monte-Cristo. Edmond Dantès, victime d'une conspiration, sera injustement condamné sous la Restauration. Après de rocambolesques aventures et revenu en possession d'une fabuleuse fortune, il se vengera de ses détracteurs et pourra épouser son ancienne fiancée devenue épouse d'un corrompu. Mais la plus grande erreur judiciaire, réelle, celle-là, est bien l'affaire Callas. Ce citoyen français, protestant dans une société intolérante fut jugé en 1761 et pendu pour le meurtre de son fils qui s'était suicidé. La demande de la révision du procès fut écrite et activement sollicitée par un grand philosophe: Voltaire. Sa notoriété et les arguments avancés contre une instruction bâclée (comme celle qui conduisit Omar Raddad, défendu par Vergès, en prison), conduiront à la réhabilitation morale du condamné. Ce douloureux épisode sera adapté au petit écran par un des grands maîtres de la Télévision française, Stellio Lorenzi à qui l'on doit au moins un épisode de La caméra explore le temps et quelques remarquables reconstitutions historiques avec la collaboration de spécialistes en histoire comme Alain Decaux et André Castelot, des hommes qui ont honoré le petit écran français avant qu'il ne subisse la dure loi de l'expansionnisme sioniste. Beaucoup d'autres erreurs judiciaires ont accaparé le petit écran: l'Affaire Dreyfus, l'Affaire Seznec... Un documentaire retrace le combat de la famille de Kader Azzimani, emprisonné à tort pendant presque vingt ans. Sa famille a retrouvé un homme «détruit», qui a du mal à travailler, à regarder «les oiseaux en cage», à respirer... Kader Azzimani a été condamné à onze ans de réclusion criminelle avec Brahim El Jabri (qui a pris treize ans) pour le meurtre, en 1997, d'un jeune dealer. Un meurtre qu'ils ont toujours nié. A cette époque, Kader et Brahim vendaient du cannabis. Coupables idéaux? La justice les a reconnus à plusieurs reprises comme les auteurs de l'assassinat en s'appuyant, notamment, sur un témoin du crime un peu douteux. En 2009, grâce à des traces ADN, le véritable coupable est appréhendé puis condamné à son tour. Kader et Brahim, aujourd'hui quinquagénaires, vont pouvoir bénéficier d'une libération conditionnelle et demander un procès en révision.