L'entrevue de ce mardi, qui a duré plus de quatre heures, n'a pas permis d'aplanir les divergences. C'est désormais le branle-bas de combat au niveau de la Maison du peuple. Le même phénomène est observé au Palais du gouvernement. L'Exécutif et son principal partenaire social, sinon le seul, mettent désormais les bouchées doubles afin d'être prêts pour la bipartite dont la date sera très probablement fixée ce lundi pour les 14 et 15 octobre prochain. La raison de ce remue-ménage pour le moins exceptionnel est due au fait qu'il aurait été impossible de trouver un consensus concernant les points essentiels inscrits à l'ordre du jour de cette bipartite. L'Ugta, est-il besoin de le rappeler, se trouve littéralement débordée sur ses flancs, et dépassée par les évènements. Outre des secteurs névralgiques et pourvoyeurs de centaines de milliers d'emplois, qui semblent lui avoir définitivement échappé, comme c'est le cas pour l'éducation et la santé, il convient d'ajouter que même les travailleurs de la base se mettent désormais à bouger sans attendre le moindre feu vert de la Centrale. Il en va ainsi, notamment pour les impôts qui débrayent à partir de ce samedi, le Trésor en grève cette semaine et le secteur de l'agroalimentaire prêt à en découdre avec les pouvoirs publics dans le cas où ses doléances, tout aussi nombreuses que coûteuses, ne sont pas systématiquement et immédiatement prises en charge lors de cette bipartite. Toujours est-il, apprend-on de sources recoupées, «la rencontre qui a eu lieu ce mardi entre Ahmed Ouyahia et Abdelmadjid Sidi Saïd a duré près de quatre heures et demie». Les mêmes sources ajoutent que «les négociations, très serrées, ont visé à rechercher des solutions intermédiaires». Celles-ci, toutefois, semblent très difficiles à trouver depuis que le front social, «dopé» par les réserves de change et l'amélioration plus que notable de l'ensemble des indices macroéconomiques. Les travailleurs, n'ayons pas peur des mots pour reprendre les propres termes de nos sources, «sont définitivement résolus à toucher une part de ce gâteau inespéré après tant d'années de sacrifices et de privations diverses». C'est pour cette raison qu'aucun consensus n'a pu être trouvé à la suite de la rencontre de ce mardi. Une autre, que l'on qualifie de «décisive» doit ainsi avoir lieu ce lundi. Nos sources précisent à ce propos que «l'ordre du jour, mais aussi les grandes concessions à consentir de part et d'autre, seront finalisées à l'occasion de cette seconde entrevue». Dans l'état actuel des choses, comme nous l'apprenons encore, «seule la proposition de loi sur la fonction publique a été retenue». Il semble même que le gouvernement ait définitivement accepté de renoncer à ses propositions d'amendements, lesquelles allaient coûter leur poste à près d'un demi-million de fonctionnaires non-permanisés. Cette concession gouvernementale, qui ne sera sans doute pas la seule, coûtera quand même la bagatelle de plusieurs milliards de dinars annuellement, alors que le gouvernement souhaitait au contraire alléger le budget de fonctionnement de l'administration en attendant carrément de mettre en place les réformes prévues dans le rapport Sbih. Il sera également question, lors de cette bipartite, attendue immédiatement après la seconde entrevue Ouyahia-Sidi Saïd, probablement durant le week-end prochain, du fameux article 18-bis de la loi 90-11, relative aux relations de travail. Dans le cas où ce texte de loi venait à être amendé, il ne fait aucun doute que les salaires connaîtraient des hausses très significatives puisque jusqu'à présent les augmentations dans le Snmg avaient pris en ligne de compte les primes diverses, si bien que les derniers 2000 DA n'avaient permis de hausser les salaires, dans le meilleur des cas, que de moins de 200 DA comme le prouve le document du ministère des Finances, dont nous avons obtenu une copie. Le gros morceau, que l'Ugta n'arrive toujours pas à obtenir, c'est bien de revoir de fond en comble la stratégie gouvernementale concernant le secteur public, y compris pour ce qui concerne le projet de loi sur les hydrocarbures. Ici, nos sources, qui ne se font guère beaucoup d'illusions, indiquent que «si le sujet sera forcément abordé lors de la bipartite, il ne fait aucun doute que nous ne ferons que le défricher en attendant de le traiter à fond à l'occasion de la tripartite, dont la tenue est prévue pour avant la fin de l'année en cours». La position «équilibriste» de la Centrale n'est guère enviable dans l'état actuel des choses. A la lumière de ces rebondissements, pour le moins inquiétants, le risque est grand de voir le front social continuer de s'embraser en attendant que les pouvoirs publics, désormais riches à milliards, ne lâchent enfin du lest...