Un aveu d'échec, sans ambages, est fait dans un communiqué-bilan venu confirmer que ce dossier est clos et définitivement clos. Mourad Dhina n'est désormais plus le responsable du bureau exécutif du FIS dissous. Mieux, cette instance, dont la constitution s'était faite à l'occasion du congrès de 2002, couvert par les services secrets belges, a également été dissoute comme l'annonce le communiqué d'hier. Visiblement désabusé, admettant les nombreuses erreurs commises par ce parti, loin de trouver leur justification dans l'infiltration dont il aurait été l'objet (dixit Abassi Madani sur Al-Jazira avant d'être rejoint par Mourad Dhina dans son communiqué), celui qui était décrit comme étant le dernier survivant de la redoutable aile djazaâriste s'en prend à mots à peine couverts à Abassi Madani et Ali Benhadj dans une sorte de testament adressé à l'ensemble des militants et sympathisants de ce parti. L'auteur de ce communiqué, tout en continuant de fustiger ce qu'il qualifie de «brutalité du pouvoir», occultant au passage le terrorisme aveugle déployé par ce parti, n'en ajoute pas moins: «Pour être sincère avec Dieu et assumer notre responsabilité envers notre peuple et nos militants et être objectifs dans l'analyse», «l'existence de causes intrinsèques ayant contribué au dysfonctionnement du FIS l'ont rendu incapable de mener à bien son projet». L'aveu vient conforter la célèbre sentence du président Zeroual, pour qui le «dossier du FIS est clos, et définitivement clos». Une sentence, du reste, que Bouteflika n'a pas manqué de réitérer à chaque fois que l'occasion lui en était accordée, notamment face aux nombreuses accusations lui prêtant des velléités de vouloir réhabiliter ce parti. Dhina, sans jamais citer nommément les gens, même s'il est aisé de deviner qu'il s'agit vraisemblablement d'Abassi Madani, Rabah Kébir, Anouar Haddam et peut-être même Ali Benhadj, attaque frontalement ce qu'il qualifie de «concept du culte du cheikhisme» dans ses aspects les plus négatifs, à savoir «la propension à la domination et l'exclusion et le non-exercice de la consultation dans la transparence». Benhadj, qui certes ne peut pas faire la moindre déclaration depuis sa sortie de prison, n'en est pas moins extrêmement hostile à l'aile djazaâriste arrivée à la tête du FIS-dissous à l'issue du congrès de Batna, intervenu quelques jours après l'arrestation d'Abassi et Benhadj et la propulsion sur le devant de la scène politico-médiatique d'Abdelkader Hachani et Rabah Kébir. Les milieux informés estiment que la décision prise par Dhina de mettre un terme à l'existence de cette instance trouve aussi son explication dans des raisons politiques et sécuritaires algériennes qu'il aurait du mal à admettre sans avouer publiquement l'échec de toute sa démarche. D'un côté, la défaite du terrorisme accentuée par le plan portant réconciliation nationale ôte toute légitimité aux actions violentes commises encore dans le pays. De l'autre, le plébiscite dont a bénéficié Bouteflika a définitivement clôturé la crise politique de notre pays, dont l'ensemble des institutions sont à présent légitimes, et renouvelées conformément aux dispositions prévues dans la Constitution. Dhina, qui clôt dans le même temps une bien courte carrière politique, puisqu'il a rejoint les rangs de l'ex-Fis bien après sa dissolution, admet même que celui-ci a connu une véritable saignée depuis quelque temps. Il a beau souligner dans son communiqué que cela serait surtout dû à l'indiscipline de certains «cheikhs» littéralement en guerre les uns contre les autres et ne se conformant que bien rarement à la ligne directrice du FIS dissous, il n'en demeure pas moins que cette chute libre répond surtout au changement d'attitude mondial vis-à-vis de l'islamisme politique depuis les attentats du 11 septembre 2001. Les autorités algériennes, on s'en souvient, avaient officiellement saisi leurs homologues helvétiques dans le but d'empêcher Mourad Dhina, réfugié dans ce pays, de s'adonner à des activités subversives pour le compte d'un parti interdit dans notre pays. A la lumière de ce communiqué, il devient loisible de comprendre pourquoi le seul site officiel de ce parti a cessé de s'exprimer depuis le mois de mai passé alors qu'il était on ne peut plus prolixe auparavant.