Dans un communiqué de presse signé conjointement par Ali Djeddi et Kamel Guemazi, la direction de l'ex-FIS estime que «le congrès clandestin et restreint qui s'est tenu à Bruxelles n'est pas digne de porter le qualificatif de congrès du Front islamique du salut, parce que la direction légitime et légale n'y a pas pris part». Cette véritable fin de non-recevoir est venue à point nommé pour couper court à la poussée du CC-FIS, qui, en réussissant le tour de force exceptionnel de tenir un congrès dans une capitale européenne, a cru réaliser l'essentiel pour entamer un forcing et éliminer toutes les instances représentatives, notamment celle dirigée par Rabah Kebir. Dans ce communiqué «musclé» Djeddi et Guemazi accusent Mourad Dhina et son groupe d'avoir «des visées plus grande que leurs capacités, d'avoir fomenté l'organisation de ce congrès malgré tous les appels à son ajournement et d'avoir voulu, coûte que coûte, le tenir et ce, malgré l'absence des principaux représentants légitimes du parti, tels que Omar Abdelkader», si bien que cet état de fait a conduit à «modifier les buts et le contenu du congrès». Pour les deux leaders du parti dissous, l'idée d'organiser un congrès du FIS revient à Abdelkader Hachani (assassiné le 22 novembre 1999, Ndlr), lequel avait bien précisé que le FIS allait profiter de toutes les brèches juridiques et légales pour tenir un congrès, afin d'éviter les réunions clandestines. Pour Djeddi et Guemazi, «le CC-FIS s'est noyé d'avance dans des luttes de leadership aussi vaines que inutiles, et a déçu les espoirs nourris pendant 30 mois par l'attente d'un congrès à la mesure de ce que souhaitaient Benhadj et Hachani». De fait, les deux signataires réfutent tous les résultats, décisions et directives issues de ce congrès «organisé par une cellule clandestine et douteuse qui s'est autoproclamée à la tête de la direction du FIS, quelles que soient ses justifications et ses motivations».Cette remise au pas de la part de la «direction d'Alger» , seule et dernière instance légitime du parti dissous, va certainement mettre à mal le groupe Dhina, qui n'a plus que la lettre d'appui de Abassi Madani pour faire face à la contestation. Cette lutte des tendances met une nouvelle fois, face à face, salafistes (Benhadj, Djeddi, Boukhamkham, etc.) et djazaâristes (le groupe Dhina). Ces derniers, en s'appuyant sur un rapprochement discret et circonspect avec le GIA, tentent de récupérer les groupes armés encore opérationnels, tout en tournant le dos à l'AIS, à la trêve et aux partisans de la concorde civile. Il est probable que le CC-FIS n'a pas calculé l'enjeu de ce congrès, et qu'il ait pensé que la seule tenue pouvait les propulser au-devant de la nébuleuse islamiste. La réaction de Kebir, Boukhamkham, Djeddi et Guemazi a été brutale, et il est fort à parier que le groupe Dhina, malgré l'appui de Abassi Madani, saura en tenir compte.