Le chef historique de l'Armée islamique du salut ne fait que confirmer la rupture entre le pouvoir et les islamistes. Six ans après avoir déposé les armes de façon «unilatérale et inconditionnelle», les chefs de l'Armée islamique du salut (branche armée de l'ex-FIS Ndlr) protestent contre la situation dans laquelle ils se retrouvent confinés et contre, notamment, ce qu'ils qualifient d'«agressions politiques» et de «désengagement des autorités» vis-à-vis des accords historiques contractés avec l'armée en 1997 et avalisés par le président de la République en 1999, et par référendum populaire, la même année. Invité de l'émission Evénements et opinions de la chaîne El Arabiya, Madani Mezrag, émir historique de l'AIS, a porté de graves accusations contre une partie du cercle des décideurs en Algérie. Pour l'enfant de Jijel, il existe toujours, au plus haut seuil de la décision politique, des responsables hostiles à la réconciliation et qui ont, par le passé, manifesté tout leur mépris envers la trêve décidée le 1er octobre 1997 par l'AIS, puis les accords AIS-ANP, et qui ont permis à quelque 3000 islamistes armés de déposer les armes et de retourner à la société qu'ils avaient quittée. Madani Mezrag, qui tient toujours à garder le secret sur la partie qui avait signé les accords avec lui et sur celle qui avait tenté de «faire échec» aux pourparlers islamistes-chefs militaires, estime que le GIA avait des interconnexions avec le Mossad et avec des services des renseignement étrangers, «vaste conspiration» dont sont partie prenante certains responsables algériens, encore présents dans les plus hauts centres de la décision politique. Contacté il y a quelques jours, Mezrag nous avait alors parlé d'«un blocage programmé» et qui interdit toute avancée «sérieuse» en matière de réconciliation nationale, propos confirmés par le chef de l'AIS pour la région Ouest, qui nous avait fait part de sa «satisfaction profonde» concernant le départ prématuré du chef d'état-major Mohamed Lamari, qui représente, a-t-il affirmé, «la face visible des chefs éradicateurs». Avant l'un et l'autre de ces deux chefs, le troisième chef tréviste, Ali Benhadjar, émir de la Ligue islamique de la daâwa et du djihad (Lidd), qui avait souscrit à l'option de la trêve émise par Mezrag, confirmait que les autorités avaient «tourné le dos à la concorde» et n'agissaient plus que par des faux-fuyants. «Concorde civile en trompe-l'oeil», disent les chefs trévistes, rejoignant les chefs politiques de l'ex-FIS dans une nouvelle escalade verbale, après six ans de «résignation» et de soutien politique et électoral sans faille à Abdelaziz Bouteflika.