Il n'y a pas que l'Algérie qui soit frappée par la chute des cours du brut. En effet, même l'Equateur, plus petit membre de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole, va procéder à 800 millions de dollars de coupes budgétaires supplémentaires, portant leur total à 2,22 milliards de dollars en 2015. En Algérie, le gouvernement préfère reporter les dépenses non budgétisées et les projets non urgents comme les tramways de nombreuses villes. Dès le début de l'année, le gouvernement avait commencé à parler de rationalisation des dépenses et non de réductions de dépenses. Les autorités ont adopté ce ton en raison de l'absence de rebond des prix du pétrole et de la conjoncture économique internationale à laquelle le pays doit faire face. Le pétrole est à moins de 50 dollars depuis quelques jours et le budget 2015 est bâti sur un prix référentiel du brut inférieur à 40 dollars le baril. Le gouvernement va diminuer ses dépenses courantes et suspendre des investissements qui peuvent être différés aux prochaines années et qui n'affectent pas en grande mesure la croissance économique et l'emploi. Même si les prix du pétrole remontent autour de 60 dollars, l'année 2015 sera difficile pour l'Algérie car on estime à des milliards de dollars les pertes en termes de recettes d'hydrocarbures. L'Algérie engrange environ 50 milliards de dollars de recettes en devises tirées des exportations d'hydrocarbures alors que les importations de biens et services du pays dépassent déjà les 60 milliards de dollars. Cela veut dire que l'Algérie enregistre un important déficit de sa balance des paiements. En d'autres termes, elle puise dans ses réserves de changes qui sont un amortisseur face aux chocs pétroliers. Le niveau de ses réserves en devises lui permet de financer trois ans d'importations de marchandises. La question se posera en fait avec plus d'acuité dans trois à cinq ans. Alors, face à la chute des cours du brut, il n'est pas inopportun de se poser la question «jusqu'où iraient les coupes budgétaires?» Ce sera un passage obligé car l'Algérie ne va pas piocher indéfiniment dans le Fonds de régulation des recettes pour effacer le trou budgétaire. Qu'il s'agisse des réserves de changes ou du Fonds de régulation des recettes, les recommandations du nouveau ministre des Finances, Abderrahmane Benkhalfa, se détachent des pratiques actuelles. Il appelait avant sa nomination à une gestion plus active des réserves de changes nationales qui ne doivent pas juste être enfermées dans un coffre mais permettre la création rapide d'un fonds souverain capable d'accompagner la diversification de l'économie algérienne. Avec un important déficit du budget de l'Etat, le fonds risque de s'épuiser en peu de temps avec le spectre des coupes budgétaires et une baisse des dépenses. En 2014 ce problème ne se posait pas même lors de la campagne pour l'élection présidentielle. Les pouvoirs publics étaient plus optimistes car pensant que le prix moyen du baril algérien s'établissant à 100 dollars était une situation qui allait durer pendant l'année en cours. La baisse des prix du pétrole a commencé en juin 2014 mais paradoxalement, les prévisions du ministère des Finances étaient très optimistes concernant l'évolution des prix du pétrole. C'était le cas pour la note de présentation de la loi de finances 2015. Mais était-ce bien prudent?