L'organisation dirigée aujourd'hui par Abdelmalek Deroukdel se trouve à la croisée des chemins. Bien que le ministre de l'Intérieur, Noureddine Yazid Zerhouni, ait minimisé à plusieurs reprises «l'apport» que pourrait avoir pour le renseignement algérien le n°2 du Groupe salafiste pour la prédication et le combat, Amari Saïfi, dit «Abderrezak El Para», récement récupéré par Alger, après une intercession de Tripoli auprès du Mdjt, il y a fort à parier que les services spéciaux seront à pied d'oeuvre pour collecter le maximum d'informations. Selon une source proche des services spéciaux algériens, les intérêts des renseignements se portent sur deux volets : l'organisation du Gspc à l'intérieur du pays et ses relations à l'extérieur du pays, notamment en Europe et dans les pays du Sahel. Pour le second volet, il s'agit de connaître comment s'est préparé le rapt des trente-deux touristes européens en mars 2003, de connaître dans le détail les péripéties de leur itinéraire d'Amgrid à Kidal, la mort de l'otage allemande en cours de route, les appuis islamistes ou autres au Mali et au Niger, l'épisode de l'acheminement des armes vers l'Algérie, le pourquoi de la poussée vers le Tchad. Ainsi que d'autres informations ayant trait à la relation avec Al-Qaîda, tels la teneur du message de l'émissaire de cette organisation, le Yéménite Imad Abdelouhed Alouane, tué dans une embuscade, près de Batna en septembre 2002, la tuerie des 45 soldats à Batna, début 2003, les contacts téléphoniques avec Aymen El-Zawahiri, l'éminence grise d'Al-Qaîda, etc. Autant de points où l'apport d'Amari Saïfi est d'une évidence manifeste et pourrait contribuer à remplir plusieurs blancs restés inexpliqués. Cependant, c'est sur le plan interne que l'apport du renseignement paraît le plus fort. Là, il s'agit de connaître l'armement du Gspc, ses filières, ses relais, ses caches, ses fiefs et QG dans la Kabylie et dans les maquis de l'Est, les réseaux urbains de soutien, les moyens de financement, etc. C'est-à-dire autant de points qui touchent directement la sécurité interne de l'Algérie et qui peuvent encore constituer un danger pour l'avenir. C'est en prévision de tout cela que le Gspc a très certainement entrepris de vastes mouvements de troupes, de larges mutations internes afin de rendre sans effet tout aveu que pourrait faire leur ancien mentor. Les dirigeants du groupe salafiste avaient tout fait pour récupérer «le Para», ou à tout le moins qu'Alger ne puisse pas le prendre: allant jusqu'à menacer le Mdjt de représailles sur son propre sol s'il le lui livrait pas le détenu salafiste. C'est en fait une course contre la montre que le Gspc a entrepris depuis l'annonce du rapatriement du chef de guerre salafiste, et c'est pratiquement tous les réseaux internes, toutes les structures et toutes les ramifications qui sont en état d'alerte maximum. Il s'agit, et vite, de procéder à de nouvelles mutations, changer, métamorphoser, «effacer», détruire ou masquer notamment les maquis de l'Est (Batna, Tébessa, Souk Ahras, etc.) fiefs et aire d'activité du Para, émir de la zone 5. Déjà on assiste à une manifestation de ces mutations, avec des actes de violence à l'Ouest (deux policiers tués à Relizane) et une poussée terroriste vers la capitale (attentats et assassinats aux portes d'Alger). Cette tendance, vérifiée déjà par le passé, va certainement prendre des formes plus précises dans les jours qui suivent, afin de laisser le temps aux nouvelles transformations de se faire: en faisant diversion et en portant la violence loin des zones à protéger.