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BOUTEFLIKA ACCORDE 6 MOIS AUX GROUPES ARMES POUR SE RENDRE
Publié dans L'Expression le 02 - 03 - 2006

Depuis plusieurs semaines, les groupes armés semblent observer une période d'accalmie.
Pratiquement les premiers concernés par la Charte pour la paix et la réconciliation nationale et par l'adoption des textes de loi, dont le discours du président Bouteflika, prononcé le 14 août 2005 au Palais des nations avait délimité les contours, les groupes armés, observent depuis plusieurs semaines une longue période d'accalmie. On peut traduire ce «wait and see sécuritaire» soit par des choix tactiques à prendre dans le contexte actuel, dominé par une exceptionnelle offre de paix qui les mettrait à l'abri de poursuites judiciaires, tout en leur permettant une issue honorable, soit par un déséquilibre des structures «militaires» internes, laminées par la poussée de la lutte antiterroriste.
Ce déséquilibre ne peut permettre aujourd'hui plus d'audace dans les actes de violence. On estime à quelque 120 hommes en armes dans la seule région de Toudja, là où avait été abattu l'officier juridique du Gspc, Mohamed Zerabib, il y a quelques semaines, et là où se trouve vraisemblablement, Abdemalek Deroukdel,l'actuel émir national de l'organisation. Toudja, située dans les contreforts de Béjaïa, offre refuge à ces hommes, qui seraient en trêve, non annoncée car non adoptée comme une position du Gspc.
A l'est de Béjaïa, dans les pourtours d'Adekar, Akfadou, Tifra, Toudja,Beni Ksila, Ouadas, Berchiche, à El Kseur, et sur les hauteurs d'Akbou, puis à l'ouest, dans la proche périphérie de Boukhalfa, à Amizour, Boukhlifa, dans la commune de Tichy, Kherrata, Laalam, et toute les limites départementales avec la wilaya de Sétif, plus de 200 membres du Gspc prennent position ou se déplacent au gré des ratissages militaires. Dans la seule région de Tizi Ouzou, on compte 80 terroristes fichés, répertoriés et officiellement recherchés, mais qui, hormis rackets, braquages et prises d'otages avec demande de rançon, ne s'illustrent pas par des actes de violence terroriste notables. A Boumerdès, sont encore recherchés les hommes des deux principales katibates hégémoniques dans la région, «Al Ansar» et «Al Farouk», soit l'équivalent de quelque 150 hommes. Rien que pour ces trois wilayas de la Kabylie, plus de 400 hommes activent dans les rangs du Gspc, la plus importante et la mieux structurée des organisations armées en Algérie.Les nouveaux textes de loi sur la réconciliation nationale prévoient une amnistie totale avec un délai de six mois, à compter de la publication des textes dans le Journal Officiel, pour ceux qui se présenteraient devant les autorités, avec leurs armes et ayant cessé toute activité terroriste. Sont concernés par ces dispositions aussi bien les terroristes actifs, qui ne seraient pas impliqués dans des actes criminels graves -crimes de sang, viols et explosifs déposés dans des lieux publics- que leurs réseaux de soutien, cellules dormantes et autres collaborateurs.
Mais en fait, aucune source crédible n'est aujourd'hui en mesure de dire combien d'Algériens sont aujourd'hui encore dans les maquis.
En 1995-1996, le nombre de terroristes était estimé à 27.000 hommes armés, selon les fichiers des Renseignements généraux. Au début de l'année 2005, le ministre de l'Intérieur Noureddine Yazid Zerhouni avait parlé de 400 hommes armés. Ali Tounsi, le patron de la Police algérienne avait dit: «Il reste encore entre 300 à 500 ». D'autres sources parlaient de 800.
L'ancien chef d'état-major de l'armée algérienne avait estimé le nombre de terroristes encore en armes à «un millier», dans un entretien accordé à l'hebdomadaire Le Point.
Entre-temps, «il y eut 450 terroristes abattus en 2004», selon le dernier rapport du département d'Etat américain sur le terrorisme dans le monde, qui s'est appuyé sur des sources sécuritaires algériennes sûres. Il y eut aussi des dizaines de redditions et d'arrestations effectuées par la police judiciaire, les RG, les Bmpj et les services spéciaux, mais aussi de «nouvelles recrues» qui ont fait à vingt ans et moins leur «baptême du feu» et quelques «retours aux maquis» de la part d'anciens repentis ou élargis, mais les derniers cas sont dérisoires, rares, insignifiants. Ce qui inquiète encore les services de sécurité ce sont les groupes de soutien, disséminés dans le tissu urbain des grandes villes. Tee-shirt, jean's et baskets, c'est pratiquement Monsieur Tout-le-monde qui entre en action. Les nouvelles recrues sont «inconnues au fichier du personnel»,les services de sécurité ne les soupçonnant qu'après coup. Récemment à Ben'choud, à l'est de Boumerdès, quinze adolescents ont rejoint les maquis du Gspc. «Ce qui m'effraie le plus, c'est qu'ils sont incapables d'écrire correctement leur nom, mais déjà maîtres dans le maniement artisanal des explosifs», nous confiait il y a quelques jours un officier militaire de la région. Quant à la mobilité des groupes armés encore opérationnels, c'est ce qui leur a permis de survivre. Voici les principaux groupes interpellés par les nouveaux textes de loi sur la réconciliation nationale:
Groupe salafiste pour la prédication et le combat (Gspc)
c'est aujourd'hui la principale organisation armée en Algérie avec un effectif fluctuant entre 300 et 500 hommes, dirigée aujourd'hui par Abdelmalek Deroudkel, dit «Abou Mossaâb Abdelwadoud», un ancien universitaire en électronique, et qui avait fait débuter son règne à la tête du Gspc par l'attentat contre la centrale électrique d'El Hamma, le 21 juin 2004 . Les principaux «réseaux algérois» du Gspc ont été neutralisés par les RG à Bab Ezzouar, Chéraga et Belcourt, en 2004, ce qui explique le calme que vit la capitale depuis. Les anciens QG de Takhoukht, Sidi Ali Bounab, Mizrana et Boumehni ont été délaissés pour d'autres de moindre importance mais plus sûrs. Des sources policières affirment que la direction de l'organisation se trouve aujourd'hui aux confins est de Béjaïa, lesquels permettent plusieurs «sorties».
Les principaux fiefs demeurent encore à Tizi Ouzou, Boumerdès, Bouira, M'sila, Tébessa, Batna, Sétif, Bordj Bou-Arréridj et Oum El-Bouaghi. La zone 9, commandée par MBM dit «Khaled Abou el-Abbès (Belmokhtar)» s'étend de djebel Boukhil, à Djelfa, jusqu'à l'extrême sud, avec des «pénétrations» au Mali, Niger, Mauritanie et Tchad pour l'achat et le convoyage des armes. La zone 2, dirigée par Saâdaoui Abdelhamid, dit «Yahia Abou el-Heythem», est actuellement la plus remuante, avec plusieurs assassinats ciblés en 2005. La zone qui s'étend de Boumerdès à Dellys attire aussi le «grand racket» tenté par une région riche d'une agriculture florissante, la proximité de la mer et la luxuriance des forêts environnantes.
Groupe islamique armé (GIA)
Complètement anéanti par les coups de filet policiers et les ratissages militaires menés entre fin 2002 et décembre 2004, le GIA, premier groupe islamique armé, constitué en octobre 1994, est aujourd'hui, crépusculaire. Après la mort de Zouabri, Ouakali Rachid dit «Abou Tourab Rachid», qui n'avait jamais eu une emprise réelle sur le groupe, est tué par ses propres compagnons en juillet 2004.
Son remplaçant Noureddine Boudiafi est neutralisé quelques mois après. Le ministre de l'Intérieur les crédite de «trois douzaines de terroristes encore actifs», dans le massif blidéen et les contrebas de la Mitidja.
Houmât ed-daâwa salafiyya (Ghds)
C'est actuellement un «groupe qui monte» et on a tendance à l'oublier. Dirigé par Benslim Mohamed, universitaire qui a été en Afghanistan avant de revenir en Algérie. C'est lui qui a pris en main ce groupe issu de la katibate Al Ahoual de Kada-Benchiha, et qui en est aussi le fondateur. Le Ghds évolue à Relizane, Ténès et fait des incursions jusqu'à Tipasa. Les derniers attentats qui ont ciblé des militaires à Gouraya lui sont attribués. On estime généralement le nombre d'éléments de ce groupe à une centaine.
Groupe salafiste pour la prédication et le djihad (Gspd)
Séparé du GIA en 1997, Abdelkader Saouane, dit «Abou Thoumana» crée ce groupe à Derrag, et sévit un temps à l'ouest de Médéa en passant plus au nord jusqu'à Cherchell. Aujourd'hui, il ne reste qu'une trentaine d'hommes dans ce groupe qui possède la stratégie du Gspc mais pas son importance. Le Gspd survit entre Derrag (Médéa) et djebel Echaoun(Tissemsilt).
Groupe salafiste combattant (GSC)
Créée par Douadji Yahia dit «Abou Amar» en fin 2001, «la djamaâ es-salafiya el-moukatila» a toujours activé entre Mascara, Sidi Bel Abbès, Tlemcen, Saïda et Oran.
Evalués à 70, ses effectifs ont été totalement laminés par les services de sécurité, bien qu'ils aient continué à briller par d'épisodiques actes de violence. En 2003, le chef du GSC contracte une «alliance stratégique» avec le Gspc et mène, depuis lors, des attentats ciblés à l'Ouest, mais sans résultats ni effets médiatiques d'importance.


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