Trois ans après son lancement, l'initiative ne jouit plus du même enthousiasme auprès des observateurs. Une vingtaine de chefs d'Etat et de gouvernement africains se réuniront mardi prochain à Alger pour évaluer le programme de mise en oeuvre du Nouveau partenariat pour le développement en Afrique (Nepad). Outre les architectes de cette initiative, les présidents Abdelaziz Bouteflika (Algérie), Thabo Mbeki (Afrique du Sud), Abdoulaye Wade (Sénégal), Hosni Moubarek (Egypte) et Obasanjo (Nigeria), d'autres dirigeants africains sont annoncés à la rencontre d'Alger dont le Premier ministre éthiopien Meles Zenawi. Adopté par l'UA (Union africaine) à Lusaka (Zambie) en juillet 2001, le Nepad se résume à un plan de développement qui ambitionne d'atteindre un taux de croissance de 7% dans les quinze premières années et de réduire de moitié la pauvreté dans le vieux contient, d'ici à 2015. Trois ans après son lancement, l'initiative ne jouit plus du même enthousiasme auprès des observateurs. Elle s'apparente à une chimère tant les objectifs de ce louable projet sont difficilement réalisables. A commencer par la mobilisation des fonds pour le financement des programmes. Ce sont les IDE (Investissements directs étrangers) qui devaient servir de ressources au Nepad. Selon la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced ), l'Afrique ne reçoit que 1% des flux mondiaux d'IDE. Les raisons de cette «sécheresse», tiennent à l'instabilité politique, aux conflits ethniques, à l'absence de transparence institutionnelle et à un environnement économique peu attractif. L'enthousiasme affiché par le G8 pour accompagner ce programme est resté lettre morte, il fallait donc se rabattre sur les financements des Africains. Or, plus de 40 % de l'épargne africaine sont placés à l'étranger et les mécanismes de mobilisation de cet argent font véritablement défaut. L'Afrique compte 25 millions de personnes vivant avec le VIH/sida, alors que 180 millions sont dans une situation de malnutrition chronique, selon la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. Dans le même registre des critiques, les observateurs reprochent au Nepad son caractère technocratique «loin» des réelles préoccupations des Africains. Actuellement, entre 6% et 25% seulement des Africains occupent un emploi salarié, les autres étant soit au chômage soit au service de l'économie informelle ou de l'agriculture, elle-même souvent informelle, selon le BIT, alors que 320 des 820 millions d'habitants du continent noir subsistent avec moins d'un dollar par jour, selon l'ONU. D'autre part, sur les 55 pays les plus pauvres du monde, 33 se situent en Afrique subsaharienne en proie à la «malnutrition, la pauvreté, l'illettrisme et à une situation sanitaire désastreuse», selon le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud). Un autre grief de taille retenu contre le Nepad est son silence sur le problème de la dette qui constitue le tendon d'Achille du développement en Afrique. Par ailleurs, les observateurs redoutent la réédition des mêmes erreurs que celles induites par les plans d'ajustement structurels (PAS) entamés en Afrique depuis plus de 20 ans. Et pour cause, les partenaires du Nepad, la Banque mondiale, le FMI et l'OMC, risquent de faire glisser le Nepad vers une soumission idéologique au néo-libéralisme. L'une des exigences de ces institutions financières a été le principe de bonne gouvernance. Le même principe est contenu dans le projet de l'Administration Bush, le Grand Moyen-Orient, décrié par certains pays d'Afrique du Nord. Aux critiques des observateurs, il faut ajouter celles des autres entités. L'Organisation de coopération et de développement économique (Ocde) est catégorique dans ses prévisions: «L'Afrique subsaharienne devrait être la seule région au monde où le nombre de pauvres continuera à augmenter d'ici 2015, et donc la seule région où les objectifs de développement fixés à l'occasion du millénaire ne seront certainement pas atteints.» Sans commentaires.