Amar Tou craint de nouveaux dérapages aux conséquences incommensurables. Même si rien ne va plus dans les rangs du FLN, de nombreux ministres continuent de se montrer «relativement optimistes» même si les ambitions ne sont guère les mêmes qui animaient le mouvement de redressement à sa naissance. Ainsi en est-il notamment pour Amar Tou à qui le mouvement doit beaucoup. Sans contester la dernière déclaration d'Abdelaziz Belkhadem indiquant que «le congrès rassembleur aura lieu durant la seconde quinzaine du mois de décembre prochain», notre interlocuteur s'évertuera à souligner qu'il s'agit avant tout «de réunir les conditions minimales pour la tenue d'un congrès relativement acceptable». Tou, énième personne à démentir catégoriquement les supposés saccages dont aurait été victime le siège du parti à l'occasion de la démonstration de force des redresseurs du jeudi 11 novembre, fait montre de ses craintes d'assister à de nouveaux dérapages. Quant à la menace de plainte brandie par Abdelkrim Abada et les siens, le ministre la balaie d'un revers de main en soulignant que «ce n'est pas le premier venu qui a le droit de s'exprimer au nom du FLN, et encore moins d'agir en son nom». Il ajoute «ne lui reconnaître aucune légitimité». Amar Tou, il faut le dire, a toujours mis en avant sa préférence en faveur de la base, et uniquement elle. C'est pourquoi il conclut pour dire que «seul le congrès rassembleur, durant lequel la parole reviendra à la base, aura le droit de choisir ses représentants». Mohamed Seghir Kara, ministre du Tourisme et ancien porte-parole du mouvement de redressement, loin d'en penser moins, refusera toutefois d'entrer dans la «polémique» initiée par Abada. «Cet homme veut nous entraîner vers des voies sinueuses visant à tronquer le débat, à lui faire gagner du temps. Aussi, ne le suivrons-nous pas et refuserons-nous de répondre à ses attaques pour le moins injustifiées.» Pour revenir au congrès en question, que Tou continue de qualifier de «rassembleur» même si le torchon brûle désormais entre les anciens redresseurs et pro-Benflis, il semble qu'il y ait très peu de chance pour que ce rendez-vous ait lieu avant la fin de cette année. Le risque est également grand que le RND profite de cette mauvaise passe pour accaparer la place de leader de la classe politique à l'occasion des prochaines élections. Amar Tou, qui ne conteste pas foncièrement une pareille analyse, continue d'espérer que rien de cela ne se produise et que le FLN s'en sorte avec le moins de dommages possibles, et dans des délais également raisonnables. Il faut dire qu'il y a pas moins de 1600 kasmas, plus nombreuses encore que les communes, au sein desquelles il faudra réussir à rassembler les rangs, ce qui est loin d'être facile, comme le reconnaît bien volontiers notre interlocuteur. C'est dans ce sens que Belkhadem, dans une circulaire publiée, hier, au nom de la commission provisoire que les redresseurs rejettent pourtant, a exhorté les militants au calme, explicitant les instructions concernant la mise en place des commissions de wilaya, puis de commune, en attendant les assemblées générales qui éliront démocratiquement les délégués congressistes. Pour Belkhadem, donc, il faudra inclure dans chaque commission les députés et membres du comité central issu du 7e congrès qui ne font pas partie de la commission nationale. Idem pour les députés et les sénateurs. Ces commissions devront également inclure en leur sein les bureaux des mouhafadas ainsi que ceux des coordinations, 3 à 5 élus locaux ainsi que 5 «vétérans» dont la sagesse et la pondération devraient servir de ciment pour atténuer les vieilles rancoeurs, loin d'être éteintes encore. Si la crise du FLN en est encore à son énième rebondissement, tout porte à croire que le parti est quand même à une croisée des chemins à partir de laquelle il peut soit s'en sortir définitivement, soit continuer de péricliter pour céder sa place à son frère ennemi, le RND, qui attend patiemment de prendre sa revanche depuis mai 2002.