Morano-Sarkozy, un tandem pour faire peur Après les propos «hasardeux» de Sarkozy sur la révision des accords d'Evian, le «voisinage» risqué de l'Algérie, et autres incantations judéo-chrétiennes, il apparaît que lors de la prochaine présidentielle, toute la stratégie électorale de la droite sera fondée sur le seul thème «haro sur la communauté musulmane». Quand Sarkozy se tait, ce sont ses proches qui prennent le bâton de pèlerin pour s'en aller clamer sur les plateaux de télévision leur sentiment raciste et leur programme islamophobe. C'est le cas de Nadine Morano, député européenne et ancienne ministre, cet «être facultatif» selon l'expression de l'humoriste Guy Bedos, qui s'inscrit dans la pré-campagne de Nicolas Sarkozy devenu, par la force des choses, le concurrent, stricto sensu, du Front national. Mme Morano n'en est pas à sa première tirade contre les communautés immigrées, mais, là, sa sortie mérite la palme du Canard enchaîné. Elle aurait dû rester au lit, ce soir-là, au lieu de verser son fiel au cours de l'émission «On n'est pas couché» (France 2), professant que «la France est un pays de race blanche» et qu'elle «n'a pas envie de la voir devenir musulmane». Puisant dans un argumentaire digne des Le Pen, elle a ajouté que «pour qu'il y ait une cohésion nationale, il faut garder un équilibre dans le pays, c'est-à-dire sa majorité culturelle». Son sens de l'équilibre étant très relatif, elle explique, en appelant à la rescousse le général de Gaulle qui a dû sursauter dans sa tombe de Colombey-Les-Deux-Eglises: «Nous sommes un pays judéo-chrétien - le général de Gaulle le disait -, de race blanche, qui accueille des personnes étrangères. J'ai envie que la France reste la France», larmoie-t-elle. Pour une Morano bleu marine, partir en croisade contre les immigrés, majoritairement perçus comme musulmans, est une chose naturelle et rentable dans la mesure où elle permet de chasser sur les terres de l'extrême droite. Aussi, retrousse-t-elle allègrement ses cotillons pour danser la farandole, avec la revendication faussement ingénue d'une patrie judéo-chrétienne et celle d'un Etat laïc, tant pis pour la contradiction, feignant l'étonnement devant la réaction indignée de son auditoire parce que le mot «race» figure dans le dictionnaire, et que, foi de Morano, elle «ne voit pas ce qu'il a de choquant». Volant à son secours, sur les antennes du Grand Jury, la présidente du FN en oublie, pour un temps, son bras de fer avec l'autre Le Pen, son père de surcroît, et assène, sans sourciller, que Nadine Morano «citait des propos du général de Gaulle» et qu'il «ne faut pas chercher des polémiques là où il n'y en a pas». Le général a bon dos et Jean-Marie qui a des choses à dire sur l'âme judéo-chrétienne de la France qu'elles disent défendre a, sans doute, sursauté sur son lit, lui aussi! Comme elles se comprennent, n'est-ce pas! On dirait des siamoises de conjecture qui portent le même étendard, celui d'une Nadine et d'une Marine qui rêvent, toutes deux, d'être les Jehanne des temps modernes. Sauf qu'au final, elles ne voient, l'une comme l'autre, que le bûcher des Français musulmans, une appellation bien connue, ici en Algérie, où elle recouvrait un esclavage à peine déguisé. Après les propos «hasardeux» de Sarkozy sur la révision des accords d'Evian, le «voisinage» risqué de l'Algérie, et autres incantations judéo-chrétiennes, il apparaît que lors de la prochaine présidentielle, toute la stratégie électorale de la droite sera fondée sur le seul thème «haro sur la communauté musulmane». La communauté algérienne, et d'origine algérienne, sera la plus ciblée car Sarko n'a plus besoin de venir quémander le sauvetage d'Alstom et le soutien de sa campagne électorale, sachant que Hollande est passé par-là. Ainsi, par-delà quelques réactions scandalisées des partis de gauche et le silence laudateur des dirigeants de la droite, s'impose l'image d'une France qui sombre, de jour en jour, dans un climat d'islamophobie et de racisme ordinaire, volontiers caressée dans le sens du poil par les porte-voix d'une ambition politique prête à marcher dans la fange, après avoir piétiné des milliers de cadavres. Que dire de plus? L'aptitude à la gymnastique et aux exhibitions de haut vol de Nadine Morano ne sont un secret pour personne et il ne faut donc pas s'étonner que, pour les Antillais dont la couleur n'est pas à proprement parler un gage de race blanche, elle rétorque, sans rougir le moins du monde, n'ayant ni honte ni pudeur, que «s'ils ne sont pas Blancs, il n'en demeure pas moins qu'ils sont français, puisqu'ils appartiennent aux Territoires d'outre-mer». Allons, allons, Mme Morano, un peu de hardiesse, que diable, et dites carrément le fond de votre pensée, «les Antillais, sans être blancs, sont français parce qu'ils nous appartiennent!»... Au moins, cela sera plus clair, faute d'être limpide.