Le Cnes dit dans sa missive qu'il n'a en aucun cas donné son aval pour l'organisation du meeting en son siège. Le Comité national pour les libertés syndicales (Cnls) est convaincu que seule une action de protestation commune, regroupant tous les syndicats autonomes, pourrait contraindre l'Exécutif à faire marche-arrière concernant «sa démarche allant dans le sens de rétrécir le champ d'action des organisations syndicales». C'est dans ce contexte qu'un meeting, animé par neuf syndicats membres du Cnls, aura lieu aujourd'hui dans les locaux du Cnes (Conseil national des enseignants du supérieur). «Scandalisés» par les dernières mesures prises par le gouvernement, «en faisant appel surtout à la justice pour mettre fin à des actions de débrayage», ces militants syndicaux visent à travers cette rencontre intersyndicale une action de dénonciation mais aussi de sensibilisation devant «attirer l'attention de l'opinion publique sur le sort et la situation des libertés syndicales en Algérie». Par ailleurs, une pétition sera ouverte aux citoyens à partir d'aujourd'hui, afin «de dénoncer collectivement les dernières mesures prises par le gouvernement». Une démarche qui, selon le porte-voix du Cnls, le Dr.Besbas, s'inscrit «à contre-courant des lois de la République». D'ailleurs, a-t-il renchéri, «le droit à la grève est reconnu par la Constitution algérienne et la loi syndicale 90-02 dans son article 32». Le fait que le gouvernement «remette en cause» le droit à la grève est une «violation de la Constitution», estimait, hier, M.Besbas dans une déclaration à L'Expression. Il est d'autant inacceptable, selon lui, que «le ministre du Travail et de la Sécurité sociale a déclaré ouvertement que désormais, le tribunal est la seule institution habilitée à statuer sur la légalité de tout mouvement de débrayage». Notre interlocuteur a évoqué un autre sujet de friction avec les pouvoirs publics : des organisations syndicales revendiquent depuis plus de deux ans leur droit à l'agrément, «chose qui demeure jusqu'ici un sujet fâcheux aux yeux des instances concernées». Allusion faite à l'attitude prise par le département de M.Tayeb Louh à ce sujet. «Intolérable», estime de son coté le coordinateur national du Cnapest, M.Meziane Meriane sur cette même question. Tout en assurant, lui aussi, que «l'heure n'est pas à l'acquiescement à la démarche gouvernementale vis-à-vis des syndicats autonomes», M.Meriane émet, mezza voce, d'autres critiques. «L'enregistrement de notre syndicat est conditionné par la levée des réserves demandées au Cnapest». Or, s'interroge le porte-parole du Cnapest, «le dossier de notre syndicat était toujours complet». Meziane Meriane parle ensuite, sans réserve, d'une situation grave des libertés syndicales en Algérie. Sans expliquer son point de vue, ce dernier promet qu'il commentera son avis au cours du meeting. Dans une autre déclaration, le Dr.Yousfi, président du Syndicat national des praticiens spécialistes de la santé publique (Snpssp), apporte sa contribution: «Je m'interroge sur la stratégie des pouvoirs publics à l'égard des revendications syndicales et sur la mise en cause du droit à la grève qui est consacré par la Constitution», affirme le président du Snpssp, qui se dit «préoccupé» au vu de cette «situation inquiétante des libertés syndicales». Faut-il rappeler dans la foulée que le tribunal d'Hussein Dey s'est prononcé, récemment, sur la suspension de la grève observée par le Snpssp et ce, à la suite d'une plainte introduite par le ministère de la Santé. Interrogé hier sur cette question, M.Yousfi a été on ne peut plus explicite. Le président du Snpssp, qui avait déjà fait part de ses condamnations, est aussi critique sur le fait que la grève soit arrêtée par un juge. Et d'ajouter qu'«il existe d'autres mesures réglementaires pour mettre fin à un mouvement de débrayage». Contacté par nos soins, M.Redouane Osmane, porte-parole du Conseil des lycées d'Alger, s'est dit lui aussi «scandalisé» à propos de la gestion par les pouvoirs publics du dossier des syndicats autonomes. Entre autres griefs, M.Osmane critique «la mise à l'écart des partenaires sociaux» ainsi que «le sort réservé aux revendications des enseignants qui demeurent toujours sans suite». Sur ce point, M.Osmane n'a pas exclu, précédemment, d'avoir, encore une fois, recours à la grève comme moyen de protestation. Quant au Conseil national des enseignants du supérieur, il se déclare, dans un communiqué parvenu hier à notre rédaction, «non concerné par la tenue de ce meeting et que le Cnls reste un cadre de concertation, de réflexion et de proposition sur la défense des libertés syndicales». Globalement, neuf syndicats prendront part à ce rendez-vous qui a comme objectif principal: «Avertir l'opinion publique quant à la dégradation de la situation des droits syndicaux et des libertés plurielles en Algérie». Enfin, il sied de souligner que le Cnes dit, dans sa missive, qu'il n'a en aucun cas donné son aval pour l'organisation dudit meeting en son siège. Une déclaration qui suscite des interrogations sur le lieu de la tenue de ladite rencontre.