Le Salon du livre est un véritable hymne à la lecture Quelle est belle cette planète du livre! Ces jardins que sont les différents stands où chaque bouquin est une fleur pour l'esprit et une lumière pour le coeur! Le Salon international du livre d'Alger qui est aujourd'hui à sa quatrième journée (journée d'inauguration officielle comprise) est un véritable hymne à la lecture, cette passion qui n'est pas près d'être reléguée au second plan après que les nouvelles technologies se soient incrustées presque subrepticement pour ne pas dire sournoisement dans la vie quotidienne de la majorité des êtres humains. La preuve, si besoin est, ce sont ces milliers, voire ces dizaines de milliers de visiteurs qui affluent sans cesse vers la foire des expositions depuis jeudi dernier. Ce qui retient aussi l'attention, lors de cette 20e édition du Sila tout comme les précédentes, peut-être plus encore cette fois-ci, c'est le fait qu'à travers cet événement culturel, ce sont tous les courants de la pensée algérienne qui y sont représentés. Il y en a pour tous les goûts et pour toutes les convictions intellectuelles. Et pour une multitude de langues. En plus de tamazight et de l'arabe qui sont des langues nationales, les visiteurs ont aussi l'embarras du choix entre le français, l'anglais, l'espagnol, l'italien, l'allemand, le russe, le chinois, le japonais... C'est ça l'Algérien, il donne l'impression qu'il est un fervent de l'unicité linguistique, mais la réalité du terrain est tout autre. Certes, il s'agit peut-être d'exceptions, mais ces exceptions sont tellement nombreuses qu'elles finissent par ne plus l'être. Autrement, comment expliquer que le stand des Etat-Unis d'Amérique, est pris d'assaut par des centaines de lecteurs férus de la langue du pays de l'Oncle Sam, autant que l'espace dédié pour la première fois entièrement au livre écrit en langue amazighe et occupé par une dizaines d'éditeurs. C'est le cas aussi des éditions françaises, Gallimard, Hachette, Larousse, Flammarion. Il en est de même concernant les stands des éditeurs venus des nombreux pays arabes et qui font le bonheur de nombreux lecteurs et d'écrivains qui sont aussi des lecteurs d'abord et avant tout. C'est le cas de Mohamed Sari, l'auteur de nombreux romans mais aussi d'une infinité de traductions de romans du français vers l'arabe dont les oeuvres de Mohamed Dib et plus récemment Boualem Sansal. Mohamed Sari, rencontré au gré du hasard et du Sila, au niveau du stand des éditions Chihab (au Pavillon central) parle avec un grand enthousiasme de cet événement culturel, le plus grand selon lui, que l'Algérie abrite annuellement. «Moi personnellement, si ce n'était pas ce salon, j'aurais eu du mal à me procurer des centaines de livres en langue arabe que je lis tout au long de l'année. Par exemple, où voulez-vous que je trouve une traduction de Gabriel Garcia Marquez en arabe, si ce n'est au niveau des stands des pays arabes participant au Sila», explique Mohamed Sari. Ce dernier vient de traduire le livre «Mémoire d'une combattante de l'ALN de Zohra Drif». L'ouvrage en arabe vient d'ailleurs d'être mis sur le marché à l'occasion du Sila au stand Chihab. Un peu plus loin, un peu plus jeune mais talentueux et plein de fougue, Tarik Djerroud est présent aussi bien en tant qu'éditeur qu'en tant que romancier. Venu de la lointaine Béjaïa, il lui a fallu de se réveiller à quatre heures du matin pour être à l'heure dans son stand (les Editions Tafat) à l'ouverture du premier jour du Sila. Ce n'est point un sacrifice pour Tarik Djerroud, dont la passion pour le livre n'a d'égale que son talent pour l'écriture. Il est à son cinquième roman publié et il ne compte pas s'arrêter en si bon chemin. En matière d'écriture et d'édition, Tarik Djerroud et sa maison d'édition Tafat, sont un exemple à suivre. Et le Sila, ce n'est pas seulement l'occasion pour parler des éditeurs qui ont déjà pignon sur rue depuis des décennies. C'est aussi l'aubaine pour évoquer des éditeurs n'ayant que peu de moyens, mais qui ont voulu signer de leur présence à tout prix quitte à perdre financièrement en cours de route. Car les prix de location des stands pour cette année ont augmenté. Ce n'est donc pas évident que certains éditeurs puissent rentrer dans leur frais. Mais, comme l'a si bien suggéré le commissaire du Sila, il est temps que les éditeurs se départissent définitivement de l'esprit purement mercantiliste. Et c'est dans cette perspective que s'inscrit la participation de pas mal d'éditeurs où l'affluence des visiteurs et des acheteurs n'est pas aussi importante qu'ailleurs mais la compensation morale est immense. Ce qui compte, ce n'est pas tant et seulement les ventes, c'est aussi le fait de prendre part à cet événement culturel pour dire que dans la vie il y a des choses plus importantes que le beurre et l'argent du beurre». Les premiers jours du Sila, on peut le dire sans risque de se tromper, augurent, à bien des égards, d'une nouvelle édition qui sera sans doute couronnée de succès à l'instar des éditions précédentes. Surtout que cette année, l'édition sera ponctuée par la remise du prix Assia Djebar du meilleur roman aussi bien en arabe qu'en tamazight et en français. L'attribution de ce prix, qui est grandiose et prestigieux de par le nom qu'il porte (Assia Djebar est non seulement l'une des plus grandes figures de la littérature algérienne mais aussi, il ne faut pas l'oublier, membre de l'Académie française), mais aussi de par l'importance que les autorités culturelles algériennes lui accordent.