Alger résistera-t-elle à une autre forte secousse tellurique? En renouant avec les secousses sismiques, les Algérois renouent avec la psychose des effondrements de leurs vieilles bâtisses. La secousse de magnitude 5,7 sur l'échelle de Richter enregistrée, mercredi dernier à 18h 45, et dont l'épicentre se situe à deux kilomètres au nord-ouest de Zemmouri (wilaya de Boumerdès), a réveillé les vieux démons. Les Algériens n'ont pas encore fait complètement le deuil du drame qui a frappé la région, en ce 21 mai 2003. La panique que ce séisme a engendrée est telle que ceux qui en ont ressenti les conséquences, en gardent encore un amer souvenir. Il faut dire que nul n'est rassuré et le spectre de nouveaux drames n'est pas à exclure. La réhabilitation de la capitale traîne en longueur et la construction des nouvelles villes qui auraient pour mission l'extension et l'embellissement de la métropole n'ont pas encore vu le jour. La plupart des immeubles de la capitale datent de l'époque coloniale et certains sont estampillés de la croix rouge. La Casbah à elle seule est constamment sous la menace et s'étiole au fil des jours dans l'insouciance la plus totale des autorités. Et pourtant que de sommes colossales ont été dégagées dans ce but. Il ne se passe pas un jour sans que des malchanceux viennent alourdir la longue liste des sinistrés qui s'entassent dans des chalets en attendant des jours meilleurs. Le vieux bâti reste un problème inextricable auquel sont confrontés les pouvoirs publics. Cependant, rien n'est fait d'une manière étudiée et rationnelle pour en venir à bout. Pour preuve, les vieux immeubles qui défigurent rues et venelles et qui sont voués à la démolition sont toujours en attente de bulldozers et autres engins de terrassement alors que leurs habitants désespèrent d'être relogés. A défaut, ils se morfondent en incantations et en prières pour ne pas se retrouver sous les décombres quand la terre décidera de les surprendre. Ces craintes ne sont pas fortuites. Le parc immobilier d'Alger est si vieux qu'on le voit s'effriter à l'oeil nu. La plupart des immeubles de la métropole algéroise sont dans un état de délabrement avancé par, notamment, leur vétusté avérée. Ce fait parle de lui-même en beaucoup d'endroits. Une réalité visible dans plusieurs quartiers. On peut citer ceux des Anassers, Belcourt, Hassiba Ben Bouali, Meissonier, Bab El Oued, ainsi que la mythique Casbah. Ce sont tous les édifices du Front de mer qui nécessitent une politique de réaménagement et d'urbanisme. Cela dit, le problème ne date pas d'aujourd'hui. A l'époque coloniale déjà, avec le faste d'antan, la capitale a fait en 1926 l'objet d'un grand projet d'embellissement et il était question d'une démolition massive allant u quartier de la Marine jusqu'à l'actuelle Place des Martyrs. Cependant ce projet n'a pu aboutir du fait que son initiateur, l'architecte Le Corbusier affichait clairement son engagement anti-colonialiste, étant du mouvement de gauche. Au lendemain de l'indépendance, c'est le Comedor (Comité permanent d'études, de développement, d'organisation et d'aménagement) qui, au cours des années 1970, a élaboré une stratégie pour le développement d'Alger aux horizons de l'année 2000. Ce plan bien entendu comme ceux qui suivirent ne donnèrent aucun résultat. La population s'est densifiée alors que peu d'infrastructures ont été réalisées en répondant à des normes anti-sismiques. N'oublions pas que la ville se trouve sur une zone à forte activité sismique. Elle a déjà fait les frais d'un violent séisme en 1365 qui l'a détruite à moitié. Le vieux bâti s'écroule et nul besoin à la terre de trembler pour cela. Alger, la ville millénaire qui a résisté aux tempêtes, aux inondations, au pilonnage des avions français et aux récents coups durs, résistera-t-elle à une autre forte secousse tellurique?