«Ils veulent casser le travail du président. Nous demandons à Bouteflika de diligenter une enquête». Une vive polémique s'est installée dans la sphère économique au lendemain de la bipartite tenue ce jeudi au Palais du gouvernement entre le patronat et l'Exécutif. Des membres du Conseil national consultatif pour la promotion des PME (CNC) qui regroupe pas moins de 36 organisations patronales sont sortis de leur mutisme, hier, en marge de l'assemblée générale ordinaire tenue à l'hôtel El Djazaïr en présence du ministre de tutelle, Mustapha Benbada, pour crier haro sur la bipartite qu'ils qualifient de «rencontre entre l'officiel et l'informel. Les capitaines de l'industrie nationale ont été écartés pour que des personnes qui ne représentent qu'elles-mêmes soient désignées comme des partenaires économiques alors que certains d'entre eux ne possèdent même pas de registre du commerce et encore moins d'agrément». Il faut préciser que le CNC créé à la demande des entrepreneurs privés et publics a été institué en 2003, conformément à la loi 01-08 du 12 /12/2001et au décret 08-03 relatif à l'organisation et au fonctionnement dudit conseil. A cette époque, il devait constituer, selon un consensus entre le gouvernement et les partenaires économiques, le seul vis-à-vis dans les réunions au sommet. La bipartite, qui a mis sur le tapis des divergences profondes, a été un véritable fiasco, selon des observateurs. Le dossier de la privatisation, avec ce qu'il suscite de convoitises s'agissant des entreprises dissoutes et de leurs actifs, a été le plus significatif. A noter que l'Ugta est membre du CNC au même titre que les organisations patronales. Durant l'assemblée qui s'est tenue hier, l'on a remarqué certaines absences, notamment de ceux qui se concertaient autour de la table des négociations ce week-end au Palais du gouvernement. Il semblerait que ces derniers ne sont pas vus d'un bon oeil par leurs compères. Ils auraient ainsi préféré éviter d'affronter leurs collègues. Certaines sources qui étaient présentes à la réunion bilatérale entre l'Exécutif et le patronat ont décrit l'atmosphère tendue dans laquelle s'est déroulée la rencontre: «Les patrons se chamaillaient pour prendre la parole. Ils sont arrivés avec des exigences inconcevables. Ils ont eu un piètre comportement devant le chef du gouvernement qui a apparemment compris la supercherie». M.Mohamed Kermal, membre du CNC, de la CAP et président de la Fédération nationale des transports, ne mâche pas ses mots. «Toute cette agitation qui anime ces vampires n'a qu'un seul but, c'est de rafler les entreprises publiques dissoutes et de les reprendre au dinar symbolique. La privatisation aiguise bien des appétits». Il ajoute non sans une pointe d'amertume: «Ils veulent casser le travail du président. Nous demandons à Bouteflika de diligenter une enquête dans ce sens. Ce sont des gens qui sont à l'origine de l'informel. Comment vont-ils le combattre?» M.Boualem M'Rakech est pointé du doigt: «Cette personne va discuter confortablement avec le chef du gouvernement alors qu'elle trempe dans des affaires louches. Il a été accusé de détournements . Je le défie lui et quiconque dans cette bipartie de montrer leur PV d'élection», dit M.Kermal qui promet des révélations fracassantes pour les jours à venir. Il accuse certains opérateurs économiques d'être les tenants de l'économie informelle. Rappelons que les organisations patronales qui ont participé à la bipartite font partie du CNC. C'est à ce titre que l'on ne comprend pas pourquoi ce dernier, bien qu'ayant été représenté à travers son président M.Bensasi, n'en a pas été vraiment un interlocuteur puisque ce sont les organisations patronales représentées par les Cnpa, Cgea, CAP, Cipa, Unep, et le Seve qui ont été mises en avant. Un membre du CNC qui a requis l'anonymat évoque un article paru dans le journal El Moudjahid daté du 25 novembre dernier qui aurait tout chamboulé et serait, selon notre source, à l'origine d'un changement par la chefferie du gouvernement de la liste des participants. L'article en question reprend mot à mot une déclaration du président du CNC, Mohamed Bensaci, concernant la situation de l'entreprise algérienne. Il y est écrit que «le pays n'a pas de stratégie de développement claire». Mohamed Bensaci décrit «un marché fragile, un tissu industriel destructuré et un système bancaire en déphasage avec les mutations en cours». Nous n'avons même pas, a-t-il précisé, les conditions optimales pour affronter la concurrence qui s'annonce à la faveur des échéances attendues». M.Bensaci a réitéré ses propos en affirmant que «nous sommes en face d'une déferlante et que nous serons soumis aux contraintes si nous ne faisons rien pour remédier à cette situation». Nous avons appris, de source sûre, que la réunion s'est préparée au pied levé. Cette information ne sera d'ailleurs pas démentie par Mustapha Benbada, ministre des PME-PMI et de l'Artisanat à qui nous avons posé la question. Il a confirmé que le gouvernement ne disposait que d'un délai de 15 jours durant lequel tout a été décidé. Concernant la participation restreinte des cinq organisations, il a rétorqué qu'«effectivement, mon département a reçu beaucoup de demandes, cependant il était confronté à un problème de statut».