L'aboutissement d'un long combat Les artistes, poètes et chanteurs de la région de Kabylie ont aussi exprimé leur soulagement suite à cette décision historique qui vient couronner un combat et des sacrifices de plusieurs générations d'Algériens. «A travers cette officialisation, le président de la République Abdelaziz Bouteflika a tourné une page jusque-là semée d'embûches. C'est tout le peuple algérien qui se réconcilie avec son identité et son histoire», estime un inspecteur d'enseignement moyen de langue amazighe exerçant dans la wilaya de Tizi Ouzou. Les artistes, les enseignants de tamazight, des inspecteurs de la même langue, des auteurs et les citoyens en général, tout le monde à Tizi Ouzou, a accueilli hier avec une indescriptible liesse et une satisfaction réelle la nouvelle de la reconnaissance de la langue amazighe comme langue officielle dans la prochaine Constitution algérienne. Brahim Tazaghart, auteur de nombreux romans en tamazight et également militant de la première heure du Mouvement culturel berbère, contacté par téléphone, juste après l'annonce de cette mesure révolutionnaire par Ahmed Ouyahia, a exprimé toute sa satisfaction. Pour cet écrivain en tamazight, la prise de cette décision historique constitue en fait la correction et la réparation d'une grande injustice envers l'histoire plusieurs fois millénaire de notre pays. Les artistes, poètes et chanteurs de la région de Kabylie ont aussi exprimé leur soulagement suite à cette décision historique qui vient couronner un combat et des sacrifices de plusieurs générations d'Algériens. Farid Ferragui, l'un des plus grands artistes algériens d'expression berbère, qui a tant revendiqué la reconnaissance de la langue amazighe dans ses innombrables chansons, contacté aussitôt après l'annonce de l'information, hier matin, lors de la conférence de presse animée par le ministre d'Etat et directeur de cabinet de la présidence de la République, Ahmed Ouyahia, n'a pas caché sa grande satisfaction. Farid Ferragui considère que, même si beaucoup de temps a été mis pour enfin réparer cette injustice, la décision de conférer le statut de langue officielle à tamazight est historique. «Le combat identitaire était juste et légitime, la justice a fini par l'emporter sur la tyrannie, tant mieux! Il s'agit d'une décision qui sera marquée en lettres d'or dans la page de l'histoire, qui était falsifiée, de notre pays. Je suis heureux d'apprendre la nouvelle», nous a déclaré le poète Farid Ferragui, l'un des artistes les plus adulés dans la région de Kabylie. Une réaction de liesse partagée par tous ceux qui ont lutté pour que tamazight recouvre la place qui devait être la sienne depuis toujours. C'est le cas de Abdellah Arkoub, inspecteur d'enseignement moyen de langue amazighe à Tizi Ouzou, mais aussi militant de la cause identitaire et surtout de l'enseignement de tamazight. Abdellah Arkoub considère que l'officialisation de la langue amazighe suivie de la création d'une académie est la consécration de tout un combat mené par plusieurs générations au prix de sacrifices énormes: «Nous ne pouvons que saluer cette décision historique. Toutefois, il faut rester vigilant quant à la suite qui sera donnée pour la consolidation de ces acquis par une prise en charge réelle et effective.» Pour Abdellah Arkoub, les tenants du pouvoir doivent mobiliser tous les moyens de l'Etat pour le développement et l'épanouissement de tamazight et mettre un terme aux surenchères politiciennes. A travers cette officialisation, le président de la République Abdelaziz Bouteflika a tourné une page jusque-là semée d'embûches. C'est le peuple algérien qui se réconcilie avec son identité et son histoire». La même réaction enthousiaste, on la retrouve chez les citoyens qui exercent différentes professions et qui trouvent que le fait que tamazight soit reconnu comme langue officielle n'est pas du tout un fait à sous-estimer quand bien même certaines voix sans doute malintentionnées tenteraient de minimiser un tel acquis extraordinaire. L'officialisation de la langue amazighe ne peut pas être évoquée sans qu'il y ait une pensée pour tous les militants qui se sont sacrifiés et qui se sont battus, de toutes leurs forces, et avec sincérité, pour la réhabilitation de cette dimension incontournable de l'identité algérienne. D'abord aux enfants du boycott qui ont sacrifié une année de leur scolarité en 1994/1995 pour cette cause. A des militants de la cause berbère assassinés par balle ou décédés à l'instar de Mouloud Mammeri, Matoub Lounès, Bessaoud Mohand Arav, Mohand Haroun, Moh Achour Belghezli et tant d'autres. Aux militants qui sont aussi de ce monde et qui assistent à la prise d'une telle décision qui relevait de l'utopie, il y a à peine quelques années. Et comme le chantait si bien Matoub Lounès avec un grand optimisme en 1989: «Tamazight tban, iserhazd zman...».