Les deux attentats suicides ont fait 56 morts L'EI a pris pied dans le pays où il a revendiqué plusieurs attentats sanglants dont un triple attentat suicide à Al-Qoba (est), en février 2015, qui avait fait 44 morts. Plus de 50 personnes ont péri jeudi en Libye dans un attentat suicide contre un centre de la police dans l'ouest, la pire attaque dans ce pays depuis 2011, et six autres sont mortes dans un attentat suicide dans la ville pétrolière de Ras Lanouf. Dans la ville de Zliten (170 km à l'est de Tripoli), un kamikaze a fait détoner des explosifs à bord d'un camion-citerne à 08h30 (06h30 GMT) contre le centre de formation de la police, a indiqué une source de la sécurité locale. Selon un témoin, il y avait dans le centre quelque 300 hommes dont une majorité de gardes-côtes. L'attaque n'avait pas été revendiquée en fin de journée. Le groupe jihadiste Etat islamique (EI) a profité du chaos pour s'implanter en Libye, où deux gouvernements rivaux -l'un dans l'Est reconnu par la communauté internationale et l'autre siégeant à Tripoli- se disputent le pouvoir. «Entre 50 et 55 personnes ont été tuées et au moins 100 blessées» dans le quartier bondé de Soug al-Talata, dans le centre-ville de Zliten, ville contrôlée par la coalition des milices de Fajr Libya liée aux autorités de Tripoli, a déclaré le porte-parole du ministère de la Santé, Ammar Mohamed Ammar. Le porte-parole de l'hôpital de Zliten, Mouammar Kadi a affirmé que son établissement avait accueilli au moins 40 corps et 70 blessés. L'hôpital de Misrata, à 70 km plus à l'ouest, a reçu quatre morts et une cinquantaine de blessés. Plus tard dans la soirée, un autre attentat suicide a fait six morts, dont un bébé, et huit blessés à un point de contrôle à l'entrée de la ville pétrolière de Ras Lanouf, dans l'est de la Libye, selon le Croissant-Rouge. L'EI avait mené lundi des attaques visant les installations pétrolières notamment à Ras Lanouf, entraînant des combats avec les gardes de ces sites. La télévision libyenne a diffusé des images de centaines de personnes participant aux funérailles des victimes de Zliten dans le stade de football de la ville. Bravant le froid et les rafales de vent qui soulevaient des nuages de sable, les fidèles, toutes générations confondues, se sont vite organisés en rangs ordonnés, debout pour la «prière de l'absent». A Tripoli, Mohamad Bachir al-Naas, vice-ministre de la Défense, a dénoncé «un crime ignoble». Dans l'Est, le gouvernement reconnu a lui aussi condamné «un acte terroriste lâche» et appelé à lever l'embargo de l'ONU sur les armes pour pouvoir lutter contre le «terrorisme». Il s'agit de l'attentat le plus meurtrier depuis la révolte qui a mis fin au régime de Mouammar El Gueddafi en 2011. Pays à la structure essentiellement tribale, la Libye est depuis morcelée et sous la coupe de milices formées d'ex-rebelles. Profitant de ce chaos, l'EI a pris pied dans le pays où il a revendiqué plusieurs attentats sanglants dont un triple attentat suicide à Al-Qoba (est) en février 2015 qui avait fait 44 morts. Le groupe jihadiste, qui combat les forces des deux autorités rivales, contrôle la ville de Syrte (450 km à l'est de Tripoli) et cherche à élargir son contrôle à d'autres régions. L'émissaire spécial de l'ONU pour la Libye, Martin Kobler, a condamné l'attentat de Zliten et appelé «tous les Libyens à s'unir de manière urgente pour combattre le terrorisme». L'ONU s'efforce de mettre en place un gouvernement d'union et M. Kobler a souligné la nécessité pour le Parlement légitime d'approuver rapidement sa formation, prévenant que tout retard profiterait à l'EI. Un accord prévoyant un tel gouvernement a été signé sous l'égide de l'ONU le 17 décembre par des membres des deux Parlements rivaux, et doit être entériné avant le 17 janvier. Condamnant fermement les attentats, les Etats-Unis, l'Union européenne, la France et l'Italie ont encouragé les Libyens à s'unir face «au terrorisme» et à appliquer «d'urgence» l'accord sur le gouvernement national. Les Occidentaux poussent les Libyens à former un seul gouvernement, qu'ils pourront soutenir face aux jihadistes. L'EI compte environ 3.000 combattants en Libye selon Paris. Les Occidentaux redoutent que le groupe s'enrichisse en prenant le contrôle des hydrocarbures, déstabilise l'Afrique sur le flanc sud, et exporte des jihadistes vers l'Europe. Les attentats ont été revendiqués hier par l'EI qui entend montrer ainsi sa capacité à empêcher les efforts de la médiation onusienne de parvenir à sceller une unité et mettre fin à la lutte pour le pouvoir que mènent les principaux groupes politiques de Tripoli et de Tobrouk. Les craintes manifestées par les pays occidentaux et leur impatience grandissante pour contraindre les factions libyennes à proclamer le gouvernement d'union se trouvent ainsi pleinement justifiées.