Mohamed-Lamine Debaghine est une figure atypique de la révolution algérienne. Un hommage lui a été rendu hier à Alger. Lors d'une conférence animée hier au complexe culturel Larbi Ben M'hidi d'Alger-Centre à l'invitation de l'Association Mechaâl Echahid, en hommage à Mohamed-Lamine-Debaghine, Rédha Malek est revenu longuement sur le parcours «de cet authentique militant» qui compte parmi les premiers responsables du Mouvement national algérien et ce, en présence d'un des neveux du défunt et de plusieurs autres personnalités à l'image de Zohir Ihaddaden, du maire d'Alger-Centre, etc. «Lamine Debaghine est un militant de race. Il a rejoint le PPA en 1939, deux ans seulement après sa création. Et alors qu'il était encore étudiant, Messali étant arrêté, il a assuré la présidence du PPA et en tant que tel, il a joué un grand rôle dans la naissance des AML. Lors de la Seconde Guerre mondiale, il a refusé de s'engager pour la France, mais affirme clairement sa position contre les régimes fascistes d'Allemagne et d'Italie. Ceci lui a valu un emprisonnement et des tortures. Durant cette période, il a investi le terrain pour répandre ses idées nationalistes et sensibiliser les Algériens sur la nécessité de déclencher une lutte armée pour recouvrer l'indépendance du pays et restituer sa souveraineté au peuple algérien. Tout cela, bien entendu, au moment où Ferhat Abbas et ses amis prônaient l'assimilation et où seuls quelques militants du PPA étaient en faveur de la lutte armée,» a-t-il déclaré d'emblée. Poursuivant son exposé, le porte-parole de la délégation algérienne à Evian a évoqué le travail effectué au sein de l'Assemblée française en tant que député de Constantine, notamment en affirmant, contrairement aux «assimilationistes» qui soutenaient le contraire, que «la nation algérienne existe». Mais, après sa démission du PPA, Mohamed-Lamine Debaghine a repris son travail de médecin à El Eulma jusqu'en 1955 où les Krim Belkacem, Mourad Didouche et Mostefa Benboulaïd sont allés le voir pour lui demander de reprendre du service, ce qu'il accepta avant d'être envoyé, à la suite du congrès de la Soummam, pour superviser le travail de la délégation extérieure au Caire. «Au Caire, Lamine Debaghine a essayé de faire de son mieux mais le fait que Abane Ramdane l'ait imposé à la tête de la délégation extérieure a créé des problèmes au sein de celle-ci et il était, de ce fait, marginalisé par ses pairs. Mais en 1958, avec la création du GPRA, il a été appelé pour occuper le poste de ministre des Affaires étrangères» a-t-il rappelé avant d'évoquer sa «démission». Néanmoins, Rédha Malek a tenu à préciser que Mohamed-Lamine-Debaghine «était un homme taciturne qui préférait écouter plutôt que parler» mais intransigeant sur le plan politique. «Le docteur Debaghine avait un sens très élevé des responsabilités morales, politiques et intellectuelles. Il aimait écouter les gens. Et quand il n'était pas d'accord et qu'il n'arrivait pas à faire passer son point de vue, il quittait en silence. Il ne dévoilait jamais ses désaccords au grand jour. Il tenait beaucoup à la cohésion et à l'unité du Mouvement national», a-t-il déclaré. Evoquant enfin sa «démission du GPRA» le 15 mars 1959 suite à un désaccord avec Ferhat Abbas et Abdelhafid Boussouf, Ben Bella et Boudiaf, il a indiqué que Mohamed-Lamine Debaghine n'aime pas les orages, ce qui fait d'ailleurs qu'il n'a même pas laissé de Mémoires. Né à Cherchell le 24 janvier 1917, Mohamed-Lamine-Debaghine est décédé le 20 janvier 2003 à Alger, à l'âge de 86 ans, des suites d'une attaque cérébrale. Il est enterré au cimetière de Sidi M'hamed d'Alger.