L'Assemblée populaire nationale devra débattre, dès aujourd'hui, le projet de loi relatif à l'organisation des prisons et à la réinsertion sociale des détenus. Les lois qui continuent à régir les prisons algériennes, aujourd'hui, largement trentenaires, n'ont pas uniquement atteint leurs extrêmes limites, mais sont devenues, de ce fait, surannées, inadaptées, voire inhumaines. Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Tayeb Belaïz, avait exposé, dimanche dernier devant la commission des affaires juridiques, administratives et des libertés de l'APN, les grandes lignes de ce projet élaboré par le gouvernement dans le cadre de la réforme de la justice. Le traitement des détenus, les conditions de détention, les espaces et règles conformes aux normes universelles, le respect des droits de l'homme dans les prisons, etc., seront autant de points importants à mettre en forme et en pratique si l'on veut éviter le «printemps noir des cellules» (2002). La réalisation de nouveaux établissements pénitentiaires hors des villes est à ce point important pour éviter que ne se répètent les événements douloureux qui ont suivi les mutineries en Algérie, entre 1994 et 2002. L'actuel chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia, sait à quoi s'en tenir en la matière : c'est sous sa tutelle (il était alors ministre de la Justice) que se sont «allumées» les prisons au printemps 2002, avec, au bout, un bilan de 46 morts et 141 blessés, et c'est parce que, justement, il craint que ces événements douloureux ne se répètent que le conseil des ministres avait débattu longuement le projet de loi portant organisation des pénitenciers, en juillet dernier. Le chef de l'Etat avait, lui aussi, donné « le coup de fouet » pour accélérer une telle réforme, en répétant, à plusieurs occasions, que la réforme pénitentiaire devait s'assigner comme finalité «de faire des établissements pénitentiaires des institutions sociales capables réellement de contribuer à la réadaptation des détenus et à leur réinsertion dans la société». La modernisation du secteur, l'humanisation des conditions d'incarcération et la promotion des droits de l'homme en milieu carcéral ont été des thèmes que le président de la République avait développés à chaque occasion. Les conditions de détention restent en Algérie assez difficiles, et les mesures qui régissent le milieu carcéral sont floues, opaques, obscures, parfois carrément inhumaines. Des cas de suicide ont été enregistrés ces dernières années et de véritables réseaux de la «zetla connexion» s'y sont développés et proliférés, rendant la sortie du détenu plus compromise que le jour de son arrivée. En 2002, et en l'espace d'un mois (du 2 avril au 9 mai), plusieurs foyers de tension se sont déclarés dans les prisons algériennes : mutineries, recours à la force, incendies et bagarres générales ont fait la une de la presse, à Chelghoum Laïd (22 morts et 20 blessés), à Serkadji (23 morts et 2 blessés), à Sétif, Constantine, Béchar, Aïn M'lila, Sidi Bel Abbès et Annaba, c'est-à-dire dans pratiquement toute l'Algérie, faisant 200 victimes, 46 morts et 141 blessés, dont plusieurs grièvement. Ce printemps noir des cellules algériennes avait poussé les autorités à se pencher sérieusement sur ce qui se passait dans les prisons. Et Dieu sait que ce qui se passait était très souvent inhumain.