Responsable du département étude et surveillance sismique au Craag, il explique le mécanisme qui a provoqué le séisme de Sumatra. L'Expression: L'Indonésie vient d'être frappée par un très fort séisme. Scientifiquement, comment expliquer cet événement? Hamou Djellit:Ce qui s'est produit en Indonésie est un tsunamis, c'est-à-dire une lame de fond qui s'est abattue sur les côtes ouest de l'archipel volcanique indonésien et tout le Sud Est asiatique. C'est l'île de Sumatra qui a été particulièrement touchée. Il faut savoir que cet archipel est composé de 17.000 îles. Cette lame de fond a été provoquée par un séisme qui s'est produit à 150 kilomètres des côtes indonésiennes dans l'Océan Indien. Ce qu'il faut savoir c'est que cette région du monde est située à l'intersection de deux grandes plaques océaniques : la plaque indienne à l'ouest et la plaque pacifique à l'est. Elles ont la particularité de dériver rapidement. L'affrontement entre ces deux plaques a provoqué des subductions, c'est le principe d'une plaque qui plonge sur une autre, dont l'un des résultats est justement l'émergence des archipels volcaniques indonésiens et japonais. L'activité des volcans est provoqué par l'affrontement entre ces deux plaques. Aussi, les séismes qui sont localisés autour de cette bordure qu'on appelle la ceinture de feu, sont tout à fait naturels. Quant à la violence de l'activité tectonique, elle est en rapport avec les plaques mises en cause. Ces dernières ne sont pas continentales et sont basaltiques, jeunes, légères et rapides. Donc leur mouvement est très forcé parce qu'elles sont très rigides. Mécaniquement, elles refusent de s'entraîner en profondeur, vu leur légèreté. Cela provoque une accumulation de forces incroyables. Cet état de fait cause souvent des séismes de très forte puissance. Pour vous situer l'impact de la jeunesse des plaques sur l'activité sismique, je citerai l'exemple d'une autre plaque océanique, celle de l'Atlantique. Cette dernière dont l'âge est estimé à 180 millions d'années est autrement plus lourde que celles qui bordent l'Indonésie. Elle a donc tendance à s'enfoncer sous son propre poids, générant une activité sismique relativement plus modérée. Ce tremblement de terre intervient quelques jours seulement après celui qui s'est produit en Tasmanie. Y a-t-il une relation entre ces deux séismes? Au moment d'un séisme, on parle d'une dissipation d'énergie, donc de son transfert ailleurs. Pour les sismologues, quand de tels phénomènes sont géographiquement assez éloignés, l'on ne peut pas évoquer un transfert total ou partiel du tremplin d'énergie du séisme de Tasmanie vers Sumatra. L'amplitude légèrement plus faible du tremblement de terre de Tasmanie est une indication supplémentaire. Cela dit, dans l'absolu, le séisme de Sumatra est relié à celui de Tasmanie du fait que globalement, les plaques sont en relation les unes avec les autres. Cependant, il n'est pas possible, pour l'heure, une preuve physique d'une quelconque relation de cause à effet entre les deux tremblements de terre. Mais ce qui est sûr par contre, c'est qu'à Sumatra, il y a eu accumulation d'énergie à l'échelle locale, laquelle a provoqué la cassure des plaques. L'on enregistre de très nombreux séismes de par le monde. La terre serait-elle entrée dans une nouvelle phase sismique? Pour les sismologues, il n'y a pas eu de changements significatifs dans l'activité tectonique de la planète. Il est vrai que de temps en temps, on enregistre des séismes assez rapprochés, mais il n'existe pas d'indices probants qui montrent qu'il y aura une activité soudainement importante. Cela dit, la communication est devenue très rapide. Les médias ont pris une importance telle que les citoyens sont très bien informés et en temps réel. Bien plus qu'avant. Le deuxième facteur a trait au fait que le centre du pays a été frappé par un fort séisme. Les gens deviennent donc beaucoup plus sensibles à ce genre d'informations. En Algérie, nous, nous vivons plus dans le même état psychologique que celui qui a précédé le 21 mai 2003. Dans le passé, en Chili en 1965, il y a eu un séisme parmi les dix plus importants du siècle. Cet événement n'a pas bouleversé les Algériens parce que l'information leur est parvenue avec du retard, mais aussi parce qu'il n'avaient pas, à l'époque, vécu un tel traumatisme. Qu'en est-il pour le Bassin méditerranéen, d'autant que ces dernières semaines, plusieurs petits séismes y ont été constatés. Il n' y a pas d'activité sismique anormale au niveau du Bassin méditerranéen. Il y a eu plusieurs séismes dans cette région du monde, en Grèce à El-Asnam, Agadir, etc. On aurait pu penser, à cette époque-là, à une nouvelle configuration. Or, ce n'est pas le cas. Ce que je peux dire, par contre, c'est qu'au niveau du Bassin méditerranéen, l'activité sismique est modérée. La ligne d'affrontement entre l'Afrique est l'Europe est vieille. Elle est à l'origine de séismes qui peuvent atteindre le degré 7 sur l'échelle de Richter, mais pas de la violence de celui de Sumatra. Seulement, les séismes dans cette zone sont continentaux, c'est-à-dire qu'ils se produisent à l'intérieur des terres, d'où les dégâts qu'ils provoquent.