«Engoncé» dans un costume jean délavé, l'accusé n'a pas la même froideur que sa soeur dont le témoignage n'a vu aucune larme tomber sur ses joues. S. T., 25 ans, est une belle et jolie fille, fiancée à A. B. Un soir, son jeune frère de 19 ans, N.T., tape à la porte. Il est ivre. Ils s'installent face à la TV. Ils regardent un clip suggestif puis tout bascule... L'horreur qui fait vaciller l'Arche d'Allah... S. T. est certes jolie, belle mais aussi charmante et froide comme un névé. Debout à la barre, tout comme son cadet N.T., nie les faits qu'ils ont eux même racontés devant les policiers et le juge d'instruction deux ans auparavant. Les deux frangins n'ont pas arrangé le tribunal criminel d'Alger. Non plus leurs avocats, Me Ouali Laceb et Abdelmadjid Silini, non encore remis de la décision de la commission des élections du conseil de l'ordre d'Alger. Ils ont tout fait, rien dit, tout nié, rien reconnu. Pas le moindre mot qui puisse les enfoncer. Pourtant, les faits ont été débités par les deux accusés : inceste, fait prévu et puni par l'article 337 bis alinéa 2. Suivons le récit de la soeur. N. T., le frangin, tape un soir vers 22 heures. S. T., sa soeur aînée, ouvre la porte. Ils s'installent sur le canapé et tournent le bouton de la TV. N. T. est éméché. Pour son âge, c'est grave. Il commence à parler. S. T. écoute, subjuguée. Il raconte ses aventures avec les filles puis lâche gauchement, entrant dans les ténèbres d'où il ne sortira plus jamais: «Tu sais, S., j'ai fait l'amour avec notre cousine L.R. Elle est super. Ça a été bien», dit-il alors que le clip est hard. Il est même suggestif. «Et alors, elle est mieux que moi?», rigole S.T., qui commence à avoir l'oeil vif, brillant, mouillé même. Elle commence à se dénuder... N.T. se tourne vers sa soeur. Elle lui rend le regard plein de désir charnel, illicite, chaud... S.T. décide de son propre chef de «sauter» son frère. «Depuis qu'il m'a dépucelée, il a évité mon regard». L'effet de l'alcool dissipé, N.T. a dû se cogner la tête contre le mur de la honte et éviter de croiser sa soeur. Trop tard, S.T est enceinte. Grâce à une robe ample, elle cacha sa grossesse tant bien que mal. Un soir, elle demande à son frère, «père de son enfant» de l'accompagner à l'hôpital. Sur place, l'hôpital n'étant pas une écurie, on exige les papiers. N.T. donne le prénom de sa soeur. S. X sous X. «Je croyais qu'en prétendant être le père de l'enfant, l'affaire n'allait pas sortir des bureaux de l'administration», dit peut-être en mentant N.T., ce beau gosse dont le faciès tient beaucoup de l'acteur hispano-yankee Sal Mineo, disparu précocement et tragiquement il y a une vingtaine d'années. «Empoché» dans un costume jean délavé, l'accusé n'a pas la même froideur que sa soeur dont le témoignage n'a vu aucune larme tomber sur ses joues. Là aussi, entouré de Lounès Brahimi et Saâd Mekrouk, Abdelaziz Mechiche, le président du tribunal criminel joue son va-tout. Aujourd'hui, les PV d'audition sont le «Coran», même si les deux avocats, le délégué Me Ouali Laceb et le bâtonnier Silini, avaient vivement opposé une farouche résistance considérant les feuilles comme servant à titre d'info. Rien n'y fit. Pire : Yazid Sakhraoui, le PG n'est pas allé de main morte. Pour lui, les deux saynettes débitées ce jour à la barre, relèvent de la fiction et du phantasme. S.T. a complètement changé de version. N.T., lui, a tendu à égorger lorsqu'il prétend avoir commis le crime d'inceste pour taire la faute de sa soeur avec son fiancé, a-t-il articulé avant de requérir 15 et 10 ans de réclusion criminelle à l'encontre de la soeur et du frère incestueux, victimes du diable en chaleur. C'est Me Laceb Ouali qui plaide le premier. Il s'étale sur les us et coutumes dans nos foyers. Il parle de cataclysme ayant fauché deux familles. Il n'est pas d'accord avec la prise de position du juge et du PG, qui s'accrochent aux premières déclarations et s'écrie: «Où est donc le test d'ADN ? A-t-on effectué des analyses ? Non, alors à défaut de l'acquittement, nous demandons un complément d'infos (ADN). Me Silini débute sa plaidoirie lentement avant d'effectuer une envolée autour des termes de l'article 212 du code de procédure pénale (les débats du jour de l'audience et la conviction des juges qui se bâtit dans la salle d'audience). Puis, il s'interroge sur l'attitude du père qui est intervenu auprès de ses deux enfants, car convaincu de leur innocence. Le témoignage du fiancé aussi a été mis en valeur. Me Silini espère l'acquittement. Après de courtes délibérations, S.T et N.T. écopent respectivement de 7 et 5 ans de réclusion criminelle, les faits étant établis.