Un semblant de logis qu'il faudra quitter sous quinzaine. Une famille plonge dans le drame Des retraités de l'Education nationale sont en train de vivre un véritable drame. Au moment où ils pensaient profiter paisiblement de leur petite retraite, voilà qu'ils risquent de devenir SDF. Une petite feuille, un petit avis d'expulsion et voilà qu'on brise la vie d'un homme! C'est le triste sort qui est réservé aux retraités de l'Education nationale! Ils ont formé des générations de cadres pour le pays et aujourd'hui ils sont menacés d'être jetés dans la rue comme de vulgaires malfrats.Leur crime: avoir occupé des logements de fonction. Une ingrate rétribution. Plusieurs cas d'avis d'expulsion de retraités de l'Education nationale ont été signalés ces derniers jours à travers le territoire national. Les avis d'expulsion sont devenus la hantise de ces retraités qui vivent dans des logements d'astreinte. A qui le tour? Chaque jour ils se réveillent inquiets attendant qui sera le prochain. B. F., ancien intendant au lycée séminaire -Akram El Makhzoumi, de Notre Dame d'Afrique à Alger, fait partie des victimes de ces décisions lâches et arbitraires. Il y a une quinzaine de jours, on est venu frapper à sa porte. Ce n'était pas un invité ou des responsables de l'Education nationale qui étaient venus le féliciter pour sa belle carrière, mais un huissier de justice qui lui apportait une lettre empoisonnée. Celle qui signifiait la rupture tragique avec un monde pour lequel il s'est sacrifié durant plus de 30 ans. On lui demande de quitter le mois prochain le toit qui couvre sa famille. «Oui, mais pour aller où?», nous demande cet homme rencontré à l'entrée de cet établissement scolaire qui ne fera bientôt plus partie de sa vie. «Je n'ai aucun bien à mon nom. J'ai une famille de quatre personnes à charge. Ma retraite de misère ne me suffit déjà pas à vivre, alors si je dois encore louer c'est la vraie catastrophe», ajoute-t-il en nous exhibant l'avis d'expulsion où il est mentionné qu'il occupe un F2. Il nous invite à venir visiter son appartement, enfin si on peut appeler ça un appartement! C'est en fait une cage à poules partagée par trois murs pour faire un semblant de salon, cuisine et dortoir que se partage toute la famille. Pour les sanitaires, il a «bricolé» une pièce à l'extérieur où il a construit une douche-toilette! Indigne pour un être humain qui plus est a géré un établissement de la trampe de ce lycée. «Je suis l'un des mieux lotis des 12 locataires de ce semblant d'immeuble. Les autres c'est pire! Vous voyez l'insalubrité; au lieu de nous reloger dans de vraies maisons ils vont nous jeter à la rue»,s'indigne-t-il en soutenant qu'il n'avait jamais rien demandé aux autorités, malgré les conditions désastreuses dans lesquelles il vit. «Je me disais hamdoulillah, l'essentiel que mes enfants aient un toit. On se contentait du peu qu'on avait, et je m'en serais contenté jusqu'à la fin de mes jours, mais Zoukh et Benghebrit veulent m'enlever ce peu pour me laisser avec rien, même pas ma dignité...», peste-t-il avant de s'excuser pour aller pleurer loin de notre regard. A son âge, se retrouver à la rue! L'humiliation de trop... Son coeur n'a pas supporté cette ingrate rétribution et ultime humiliation que lui a réservée sa tutelle. Surtout que c'est un enchaînement de problèmes qui lui tombent sur la tête d'un seul coup. «Ma femme a une grave maladie des reins. Elle est hospitalisée depuis un mois. Je viens de revenir de l'hôpital où je lui ai pris de quoi se nourrir. Je ne lui ai rien dit pour l'expulsion, j'ai peur pour sa santé mais je ne sais pas où nous irons pour sa convalescence», rapporte cet homme des plus désespérés. «J'ai toujours veillé au bien-être de ma famille et à l'éducation de mes enfants qui ont tous fait des études, mais à la fin de ma vie voilà que nos responsables vont remettre en cause les efforts de toute une vie», fait-il remarquer. «Vous savez mon fils passe le bac cette année. Quand il est rentré à la maison et a vu l'avis d'expulsion, il a décidé de tout abandonner. Ils l'ont brisé. Il est pourtant bon élève. Il ne suit plus ses cours depuis 15 jours. Il m'a dit à quoi cela sert d'avoir le bac si dans un mois on est tous dans la rue...», raconte-t-il, les larmes aux yeux. «Ils m'ont brisé. Ils ont détruit toute ma famille. Sont-ils tranquilles avec leur conscience?», poursuit-il avant de leur lancer un appel: «S'il vous reste un peu d'humanisme, laissez-nous au moins le temps de trouver une solution, à défaut de nous trouver un logement», les conjure-t-il en soutenant qu'il ne parlait pas que de son cas mais de celui de milliers d'autres travailleurs de l'éducation, qui, aujourd'hui retraités, avaient été assurés que le jour où ils quitteraient ces logis, ils bénéficieraient d'une habitation décente. «Nous étions exclus des formules Aadl, du social ou de toute autre formule», soutiennent ces retraités. A.A.H en fait également partie! Habitant dans un logement d'astreinte à Chéraga, il est passé hier devant le juge pour lui aussi subir le sort de...l'expulsion. Cet ancien proviseur qui a consacré 45 ans de sa vie à l'Education nationale est devant la même fatalité. «Ils veulent me faire sortir de ce logement. Oui, je suis d'accord mais à condition de me reloger. Là, ils vont me jeter à la rue...», s'indigne-t-il. Voilà donc comment nos éducateurs risquent de se retrouver en fin de vie dehors, sans toit, alors qu'au même moment, l'Etat distribue des logements à tout bout de champ à des personnes qui n'ont jamais travaillé. Après une vie consacrée au service de l'enseignement, ils se retrouvent traduits en justice comme des criminels, sans le moindre respect pour leurs sacrifices. Que dire alors du décret présidentiel qui interdit l'expulsion des retraités? La loi et les circulaires du Premier ministre leur assurent un logement décent ou au moins le maintien dans les lieux. Or, rien de tout cela n'est respecté. Dans quelle jungle vivons-nous messieurs?