Le Nigeria et ses voisins ont marqué des points dans leur offensive militaire contre le groupe Boko Haram mais ils ne devraient pas crier victoire trop vite, prévient l'International Crisis Group (ICG) dans un rapport diffusé hier. Le groupe, qui sévit depuis 2009 dans le nord-est du Nigeria, a causé la mort d'au moins 20.000 personnes selon la Banque mondiale et ses attaques visent aussi les régions frontalières au Cameroun, Tchad et Niger. «Si la riposte militaire contre Boko Haram est aujourd'hui plus convaincante, les pays du bassin du lac Tchad ne devraient pas considérer trop vite que leur mission a été accomplie», estime le centre de réflexion dans son rapport. Le groupe a essuyé de nombreux revers ces derniers mois depuis le lancement d'une opération armée de grande envergure du Nigeria, aidé par ses voisins, et en décembre 2015, le président nigérian Muhammadu Buhari le considérait comme «techniquement» défait. Mais les attentats-suicides, qui demandent peu de moyens logistiques, n'ont pas cessé pour autant. Le Nigeria doit accueillir le 14 mai un sommet sur la sécurité. Cette rencontre, qui intervient deux ans après le sommet sur Boko Haram à Paris, est selon l'ICG une «occasion de consolider la coopération à la fois régionale et internationale», notamment parce qu'une meilleure coordination entre les armées de la région est primordiale pour lutter contre Boko Haram. Il est aussi «vital» de «distinguer les idéologues de Boko Haram de ceux qui ont rejoint le mouvement pour d'autres raisons», souligne l'ICG, parce que «si l'on parvient à gérer correctement les anciens membres, ce sera un premier pas vers une baisse des recrutements». L'armée nigériane a annoncé mardi que plusieurs dizaines d'anciens combattants du groupe suivaient un programme de «déradicalisation» dans un endroit tenu secret. L'ICG recommande également au Nigeria de ne plus utiliser les services de milices locales. Ces miliciens pourraient être «utilisés à mauvais escient» par les «hommes politiques locaux», dit le rapport. «Même s'il est affaibli, Boko Haram risque d'être difficile à éradiquer» sans s'attaquer aux «défis structurels profonds» du Nigeria, que sont le chômage, la corruption endémique, la pauvreté, les inégalités régionales et la mauvaise gouvernance, explique aussi l'ICG.