Les chefs d'Etat du Nigeria, du Niger, du Tchad, du Cameroun et du Bénin sont réunis mardi dans la capitale nigériane Abuja pour finaliser la mise en place d'une force régionale de près de 9.000 hommes avec l'objectif d'en finir avec le groupe extrémiste armé nigérian Boko Haram. Cette réunion au sommet a été préparée par deux jours de discussions préalables entre les ministres de la Défense et les chefs militaires de ces pays. Le sommet doit finaliser les derniers détails de la Force d'intervention conjointe multinationale (MNJTF), dotée de 8.700 militaires, policiers et civils, fournis par les cinq pays, et dont le quartier général sera installé dans la capitale tchadienne N'Djamena. Elle sera commandée par un général nigérian, Tukur Buratai. La création de cette nouvelle force avait été décidée en mai 2014, après le kidnapping de plus de 200 lycéennes à Chibok, au Nigeria. Elle aurait dû déjà être opérationnelle en novembre dernier, mais des différents entre certains de ces pays ont retardé sa mise en place. La force, soutenue par l'Union africaine (UA), est censée être plus homogène que l'actuelle coalition militaire. Son quartier général coûtera quelque 30 millions de dollars durant les 12 prochains mois, a indiqué mercredi Sanusi Imran Abdullahi, chef de la Commission du Bassin du lac Tchad. Le Nigeria et ses alliés ont lancé une offensive conjointe contre Boko Haram depuis février et enregistré de nombreux succès militaires, faisant reculer le groupe armé qui s'est mué en un mouvement armé affilié à l'organisation autoproclamée "Etat islamique" (EI/Daech) et menaçant toujours les pays de la région, malgré une série de revers sur le terrain. Ceux-ci avaient infligé une série de défaites à l'armée nigériane depuis la mi-2014, et avaient commencé d'attaquer les territoires frontaliers du Cameroun, du Niger et du Tchad, ce qui a précipité l'engagement de ces pays dans le conflit, notamment de l'armée tchadienne. Le nouveau président nigérian décidé à vaincre Boko Haram Le président du Nigeria, Muhammadu Buhari, un ancien général qui a pris ses fonctions le 29 mai, s'est engagé à vaincre Boko Haram qui a fait plus de 15.000 morts depuis six ans. Dès son investiture, M. Buhari a ordonné au commandement militaire du pays de relocaliser son bureau à Maiduguri, épicentre de Boko Haram, et d'y rester jusqu'à ce que le dernier des terroristes soit éliminé et que les lycéennes soient sauvées. L'ancien chef de l'armée avait promis que son administration donnerait un nouvel élan aux efforts visant à éliminer la menace de Boko Haram. Sitôt investi, il a visité ses alliés au Tchad et au Niger pour discuter de la lutte collective contre Boko Haram. Puis il s'est rendu au sommet du G7 en Allemagne le week-end dernier pour appeler les dirigeants des pays riches à le soutenir davantage dans sa lutte contre le groupe extrémiste. M. Buhari cherche ainsi le soutien tactique des communautés mondiales pour mettre fin rapidement aux atrocités commises par Boko Haram. Selon le président, le Nigeria continuera à solliciter l'appui des pays voisins dans sa tentative de surmonter Boko Haram. Il a fait savoir que le Nigeria aurait également besoin de l'aide des autres nations et des institutions multilatérales pour la reconstruction des zones affectées par l'insurrection de Boko Haram et pour la réhabilitation des personnes déplacées. "L'engagement sans précédent du G7 à soutenir le pays (le Nigeria) - dont les modalités doivent encore être mises au point - montrent que les dirigeants internationaux ont une grande confiance en M. Buhari", selon Malte Liewerscheidt, analyste Afrique chez Verisk Maplecroft. Boko Haram, qui signifie "l'éducation occidentale est un péché" en haoussa, la langue la plus parlée dans le nord du Nigeria, a néanmoins démontré que sa capacité de nuisance demeurait élevée: depuis l'investiture de M. Buhari le 29 mai, le groupe a multiplié les attaques dans le nord-est du pays, faisant au moins 109 victimes. L'ONU dénonce les abus commis par Boko Haram et par des militaires L'ONU a récemment dénoncé les violations commises à la fois par les rebelles du groupe armé Boko Haram et les militaires nigérians, appelant le nouveau président du Nigeria de traduire les coupables en justice. "Les civils dans le nord-est du Nigeria ont vécu des actes terribles de cruauté et de violence commis par Boko Haram", a déploré le Haut-commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme, Zeid Ra'ad Al Hussein. "Cela inclut des meurtres gratuits, des exécutions sommaires, des participations forcées à des opérations militaires, y compris l'emploi d'enfants pour faire exploser des bombes", a-t-il ajouté. Le diplomate a également rapporté des actes de violations flagrantes commis par les militaires nigérians, appelant le président nigérian Muhammadu Buhari "à prendre des mesures urgentes pour traduire en justice les auteurs de ces violations des droits humains, qu'ils soient ou non des fonctionnaires de l'Etat". Plusieurs ONG, dont Amnesty et Human Rights Watch, ont déjà fait état d'"exactions sommaires, de détentions arbitraires et de tortures en détention" de rebelles présumés au Nigeria.