Etre disposé à donner avec largesse est une qualité qui nécessite une attention certaine au désespoir d'autrui ainsi qu'un intérêt modéré pour les biens de ce bas monde. C'est là, une ancestrale spécificité des Annabis. Chaque année, les Annabis s'impliquent un peu plus dans un élan de solidarité ramadhanesque exceptionnel. Habitude ancestrale, cette pratique n'est pas étrangère aux descendants de Sidi Brahim Ben Taoumi. Venir en aide à autrui, est une habitude héritée avec fierté et perpétrée avec générosité dans cette ville aux 2500 ans. Une fois encore, le mois sacré s'inscrit dans une ambiance fraternelle, impliquant plusieurs acteurs, sensibles à la détresse de leur prochain. Un sentiment qui se traduit par les restaurants de la «Rahma», mais surtout grâce aux agissements du bon musulman sensible aux besoins de ses semblables, notamment en cette période de crise où l'austérité semble avoir eu raison même des ménages les plus aisés. Aussi, cet élan de solidarité est motivé par l'application de la parole du Prophète Mohamed (Qsssl): «Celui qui donne à manger aux jeûneurs bénéficiera de la même récompense que Dieu réserve aux jeûneurs...» Conformément à ce hadith, les Annabis ont développé une action qui ne se limite plus aux pouvoirs concernés par la prise en charge des nécessiteux, mais ont en fait une raison en soi-même pour s'impliquer dans le processus d'aide devenu au fil du temps, une tradition incontournable du mois sacré de Ramadhan. Cette année, la situation est tout autre, en effet, la spéculation sur les prix de tous produits de consommation n'a pas baissé d'un cran. Bien au contraire, les jeûneurs ont amorcé la deuxième quinzaine du mois de Ramadhan avec une mercuriale au summum. Situation très ressentie par les Annabis, à l'égard des démunis. Un sentiment qui s'est imprégné d'un fort élan de solidarité impliquant tous les concernés par l'aide sociale: la direction des affaires sociales (DAS), les associations caritatives, le Croissant-Rouge et la direction des affaires religieuses, mais surtout le mouvement estudiantin à Annaba l'Onea. Cette année le Ramadhan a vu le nombre des restaurants de la «Rahma» augmenter à 200 tables de f'tour installées dans différents quartiers de la ville d'Annaba et dans les autres villes de plusieurs communes de la wilaya. Des espaces réservés aux nécessiteux SDF et passagers. Les réfugiés syriens et les émigrants subsahariens comptent parmi les concernés par cet élan de solidarité, car à Annaba, la solidarité ne connaît pas de frontière, encore moins de couleur ou de religion. L'année écoulée, il avait été enregistré 20 espaces de solidarité, alors que cette année le nombre est de 200 restaurants de la «Rahma», depuis le premier jour du mois de Ramadhan, à Annaba, Berrahal, El Bouni et la nouvelle gare routière. Répondant aux normes d'hygiène et de propreté, ces restaurants de la «rahma» servent entre 200 et 1 500 repas, avec «chorba», deuxième plat, pain et eau minérale. Ces opérations de solidarité qui ne sont pas étrangères aux habitudes bônoises, sont l'oeuvre, outre les institutions officielles de l'Etat, de commerçants de la ville, opérateurs économiques et bienfaiteurs. Plusieurs d'entre eux contactés, ont refusé le donner une quelconque déclaration, se contentant par contre de dire, «je préfère étaler une table de 200 repas, et permettre aux nécessiteux de venir manger sain, au lieu de distribuer un soi-disant couffin de Ramadhan avec des produits avariés», nous dira plus d'un. En effet, c'est le cas de le dire à Annaba, d'ailleurs comme à travers plusieurs wilayas du pays où il a été fait état de la découverte de produits avariés et non propres à la consommation. Des produits dont les dates de péremption ont expiré, mais sont mises de côté pour être écoulées lors des commandes du couffin de Ramadhan. Des fournisseurs indélicats et responsables indifférents, tous deux sans aucune conscience, se targuent de préparer un minable couffin, aux inconsommables et réduits à moitié... C'est pourquoi on voit défiler, au moment du f'tour, une population démunie, en détresse, en rupture de la société, se rendre au resto de la «rahma», pour manger sain. Des repas, préparés par des cuisiniers et cuisinières qui se sont dévoués à cette oeuvre de charité, au détriment de leur vie de famille, notamment en ce mois sacré. Comme c'est le cas de l'initiative de l'Organisation nationale des étudiants algériens (Onea), qui, puisant dans son propre compte, offre chaque jour 200 repas aux passagers de la nouvelle gare routière de TCA/ Annaba ou à la rue Ibn Badis; El Qods pour ne citer que ces exemples, de solidarité avec les démunis et les défavorisés en ce mois de Ramadhan. Ainsi, la table de «rahma», c'est juste un petit soulagement le temps d'un mois. Un mois conçu pour la pitié et la piété, deux principes religieux ignorés par les uns, mais mis en valeur par la majorité des Annabis, conscients de l'importance de la charité vis-à-vis de son prochain, comme, édifié sur le Livre saint le Coran qui met en valeur, la disposition de tout un chacun à donner avec largesse et être sensible au désespoir des autres. Tels sont les principes d'une société soudée, que les Annabis entretiennent par vocation.