Alors qu'on évoque des restrictions budgétaires au sommet de l'Etat, le gouvernement a donné son aval pour la réalisation d'un projet sur une grande figure de l'histoire de l'Algérie: la vie du savant et «aâlamâ» Abdelhamid Ben Badis. Or, il y a problème: le projet est en train d'être réalisé sur deux terrains différents, sur le petit écran avec la réalisation d'un feuilleton et sur le grand écran avec un film cinéma. Ainsi, alors qu'un film cinéma est en train d'être tourné avec le grand réalisateur syrien Bassel El Khatib, un autre projet va commencer bientôt sous forme de feuilleton avec le réalisateur algérien Amar Mohsen. Bien sûr, il n'y a pas photo entre El Khatib et Mohsen, deux écoles totalement distancées par des années d'expérience et de création. Si le projet cinéma produit par le ministère de la Culture, à travers le Centre algérien de développement du cinéma Cadc, est bien avancé, le feuilleton produit par l'Entv qui commencera à la fin de ce mois de juillet, est en revanche en retard dans la préparation. Le comédien qui devrait jouer le rôle principal de Ben Badis n'a même pas encore été sélectionné, ce qui retarderait encore le début du tournage. Mais si on s'est intéressé à ce sujet, c'est essentiellement pour mettre l'accent sur la gabegie de l'Etat sur un sujet qui est déjà en cours de traitement et qui devrait encore engendrer des frais supplémentaires alors que le projet existe déjà et il est algérien. Depuis quelques années, il existe une absence totale de coopération ou de coproduction entre la télévision publique, l'entreprise audiovisuelle la plus sûre et la plus crédible et les entreprises cinématographiques dépendant du ministère de la Culture. Cette querelle des tranchées est surtout liée à une absence de politique de coopération entre les deux instances créatives en matière de culture. Cette concurrence entre le département cinéma et l'audiovisuel a déjà commencé dans les années 2000 quand HHC était alors ministre de la Communication et de la Culture et avait décidé de dissoudre les entreprises cinématographiques et récupérer les techniciens et le matériel de cinéma. Aujourd'hui le siège de l'Enpa (Entreprise de production audiovisuelle) qui alimentait les salles et la télévision en films, est devenu le siège de la production de l'Entv. Quand Khalida Toumi est arrivée au ministère de la Culture en 2002, elle a récupéré le cinéma et empêché la majorité des producteurs de faire des coproductions avec l'Entv. Les choses n'ont pas changé depuis, et le cinéma est resté au cinéma et la télévision à la télévision. Et pourtant, dans le monde d'aujourd'hui, la télévision demeure l'un des plus importants sauveurs du cinéma quand les films ne sont pas rentables. Canal+ a récupéré tous les navets du cinéma français et redonné du travail à tous les comédiens. Comme pour Benboulaïd, Bouamama, ou Fathma N'soumer des films cinéma ont été transformés en feuilleton au grand bonheur du téléspectateur qui n'a pas pu voir le film dans les salles de cinéma. Alors à quoi bon réaliser un feuilleton qui peut être raté, alors qu'un film de cinéma est presque prêt? [email protected]