Votée récemment à l'APN et soumise au vote hier soir au Sénat, après qu'elle eût été longuement discutée au Conseil de la nation, la nouvelle loi sur le cinéma a réalisé un parfait consensus. Sans surprise, cette loi dont certains professionnels y voient un mode " d'étouffement " et un retour à un Etat gestionnaire, est donc passée comme une lettre à la poste. Mais dans le sillage de ce nouveau texte, Khalida Toumi et c'est ça la nouveauté, est revenue au cours de son plaidoyer sur les bienfaits de cette loi, à une ancienne ambition : récupérer le laboratoire cinématographique relevant actuellement de la télévision algérienne après la dissolution de l'Entreprise nationale de production audiovisuelle (ENPA). Khalida Toumi avait appelé en présence des sénateurs, l'Entreprise algérienne de télévision (ENTV) à restituer un des plus grands laboratoires du secteur du cinéma dans les pays méditerranéens, ajoutant qu'il s'agissait d'un laboratoire de marque polonaise que l'Armée populaire nationale avait remis à l'ENPA. On se rappelle que vers les années 2000 alors que Hamraoui Habib Chawki était à la tête de l'ENTV, Khalida Toumi avait un grave différent avec le Dg de l'Unique par rapport à cette question. Les deux responsables ne s'étaient pas parlé durant des années car chacun voulait mettre sous sa responsabilité cet immense laboratoire situé à Bobillot et générant des enjeux énormes. Comme l'ENTV est une institution qui ne dépend pas du ministère de la Culture et que le Dg de cette institution est nommé par le président de la République lui-même, HHC avait alors fait intervenir de nombreux hauts responsables pour pas céder ne serait-ce qu'une cellule de montage à Khalida Toumi. Chacun de son côté avait mis une pression énorme et finalement, le laboratoire est demeuré une propriété de l'ENTV. Aujourd'hui à la faveur de cette nouvelle loi, Khalida Toumi revient à la charge et soumet sa demande aux membres du Sénat avec un argument de taille : "Depuis cette date la prise en charge de l'étape post-production des films se faisait à l'étranger et en devises. " En clair, l'Etat a tout à gagner s'il remettait les clefs de ce laboratoire au ministère de la Culture. Mais la télé qui manque de façon criarde de matériel sera absolument amputée d'un moyen de production efficace qui sert à la fois les feuilletons, les longs métrages ainsi que les émissions de télévision. La télévision qui n'aura d'ailleurs - si le sénat lui ôtait son laboratoire - plus aucun pouvoir sur la production cinématographique, sauf si peut être elle consent à financer de façon symbolique une œuvre. Une loi qui entrave les libertés ? Contre le scepticisme de ceux qui voient en cette loi une entrave à la liberté d'expression, Khalida Toumi s'en est défendue en affirmant que " ce projet n'entrave en rien les libertés individuelles et collectives et ne porte nullement atteinte à la liberté d'expression " a-t-elle expliqué, en indiquant que les dispositions prévues par ce projet définissent le cadre juridique devant régir les activités cinématographiques et les développer sur le plan économique. Des lois selon elle, qui répondent aux attentes des spécialistes et qui sont fignolées sur la base d'un constat détaillé de la situation du cinéma dans notre pays. Pour Khalida Toumi, ce texte est une correction des dysfonctionnements engendrés par la loi sur le cinéma de 1967 en ce sens qu'il vise à réhabiliter le cinéma algérien, développer les compétences nationales, encourager le professionnalisme et bannir les mauvaises pratiques. S'agissant de la production proprement dite, le projet prévoit un allègement des mesures procédurales liées à la production de films dans le cadre des conventions cinématographiques gouvernementales. Qu'est-ce que ça veut dire ? Eh bien, c'est là que certains doutent de la liberté d'expression puisque selon l'article 05 dont on a beaucoup parlé, une œuvre cinématographique sur la Révolution doit au préalable recevoir l'aval du Conseil des ministres avant de bénéficier des aides que l'Etat et à sa tête le président de la République leur a promis. Des aides, qui selon toujours cet article, seront puises dans les recettes publicitaires qui passeront selon la proposition de la ministre de 1 à 5%. " Il est inadmissible de produire des films glorifiant le colonialisme et le rôle des harkis " s'était insurgée Khalida Toumi au sénat en précisant que " l'histoire, notamment celle de la guerre de Libération est chose sacrée en Algérie.” Concernant l'article 19 dont on a beaucoup parlé et qui fait état de l'exploitation des salles de cinéma, le projet prévoit de soumettre leur gestion à des cahiers des charges conformément aux cadres réglementaires à même d'instituer les fonctions d'inspection et de contrôle des salles de cinéma. Autrement dit, les salles qui seront récupérées par les APC seront remises au ministère qui les donnera en gestion à des jeunes qu'il formera, et c'est à lui toujours que revient le pouvoir de donner le visa d'exploitation à toute projection en salle ; qu'elle soit algérienne ou étrangère. En un mot, la nouvelle loi sur le cinéma donne davantage de pouvoir au département culturel de Khalida Toumi.