«La liberté d'entreprise ne saurait aboutir à une liberté sauvage au détriment des consommateurs.» Aujourd'hui et demain, les citoyens seront privés de pain. Les fours seront éteints pendant deux jours. Le communiqué de l'Union générale des commerçants et artisans algériens (Ugcaa), diffusé hier, est catégorique. Il informe tous les boulangers et les citoyens que la grève de deux jours, les 26 et 27 février, dont le préavis a été adressé à toutes les autorités publiques centrales et locales, est maintenue. Dans le communiqué d'une rare concision, l'Ugcaa n'a pas pris le soin de mentionner ou d'appeler les professionnels à assurer un service minium lors de ces deux journées de débrayage. «En l'absence de tout dialogue et de contact affiché par les autorités publiques, la cellule de crise est chargée du suivi de la grève nationale». Cette phrase qui ouvre le document fait office de justificatif pour ce recours ultime des boulangers. Mais l'argument est irrecevable auprès de l'Association pour la protection de l'activité commerciale. Cette association, installée à Bab El-Oued qui fait de plus en plus parler d'elle ces derniers temps, se met de la partie. Elle appelle, dans un communiqué, les citoyens à «une manifestation pacifique et organisée devant le siège de l'Ugcaa». L'association a également indiqué que cette protestation «sera suivie d'une autre manifestation qui concernera les commerçants du marché des Trois-Horloges de Bab El-Oued aujourd'hui». Les organisateurs de ces deux actions précisent par ailleurs, qu'elles seront annulées «si les boulangers reviennent sur leur décision de grève». Voilà qui ajoute de l'eau dans le pétrin des boulangers qui soutiennent pourtant, que les pans du dialogue sont rompus. «Toutes les tentatives de dialogue et de négociation entamées depuis plus d'une année avec les autorités publiques pour obtenir nos droits légalement formulés, n'ont abouti à aucune solution juste», a déclaré, il y a deux semaines, le président du comité national des boulangers, Benabdeslam Medjdoub, qui a estimé que «la balle est dans le camp du gouvernement». Le gouvernement lui, réplique et brandit la force de la loi. Il a souligné dans un communiqué hier, que «la liberté d'entreprise ne saurait aboutir à une liberté sauvage au détriment des consommateurs», ajoutant que le gouvernement «n'hésitera pas à user de tous les mécanismes de contrôle que confère la loi aux pouvoirs publics pour préserver les intérêts des consommateurs». Le communiqué du gouvernement a, en outre, rappelé que l'Etat garantit la fourniture de la farine aux boulangers, sans hausse du prix de ce produit. «Le gouvernement tient à porter à la connaissance de l'opinion nationale en général, et de la profession des boulangers en particulier, que l'Etat a pris à sa charge la garantie de fourniture de la farine aux boulangers sans hausse du prix de ce produit». Tout en regrettant la position du comité national des boulangers pâtissiers qui a rendu public un préavis de grève, les services du chef de l'Exécutif ont insisté dans leur document sur le fait qu'«aucune grève ne changera sa position de refus d'augmentation du prix du pain, élément important dans la consommation des citoyens». Reçu par notre bureau régional hier à Tizi Ouzou, M. Grim Chabane, président de la Fédération des boulangers pour la wilaya, estime que «les artisans ne demandent que leur marge bénéficiaire, actuellement l'on ne se retrouve pas. Ceux des boulangers qui s'en sortent quelque peu sont ceux qui font appel à une main-d'oeuvre familiale». A propos du mouvement de grève, le président de la fédération dira: «La décision a été mûrement réfléchie et ce, à l'échelle nationale. Par cette action, nous ne cherchons qu'à ouvrir un dialogue avec les pouvoirs publics». Pour sa part, M.Aba de l'Ugca déclare que «cette grève est certes regrettable, mais la fédération se demande si les pouvoirs publics attendent pareille action pour enclencher sérieusement un dialogue ?». En somme, enchaîne M Grim, «il n'y a pas de grève heureuse, mais seulement des actions forcées. Cette grève est un appel au secours de la profession».