Luiz Inacio Lula da Silva, l'ex-président charismatique brésilien a été inculpé dans le scandale du géant Petrobras L'inculpation de Lula et le procès historique de Dilma Rousseff devraient mettre fin à 13 ans de gouvernements de gauche dans le géant pays d'Amérique latine. Au deuxième jour du procès en destitution de la présidente du Brésil Dilma Rousseff, son mentor politique Lula a été inculpé vendredi soir de corruption passive, tandis que l'ambiance était houleuse au Sénat entre défenseurs et partisans de la chef de l'Etat. La police fédérale a inculpé l'emblématique ex-président Luiz Inacio Lula da Silva (2003-2010) pour corruption passive et blanchiment d'argent, dans le cadre du scandale de corruption autour du géant pétrolier Petrobras. Dénonçant une inculpation «politique», ses avocats ont dit ne pas «accepter comme coïncidence le fait que celle-ci survienne en plein procès de destitution de la présidente (Rousseff) élue avec le soutien de Lula». Au Sénat, la deuxième session du procès s'est déroulée dans une ambiance électrique, avec un échange d'insultes entre sénateurs pro et anti-Dilma Rousseff qui ont failli en venir aux mains. «Je vais user de mon pouvoir de police pour exiger le respect mutuel», a menacé le président du Tribunal suprême fédéral (STF) Ricardo Lewandowski qui dirige les débats, avant de suspendre la séance à la mi-journée. Dans l'après-midi, les sénateurs ont entendu deux des six témoins en faveur de la dirigeante de gauche, l'économiste et conseiller de la présidente Luiz Gonzaga Belluzzo puis le professeur d'économie Geraldo Prato. Devaient ensuite s'exprimer, vendredi soir ou hier, deux anciens ministres de Mme Rousseff, Nelson Barbosa (Economie) et Luiz Costa (Education), et des experts en droit et en économie. «Cette session est une démonstration (du fait) que la bêtise est infinie», avait lancé dans la matinée le président du Sénat, Renan Calheiros (PMDB, centre droit), dénonçant un hémicycle transformé en «asile de fous». Il visait tout particulièrement la sénatrice Gleisi Hoffmann du Parti des travailleurs (PT) de Mme Rousseff qui avait qualifié le procès de «farce». La veille, elle avait déjà provoqué un tollé en demandant si, compte tenu de sa «morale», le Sénat pouvait juger Mme Rousseff, plus de la moitié de ses membres (59%), dont elle-même, étant soupçonnés de corruption ou visés par une enquête. L'issue du procès, attendue mardi ou mercredi, ne fait guère de doute, une nette tendance se dégageant en faveur de la destitution, qui requiert un vote des deux tiers des sénateurs, soit 54 sur 81. Dilma Rousseff, 68 ans, première femme élue à la tête du Brésil, ex-membre de la guérilla, emprisonnée et torturée sous la dictature militaire (1964-1985), n'assume déjà plus ses fonctions depuis le 12 mai, quand un vote de plus des deux tiers des sénateurs l'avait suspendue. Son «crime de responsabilité», selon ses détracteurs? Avoir maquillé les comptes publics pour camoufler un déficit trop important et signé des décrets engageant des dépenses imprévues sans l'accord préalable du Parlement, pratique à laquelle ses prédécesseurs ont tous eu recours. La présidente, qui a promis de se battre «avec la même force» que quand elle combattait la dictature militaire», dénonce un «coup d'Etat» institutionnel ourdi par le principal bénéficiaire de la manoeuvre: Michel Temer, 75 ans, son ancien vice-président devenu son rival. Tout aussi impopulaire qu'elle, l'homme fort du PMDB exerce déjà la présidence par intérim et restera aux manettes jusqu'aux prochaines élections présidentielle et législatives fin 2018 si elle est destituée. Dilma Rousseff, qui clame son innocence depuis des mois, se défendra en personne demain devant le Sénat. Selon les experts, elle s'adressera plus à la nation pour défendre son gouvernement et son image que pour convaincre les sénateurs qui se sont déjà fait leur idée. Lula l'accompagnera pour la soutenir, même si son image a été écornée par son inculpation dans le scandale Petrobras, une affaire qui éclabousse tout autant le PT que le parti de M.Temer et la majeure partie de l'élite politique brésilienne. Si Mme Rousseff a appelé ses partisans à «garder espoir», elle semble bien isolée, même dans son propre camp.