Le risque de mettre le feu aux poudres est devenu imminent Moins d'une semaine après sa visite en France où, de retour de l'Assemblée générale de l'ONU, il a été question d'une réunion organisée à la hâte avec l'Egypte voisine, le Qatar et les Emirats arabes unis, le Premier ministre libyen, Faïz Serraj est donc en Algérie. Accueilli par le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, le président du Conseil présidentiel du gouvernement d'entente nationale de Libye, Faïz Serraj, est en visite officielle de deux jours en Algérie où il aura une série d'entretiens qui auront lieu en présence du ministre des Affaires maghrébines, de l'Union africaine (UA) et de la Ligue arabe, Abdelkader Messahel, et du ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Noureddine Bedoui. Dès son arrivée, hier, il a salué le rôle de l'Algérie et son soutien constant à la Libye, affirmant que les relations entre les deux pays sont «étroites». Cette visite dans «son deuxième pays» intervient à l'invitation du Premier ministre Abdelmalek Sellal, et s'inscrit dans la tradition de «concertation»sur la situation dans son pays, avec le souhait qu'elle aboutira à des résultats «positifs».»Nous souhaitons prospérité, paix et sécurité aux deux pays», a-t-il conclu. Les discussions vont porter sur les derniers développements de la scène libyenne et les efforts en cours pour un règlement politique de la crise. Et cette visite permettra aussi de réaffirmer la position de l'Algérie en faveur d'un processus de paix et d'une solution politique fondée sur le dialogue inclusif et la réconciliation nationale, dans le cadre du respect de la souveraineté du pays, c'est-à-dire loin de toute ingérence étrangère. Moins d'une semaine après sa visite en France où, de retour de l'Assemblée générale de l'ONU, il a été question d'une réunion diplomatique organisée à la hâte avec comme invités, a-t-on affirmé, «les principaux acteurs régionaux impliqués dans la crise», tels que l'Egypte voisine, le Qatar et les Emirats arabes unis, le Premier ministre libyen, Faïz Serraj est donc venu à Alger, pour une visite officielle de deux jours durant laquelle il exposera les éléments du dossier à la lumière de la situation qui prévaut aujourd'hui dans son pays. Une situation dont tout indique qu'elle se caractérise par un blocage face auquel les «principaux acteurs réunis à Paris» n'ont qu'une marge d'intervention toute relative, à l'heure où de durs combats opposent encore à Syrte les brigades fidèles au gouvernement d'union nationale aux derniers combattants de Daesh dans cette ville et où le bras de fer entre ces mêmes brigades de Misrata et l'armée du maréchal Haftar conduit à une véritable impasse la démarche onusienne de réconciliation générale et de rétablissement de la paix. Serraj est donc venu à Alger pour exposer les paramètres d'ensemble et recueillir l'analyse, toujours pragmatique et avisée, des responsables algériens dont le souci majeur demeure une solution inclusive et souveraine dans l'intérêt du seul peuple frère libyen. Il faut dire que la situation s'est considérablement dégradée au cours des derniers mois, avec une économie effondrée, le dinar libyen ayant chuté de moitié en l'espace de huit mois, les pénuries généralisées, dont celle des carburants alors même que la Libye est un pays producteur de pétrole mais démuni en raffineries, l'alimentation électrique dramatiquement cisaillée quotidiennement...Difficile dans ces conditions de parler de stabilisation pour un pays qui fait face à une menace, sans doute virtuelle, mais dont on ne sait à quel moment elle peut devenir réelle, de partition entre l'ouest du pays aux mains des milices de Misrata et l'est contrôlé par l'armée du maréchal Haftar et le Parlement de Tobrouk. Ces derniers restant sourds aux appels à l'union et à la concertation maintes fois tentés par Faïz Serraj. A Syrte, devenu un vaste champ de bataille, déserté par la majorité des habitants, les Misratis affichent grâce à une organisation et une efficacité exemplaires une progression lente, mais résolue. 80 combattants de Daesh ont été tués, voici à peine quarante-huit heures, et la dizaine de victimes en leur sein est due à des snipers ou à des véhicules piégés. Leur seul problème est qu'ils sont confrontés à des desperados qui n'ont d'autre choix que la mort, toutes les voies de repli leur ayant été coupées. Mais, comme semblent le croire certains pays occidentaux présents à Syrte et...à Benghazi, il n'y a pas que l'Etat islamique en Libye. Les groupes extrémistes de Derna et de l'Est en général, les éléments d'Aqmi (Al Qaïda au Maghreb) dans le Sud, les multiples ramifications grâce aux liens tribaux et familiaux sont également des bombes à retardement dont il faut tenir compte. Le gouvernement Serraj fait contre mauvaise fortune bon coeur, face à la duplicité de certaines capitales occidentales, critiquées à juste titre par Abdelkader Messahel, lors de la dernière visite du représentant onusien Martin Kobler. Leur jeu ambigu a des impacts désas-treux sur la mécanique de la réconciliation engagée par l'accord de décembre 2015. Il a permis au maréchal Haftar de prendre en otage l'atout économique que constituent les champs pétroliers sans lesquels il sera difficile, voire impossible, au gouvernement Serraj de mener à bien sa mission. Et toutes les propositions de dialogue se heurtent à l'intransigeance de Haftar et du Parlement de Tobrouk, au point que les milices de Misrata, qui contrôlent l'aéroport de Tripoli sous l'autorité du salafiste Abderaouf Kara, agitent désormais le discours du double jeu français entre autres. A Paris, la conférence impromptue avec les «principaux pays acteurs» a pu servir de recadrage en laissant entrevoir un soutien de la France au gouvernement d'union nationale conduit par Faïz Serraj. Ce serait un minimum dans une conjoncture où le risque de mettre le feu aux poudres est devenu imminent. Le fait que Haftar s'empare des champs pétroliers, «abandonnés» par ses alliés de la ville de Zintan, au moment où Zoulous et Touareg se réconcilient et où surtout une délégation de Misrata se rend secrètement en Cyrénaïque pour lui proposer un compromis, est révélateur des ambitions du maréchal. Plus que le poste de ministre de la Défense, Khalifa Haftar rêve d'un scénario à la turque où il ne relèverait d'aucun gouvernement civil et serait le seul arbitre du devenir de la Libye. Autant dire que le double défi de la paix et de la réconciliation nécessite, dans de telles conditions, une diplomatie affûtée, au savoir-faire maintes fois éprouvé et seule en mesure de (ré)concilier les inconciliables. Suivi de la situation en Libye Une réunion fin octobre Le ministre des Affaires maghrébines, de l'Union africaine (UA) et de la Ligue arabe, Abdelkader Messahel, a annoncé à Alger la tenue fin octobre d'une réunion du Comité des cinq avec les pays du voisinage, à l'initiative de l'Union africaine (UA) dans le cadre du suivi de la situation en Libye. Cette annonce a été faite lors d'une conférence de presse coanimée par M.Messahel et le chef de la diplomatie libyenne, Mohamed Tahar Siyala qui accompagne le président du Conseil présidentiel du gouvernement d'union nationale de Libye, Faïz Serradj. M. Messahel n'a toutefois pas précisé le lieu de cette rencontre.