La France a tenté un forcing diplomatique qui s'est avéré un coup d'épée dans l'eau M. Ayrault s'est contenté pour l'occasion, du menu fretin en raison de l'absence des principaux décideurs libyens et de la défection de plusieurs ministres dont celui de l'Egypte. En se frottant au chaudron libyen, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault s'est fait brûler les ailes. La rencontre internationale qu'il devait organiser avant-hier à Paris, sur la Libye s'est transformée en un simple atelier qui n'a pas pu rassembler grand-monde. Le président du Conseil présidentiel du gouvernement d'entente nationale de Libye, Faïz Serradj, son ministre des Affaires étrangères, Mohamed Tahar Siyala ainsi que son ministre de l'Intérieur, Aref el-Khoja ont boudé Paris. Ils ont préféré Alger où se trouvait, en réalité, le vrai plat de résistance. M.Ayrault s'est contenté donc, pour l'occasion, du menu fretin en raison de l'absence des principaux décideurs libyens et de la défection de plusieurs ministres dont celui de l'Egypte. Préparée dans une stricte discrétion sous la tutelle du Quai d'Orsay, la rencontre devait rassembler les sponsors de la guerre dans l'unique but de consacrer le général Haftar, roi de Libye même si l'objectif avoué était de trouver une solution à l'impasse politique dans laquelle est plongée ce pays. La France a tenté un forcing diplomatique pour favoriser un consensus sur la formation d'un gouvernement plus inclusif, faisant notamment toute la place à Haftar et à ses hommes. Ce dernier veut garder le commandement de l'armée (Etat-major plus MDN) et le ministère de l'Intérieur, ce que lui conteste vigoureusement le groupe de Tripoli. Pris de cours, le Quai d'Orsay devait faire vite car les prétendants au Pérou «libyen» étaient nombreux. La compétition est féroce entre l'Italie et la France pour truster les ressources pétrolières. L'Egypte estimant que l'Est libyen tombe dans la zone naturelle de son influence et des impératifs de sa sécurité nationale, y rajoute du sien pour compliquer davantage l'équation. Une démarche qui témoigne aussi de l'absence de grille d'analyse et d'un manque flagrant de stratégies et modes d'action. Un camouflet? C'est peu dire pour Jean-Marc Ayrault qui, pensant miser sur un vrai joker, s'est retrouvé avec le garçon d'écurie. S'aventurant dans le marécage libyen, la France Afrique s'est enlisée. Hier, à Alger le ministre libyen des Affaires étrangères, Mohamed Tahar Siala a planté le décor en donnant la réplique au conclave de Paris qui s'est insurgé contre «les ingérences étrangères affichées ou masquées qui entravent la réconciliation nationale en Libye». Théâtre de violences, la Libye est morcelée entre une multitude de pouvoirs locaux. Le désordre qui a suivi la chute d'El Gueddafi a amené les Libyens à se replier «sur leur identité primaire, le village, la tribu». Le retour du général Khalifa Haftar, cet ancien officier d'El Gueddafi qui avait fait défection en 1983 pour s'installer aux Etats-Unis, a catalysé ces fractures. Inspiré par le coup de force du maréchal Abdel Fattah Al-Sissi en Egypte, le général lance une opération baptisée «Dignité» (Al-Karama), avec pour objectif affiché d'«éradiquer les islamistes». Appuyé par la France, le général a placé la barre très haut en prétendant aux plus hautes fonctions du pays. Ce faisant, il aggrave les fractures qui divisent les Libyens. Le mini-conseil ministériel Libyen hier à Alger a été un message fort pour signifier que les clés de la solution à la crise libyenne sont d'abord en Algérie. Pays frontalier de la Libye, îlot de stabilité dans la région, opposée à toute intervention étrangère dans les affaires internes des pays tierces, l'Algérie a déjà ouvert les canaux du dialogue avec les chefs de partis politiques et les différentes factions libyennes en mars 2015. Elle n'a aucun dessein ni visée politique dans ce conflit, sinon celui de stabiliser ses frontières en vue d'asseoir une sécurité stratégique. La menace s'est amplifiée depuis la dislocation de l'Etat libyen. Ce pays est devenu une base de repli pour les djihadistes de Daesh. L'Algérie partage 982 kilomè-tres de frontières avec la Libye et autant d'inquiétudes. Comme pour la crise malienne, le règlement du conflit libyen participera à la stabilisation de l'un des foyers de tension les plus dangereux qui menacent aussi bien l'Afrique du Nord que l'Europe. Pour les observateurs, la reprise des négociations à Alger entre les différentes factions libyennes n'est pas écartée. Surtout que les mêmes pays qui se réunissent à Paris sont déjà empêtrés dans la crise syrienne. Est-il possible de jouer au pompier quand on est pyromane? La plupart d'entre ces pays qui tiennent conclave à Paris, sont en partie responsables du chaos libyen. L'heure est à la désillusion et à l'inquiétude. Il n'est pas possible d'entamer une réconciliation en excluant la mission onusienne, en ignorant les principaux voisins de la Libye et en écartant la Ligue arabe. Serradj reçu par le président Bouteflika Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, a reçu hier, à Alger le président du Conseil présidentiel du gouvernement d'entente nationale de Libye, Faïz Serradj, qui effectue une visite officielle en Algérie.L'audience s'est déroulée en présence du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, du ministre d'Etat, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Ramtane Lamamra, du ministre des Affaires maghrébines, de l'Union africaine et de la Ligue arabe Abdelkader Messahel, du ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Nouredine Bedoui, et du vice-ministre de la Défense nationale, chef d'état-major de l'Armée nationale populaire, le général de corps d'armée, Ahmed Gaïd Salah.