La visite à Alger de Driss Jettou et la réouverture des frontières entre les deux pays auraient été au centre des débats. Finalement, la diplomatie algérienne, qui a n'a guère «chômé» durant ces dernières semaines, a réussi la gageure d'amener les plus hautes autorités marocaines vers d'amicales rencontres, prélude à la normalisation des relations entre les deux pays, sans que la question sahraouie, relevant du ressort exclusif des Nations unies soit évoquée, de quelque manière que ce soit. Ainsi donc, et après une rencontre préliminaire qui a eu lieu mardi passé entre le président Bouteflika et le roi Mohammed VI, les deux hommes ont définitivement franchi le pas vers le réchauffement effectif des relations entre Alger et Rabat lors d'une seconde entrevue, attendue par tous, intervenue ce jeudi à la résidence présidentielle de Zéralda. La rencontre, comme le confirment des sources diplomatiques, a duré deux bonnes heures, ce qui donne la pleine mesure de l'importance des sujets abordés, mais aussi des résultats certains auxquels seraient parvenus ces deux responsables. La meilleure preuve, estime-t-on, serait le fait que les cinq chefs de la diplomatie des pays membres de l'UMA (Union du Maghreb Arabe), ont eux aussi réussi à tenir une très importante rencontre ce mercredi matin en marge du sommet d'Alger, dans le but de relancer le processus d'édification de ce regroupement et de tenter d'en programmer le sommet pour avant la fin de l'année en cours. Des informations recoupées, mais non encore confirmées, dont nous avions fait état lors d'une précédente édition, indiquaient que ce sommet a toutes les chances de se tenir en Libye au mois de juin prochain. Si une pareille démarche paraissait impensable il y a de cela juste quelques semaines, elle est devenue tout à fait logique et envisageable depuis que les données économiques, sociales, géostratégiques et diplomatiques ont foncièrement changé en faveur de notre pays, contribuant un peu plus à isoler un Maroc en butte à de trop nombreux problèmes et ne trouvant guère d'autres voies de salut, désormais, que dans le retour de ce Royaume vers sa famille naturelle avec toutes les potentialités qu'il pourrait en tirer, notamment dans les domaines de la coopération en matière de lutte antiterroriste, contre le crime organisé, le trafic de drogue et l'immigration clandestine, mais aussi et surtout la remise sur rails de son économie, littéralement étouffée pour de nombreuses raisons, maintes fois soulevées par les organismes financiers internationaux. Selon des indiscrétions que nous avons pu récolter, il aurait été question, lors de la rencontre de ce jeudi, de la relance d'un processus entamé l'année passée avant d'être interrompu à la suite de nouvelles et inexplicables réticences marocaines. A la suite de la visite au Maroc du ministre algérien des Affaires étrangères, en effet, il avait été annoncé la venue à Alger du Premier ministre chérifien, Driss Jettou. Celui-ci, apprend-on, aurait finalisé avec son homologue algérien, Ahmed Ouyahia, les modalités d'une visite de deux jours à Alger avant la fin de ce semestre. Il y sera question des sujets déjà abordés ce jeudi par Bouteflika et Mohammed VI, à savoir, la réouverture des frontières entre les deux pays. Il s'agit là d'une demande pressante formulée par les plus hautes autorités marocaines, qui perdent, apprend-on, la bagatelle d'un milliard de dollars chaque année à cause de la chute drastique du flux des touristes et commerçants algériens qui prisaient particulièrement la destination marocaine, avant l'attentat terroriste de 1994 et la polémique absolument «inacceptable» et «irrecevable» qui en avait résulté, comme le soulignent nos sources. L'Algérie, qui se trouve donc en position de force, a même réussi à écarter, nous apprennent encore nos sources, la question sahraouie lors de la rencontre de ce mardi qui avait regroupé le Premier ministre espagnol, Jose-Luis Zapatero, et les chefs de la diplomatie algérienne, marocaine et française, respectivement Abdelaziz Belkhadem, Mohamed Benaïssa et Michel Barnier. Il a uniquement été question, lors de cette rencontre, au demeurant souhaitée par tous, du processus de Barcelone dans un cadre global de concertation et de coopération mutuelle entre les deux rives nord et sud de la Méditerranée. Signe évident du dégel en train de se cristalliser entre Alger et Rabat, devenu nécessaire pour Rabat, selon les avis exprimés hier par un grand nombre de journaux marocains, jadis prompts à fustiger notre pays, le message adressé jeudi par Mohammed VI à Bouteflika ne laisse guère planer de doute sur les intentions nouvelles du Makhzen. Une fois évacués les remerciements d'usage, en effet, le souverain marocain «saisit cette occasion pour (...) renouveler (son) profond sentiment de fierté pour les liens solides de fraternité qui unissent nos deux peuples, priant Dieu de nous aider à réaliser leurs aspirations à un meilleur avenir porteur de complémentarité et d´intégration dans le cadre d´une union arabe forte qui constituerait le pilier pour l´unité des peuples arabes et un regroupement de poids tant au sein de son environnement euro-méditerannéen et africain qu´au niveau international».