Tant que le terrorisme continuera de sévir, il ne sera procédé à aucune mesure menaçant la vie des citoyens. La levée de l'état d'urgence en Algérie ne cesse, ces derniers temps, d'être au centre des discussions aussi bien dans les salons que dans les médias privés. Décrété le 9 février 1992 par le Haut Comité d'Etat, longtemps décrié par plusieurs acteurs politique et de la société civile, l'état d'urgence n'est pas près de connaître son épilogue selon les observateurs. La levée de l'état d'urgence fait l'objet, depuis l'élection présidentielle du 8 avril 2004, d'une dénonciation tous azimuts par les politiques et les associations de tout bord au point que certains courants politiques, aussi bien de l'opposition que de l'Alliance présidentielle, notamment le Mouvement de la société pour la paix (MSP) tentent d'en faire leur cheval de bataille. Les mêmes observateurs avancent en outre que la levée de l'état d'urgence ne se fera pas avant le référendum sur l'amnistie générale et même après, il n'est pas sûr que sa levée soit retenue. L'exemple de l'Egypte est plus qu'éloquent. Un pays où l'état d'urgence décrété au lendemain de l'assassinat du président Anouar Sadat, n'a pas empêché les investisseurs étrangers de venir en masse. Ce qui contredit directement les allégations de Bouguerra Soltani qui soutenait que «la levée de l'état d'urgence est un préalable qui permettra une véritable relance économique». Ainsi les dernières demandes formulées par une partie de la classe politique et les différentes ligues des droits de l'homme, n'ont pas eu l'écho escompté auprès des pouvoirs publics. Et ne risquent pas de l'avoir de sitôt. Ce refus de procéder à la levée de l'état d'urgence est justifié, selon les mêmes observateurs, par la précarité de la situation sécuritaire qui prévaut encore dans le pays, même si les pouvoirs publics tentent de minimiser la capacité de nuisance de la horde sauvage. Le dernier massacre perpétué à Larbaâ, à l'est d'Alger, et ayant fait une vingtaine de morts, est un autre argument pour le maintien de l'état d'urgence. Certains, à l'image de la Ligue algérienne des droits de l'homme, estiment que l'état d'urgence est restrictif au moment où l'Algérie a réussi le pari d'organiser plusieurs scrutins dont le dernier a plébiscité Abdelaziz Bouteflika à la magistrature suprême. On peut de ce fait se demander quel est l'intérêt d'un tel déchaînement. Après tout, si tous les acteurs de la scène politique sont d'accord pour dire que cet état de fait ne dérange nullement leurs activités, pourquoi alors ne pas passer à autre chose de positif. Eh bien, la réponse est toute simple ; il est évident que certains partis, à l'instar du MSP, tentent de faire de cette question un fonds de commerce pour ne pas dire carrément une arme de chantage. Mais il est clair pour ceux qui la prônent que cette idée est la meilleure arme pour s'imposer dans une société ayant rejeté en bloc leur thèse et c'est cette évidence que l'on essaye de camoufler. Mais il est difficile pour les adeptes de la levée de l'état d'urgence d'être convaincant. Car la plupart des citoyens voient les évidences et les évidences parlent d'elles-mêmes. Fidèle à son entrisme, le MSP veut coûte que coûte faire de cette question son cheval de bataille pour s'imposer au sein de l'Alliance présidentielle. Pour étayer ses propos, Bouguerra Soltani, président du MSP, a toujours remis en cause les arguments de Nouredine Yazid Zerhouni, ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales quand il affirmait que «l'état d'urgence ne gêne nullement l'activité politique et tant que le terrorisme continue de nuire, l'état d'urgence ne sera pas levé». D'ailleurs, lors de son discours devant les cadres de l'Etat, M.Abdelaziz Bouteflika a clairement affiché son intention de mettre en oeuvre la réconciliation nationale et d'en faire plus qu'un slogan, une réelle démarche associant l'ensemble de la société. «Il faut que l'Algérien arrive à se réconcilier avec lui-même, puis avec ses institutions», a-t-il martelé, annonçant, pour sa part, une détermination à «ne ménager aucun effort pour hâter la consolidation pleine et entière de la sécurité et de la paix civile». Mais, a souligné le chef de l'Etat, cela se fera en parallèle du «renforcement de la lutte contre le terrorisme». Il a relevé que c'est le peuple algérien qui donnera corps à cet idéal laissant ainsi entendre que tant que le terrorisme continuera de sévir, l'idée, même précaire, de levée de l'état d'urgence ne doit pas effleuré l'esprit. Dans le même sillage, le chef de l'Etat avait déclaré, lors de la conférence nationale sur la réforme de la justice, que le «référendum sur l'amnistie générale aura lieu quand le peuple se sentira prêt et une fois les blessures guéries». Et c'est à ce moment, peut-être, et seulement à ce moment, qu'il sera procédé à la levée de l'état d'urgence mais pas avant.