Un casus belli pour les Palestiniens, un sujet secondaire pour Israël: le transfert de l'ambassade des Etats-Unis à Jérusalem pourrait être remis aux calendes grecques par le président Trump, qui en avait pourtant fait une promesse de campagne. Juste avant de recevoir le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu mercredi à la Maison-Blanche, Donald Trump avait déjà semblé reculer: vendredi, il affirmait au quotidien israélien Israel Hayom qu'il réfléchissait «très sérieusement» à déplacer la chancellerie américaine de Tel-Aviv à Jérusalem, mais que cette décision, «pas facile», n'était pas encore prise. Rompant avec la position historique des Etats-Unis, le candidat Trump avait pourtant promis de reconnaître Jérusalem comme capitale d'Israël et d'y installer l'ambassade, au grand dam des Palestiniens et de la majeure partie de la communauté internationale. Elu, le 45e président des Etats-Unis avait enfoncé le clou en nommant en décembre comme prochain ambassadeur en Israël un avocat américain juif, David Friedman, partisan de la colonisation et de l'annexion par Israël de parties de la Cisjordanie occupée. M. Friedman, honni par des associations d'Américains juifs et qui doit être auditionné jeudi par le Sénat en vue d'être éventuellement confirmé à son poste, avait proclamé sa «hâte de travailler depuis l'ambassade américaine dans la capitale éternelle d'Israël, Jérusalem». L'Etat hébreu considère l'ensemble de Jérusalem, y compris la partie orientale conquise et annexée en 1967, comme sa capitale indivisible. Quelque 200 000 Israéliens se sont installés dans des quartiers de colonisation à Jérusalem-Est. Les Palestiniens, qui représentent environ un tiers de la population de la ville, veulent quant à eux faire de Jérusalem-Est la capitale de l'Etat auquel ils aspirent. Officiellement, Benjamin Netanyahu continue d'affirmer que Jérusalem «réunifiée», c'est-à-dire comprenant Jérusalem-Est annexée, est la «capitale éternelle d'Israël». «L'ambassade des Etats-Unis doit se trouver ici à Jérusalem» et non à Tel-Aviv, avait-il martelé fin janvier. Mais officieusement, le transfert de l'ambassade ne semble pas être la priorité des priorités du Premier ministre israélien. Experts et commentateurs en Israël et aux Etats-Unis pensent plutôt qu'un feu vert, même tacite, du nouveau président américain à la poursuite de la colonisation en Cisjordanie est bien plus important dans l'immédiat. D'après le New York Times de lundi, M. Trump a d'ores et déjà reculé sur l'ambassade, M. Netanyahu ayant fait savoir qu'une décision aussi lourde en symboles - avec la réaction qu'elle provoquerait chez les Palestiniens et dans les pays arabes - n'était pas la priorité numéro un. L'Organisation de libération de la Palestine (OLP) a en effet menacé la semaine dernière de «révoquer la reconnaissance de l'Etat d'Israël le jour même» de l'éventuel transfert de la chancellerie. Et avant de quitter la tête de la diplomatie américaine fin janvier, John Kerry avait prévenu d'un risque d'»explosion absolue» au Proche-Orient. De fait, reconnaît Jonathan Schanzer, vice-président du centre de recherche conservateur Foundation for Defense of Democracies, si «les Israéliens sont évidemment favorables» à une ambassade américaine à Jérusalem, «ils veulent avancer lentement» afin de privilégier leur «premier objectif, le soutien des Etats-Unis à la sécurité» de l'Etat hébreu. Son collègue Robert Satloff, analyste au Washington Institute for Near East Policy et partisan du déplacement de l'ambassade, pense également que Donald Trump temporise.