Marine le Pen se présente comme favorite à la présidentielle française Les exigences de l'équilibre sont toujours de rigueur dans la nature. En ce que nous faisons, nous humains, elles le sont beaucoup moins cependant. La politique française avance, depuis longtemps, sur deux pattes: la droite et la gauche. Mais elle traine, depuis aussi longtemps, une troisième patte, celle d'un mouvement de droite extrême ou d'extrême droite comme on l'appelle plus souvent. Du coup, cette troisième patte n'a jamais cessé de poser problème et - et c'est là le déséquilibre - la politique française dandine tantôt, balance tantôt, tombe parfois, se relève parfois, mais elle n'arrive plus à marcher droit comme cela devrait être le cas. Depuis quelques années cependant, cette droite extrême a grandi. Elle a poussé racine non seulement dans le sol de la politique française, mais aussi dans l'imaginaire de beaucoup de Français. La droite extrême a pris beaucoup de poids ces derniers temps en France. Elle s'est nourrie de la crise économique qui sévit depuis des années. Elle a pris son envol sur le taux de chômage élevé qui n'a que trop duré dans ce pays. Elle a profité du malaise des Français, de leur inquiétude et de tous les autres ingrédients tant internes qu'externes. Aussi, la présidente du FN se fait-elle plaisir à brandir, plus haut désormais, les revendications qui ont toujours été les siennes et celles de son parti, à savoir le départ des immigrés, la sortie de l'Europe, le protectionnisme économique et toutes ces saletés dont d'autres, qui lui servent de modèle, affublent le monde déjà avant elle ces jours-ci. Les immigrés doivent être reconduits à la frontière. Ainsi ils cesseront de causer le chômage des Français. Ils n'auront plus à corrompre cette «race française». L'Europe devra s'effacer devant la souveraineté nationale et la préférence sera donnée au «made in France». Cela nous rappelle bizarrement un certain discours venu de l'autre côté de l'Atlantique. Comme quoi, partout où ils sont, les populistes sont les mêmes et peu importe l'époque historique dans laquelle ils se trouvent, ils ne changent pas d'un cheveu. Ils traînent les mêmes slogans vides depuis très longtemps, comme s'ils étaient incapables de les oublier. Ils n'intègrent rien de nouveau dans leur vision du monde, comme s'ils étaient incapables d'apprendre non plus. Les populistes n'ont aucune capacité à innover. Elle se nourrit de ses propres fantasmes et s'élève au-dessus de ses propres illusions. Malgré cela, et pour une fois en France, non seulement la crainte est réelle de voir Le Pen se faire élire présidente en 2017, mais ses chances sur le terrain sont très grandes. En face, il y a un Fillon qui traîne ses casseroles si bruyantes que tout le monde, à commencer par certains de ses amis, veut s'en éloigner. Il y a aussi une gauche amoindrie par un quinquennat des plus faibles de la Ve République et éclatée entre un Hamon incapable de vaincre avec ses 15% d'intention de vote et un Mélenchon qui peine à décoller de son 11%. Une gauche qui parle de plusieurs voix, voire dans plusieurs langues puisqu'un transfuge de cette gauche, Emmanuel Macron, a préféré se positionner «et à gauche et à droite», entre deux chaises en quelque sorte ou, c'est selon, une position «fourre-tout» dans laquelle tout le monde pourra se retrouver. Des mécontents de la gauche à ceux de la droite et même ceux qui pourraient venir d'ailleurs. Face à tout ce beau monde, Marine Le Pen est presque sereine. Elle est presque sûre de remporter le premier tour de la présidentielle d'avril 2017. La concernée vise toutefois le second tour, non pas qu'elle aurait peur de perdre face à son adversaire du jour car, qui soit-il, elle serait capable de le surclasser, mais parce qu'elle sait qu'un barrage pourrait être éventuellement levé contre elle alors. L'avenir des Français dépend de leur capacité à réagir face au danger Le Pen. Le tout est de savoir s'ils seraient capables de résister à la tentation de punir, de sanctionner leurs politiques qui, depuis longtemps, n'ont fait que leur mentir. Cette élite politique qui se renouvelle dans les promesses non tenues et ces hommes qui ont vieilli là-haut sans jamais penser se retirer.