Le coup d'envoi du Brexit est imminent: les députés britanniques réexaminaient hier le projet de loi historique autorisant la Première ministre Theresa May à activer la sortie de l'UE et en cas d'adoption rapide, le divorce pourrait intervenir dès aujourd'hui. Approuvé en première lecture par les députés début février et amendé depuis par les Lords, le texte, sauf examen prolongé à la Chambre des Communes, pourrait être adopté définitivement par les deux chambres du Parlement dès hier soir. Le ministre du Brexit, David Davis, a ainsi exhorté dimanche les députés à ne pas «lier les mains» de Theresa May avant l'entame des négociations devant marquer la fin de plus de quarante ans d'une relation tourmentée, les invitant à rejeter les deux amendements déposés par les Lords. Les membres de la chambre haute du Parlement réclament la protection des droits des trois millions d'Européens vivant au Royaume-Uni et souhaitent que le Parlement ait le dernier mot sur l'accord final avec Bruxelles. Mais il est fort probable que les députés s'opposent à ces amendements. Theresa May, qui surfe sur une vague de popularité, s'est engagée à activer avant fin mars l'article 50 du Traité de Lisbonne, qui lancera le compte à rebours des deux années de négociations, suite au référendum du 23 juin ayant décidé le Brexit. «Nos partenaires européens m'ont fait clairement comprendre qu'ils voulaient aller de l'avant avec les négociations, et moi également», a-t-elle dit jeudi à Bruxelles. Les dirigeants des 27 autres Etats membres pourraient dès lors se réunir le 6 avril pour un sommet visant à définir des «lignes directrices» des négociations à venir. Les Européens chercheront à faire corps, face à des Britanniques susceptibles d'exploiter les divisions au sein du bloc. Parmi les sujets brûlants figurera notamment la facture de la sortie de l'UE: Bruxelles pourrait exiger des Britanniques jusqu'à 60 milliards d'euros, selon plusieurs sources européennes, un montant correspondant aux engagements déjà pris par Londres en termes de contribution au budget européen. Le sort des Européens installés outre-Manche devra aussi être tranché: Theresa May refuse pour l'heure de garantir leurs droits avant d'avoir obtenu des assurances similaires pour le 1,2 million de Britanniques vivant dans l'UE. Les négociations sont censées durer deux ans, mais la tâche sera titanesque pour venir à bout du «divorce le plus complexe de l'histoire», selon l'ancien ministre conservateur William Hague. Londres et Bruxelles devront se défaire de plus de quatre décennies de relation commune, au moment même où l'UE célébrera le 60e anniversaire du Traité de Rome, censé marquer une nouvelle étape dans la construction européenne. L'hypothèse d'un échec des négociations entre Londres et Bruxelles n'est d'ailleurs pas exclue. «Nous nous préparons à toutes les issues possibles», a affirmé dimanche le ministre du Brexit David Davis. Et Theresa May a, elle, prévenu qu'elle préférait «pas d'accord» à un «mauvais accord» avec Bruxelles. Le déclenchement du Brexit menace aussi l'unité du royaume, avec le spectre d'un nouveau référendum d'indépendance en Ecosse, qui a majoritairement voté pour rester dans l'UE, après celui de 2014. Nicola Sturgeon, Première ministre écossaise et chef des indépendantistes du SNP, devait faire une déclaration en fin de matinée hier à ce propos. Mme Sturgeon, qui réunira ses troupes vendredi et samedi à Aberdeen pour le congrès du Parti national écossais, fait valoir qu'une sortie de l'UE justifierait une nouvelle consultation et a jugé «logique», jeudi sur la BBC qu'elle se tienne à l'automne 2018. S'il n'est pas encore majoritaire, le soutien à l'indépendance semble avoir progressé ces derniers mois et selon un sondage BMG publié hier, 48% des Ecossais y sont aujourd'hui favorables.