Onze postulants pour un siège, tentaient, hier soir, de convaincre l'électorat hexagonal, qu'ils sont «l'homme» ou la «femme» de la situation «Petits» candidats et grands favoris à la présidentielle française s'affrontaient hier soir lors d'un débat télévisé à moins de trois semaines du scrutin, pour tenter de convaincre les bataillons d'électeurs encore indécis et conjurer la menace d'une abstention record. Exercice inédit avant un premier tour d'élection présidentielle, prévu le 23 avril, les onze prétendants sont conviés sur un même plateau pour exposer leur projet, dans une campagne vérolée par les affaires, riche en coups de théâtre et scrutée à l'étranger, alors que l'extrême droite est donnée qualifiée au second tour programmé le 7 mai. Les cinq principaux candidats avaient déjà âprement débattu le 20 mars, devant plus de 10 millions de téléspectateurs. Juste avant le premier tour, un autre débat réunissant tous les candidats est pour le moment envisagé mais plusieurs d'entre eux ont exprimé des réserves sur leur participation. Au coude à coude dans les sondages avec environ 26% chacun, Marine Le Pen, présidente du Front national, parti anti-immigration et anti-Europe, et Emmanuel Macron, ancien ministre du président socialiste François Hollande repositionné au centre, espèrent consolider leur avance, même s'ils risquent d'attirer les feux croisés de leurs adversaires. Le candidat de la droite François Fillon est tombé en troisième position dans les intentions de vote (17%) après un scandale sur des emplois fictifs présumés impliquant sa famille qui lui vaut une inculpation notamment pour détournement de fonds publics. En dépit de cette première pour un candidat majeur à la présidentielle, il cherchera à convaincre de la pertinence de son programme d'austérité pour s'inviter au second tour. Quatrième du peloton loin devant son rival socialiste Benoît Hamon, le trublion de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon ne cesse lui de progresser dans les sondages qui le créditent désormais de 15% des voix. Il espère continuer à creuser l'écart avec pour ambition de doubler le conservateur Fillon. «La vague se lève», s'est réjoui dimanche le tribun de 65 ans, aux talents reconnus d'orateur. «C'est comme le printemps, on ne le voit pas et tout à coup, tchiouf! Il y a des fleurs», a lancé celui qui a finalement réussi à damer le pion à gauche à son frère ennemi Benoît Hamon. «Clairement, Jean-Luc Mélenchon a marqué beaucoup de points pendant le premier débat par sa personnalité, sa manière de s'exprimer, de prendre des positions fortes même si elles sont parfois minoritaires», résume Bruno Jeanbart, de l'institut Opinionway. Crédités au mieux de quelques pour cents d'intentions de vote, les six autres candidats de l'élection chercheront à mieux se faire connaître des électeurs en débattant autour des trois thèmes proposés: emploi, sécurité, questions sociales. Le format et le nombre d'invités laisseront peu de place aux échanges: au total, les candidats parleront en tout un gros quart d'heure chacun. «Donner 17 minutes à chacun, c'est pas beaucoup», a estimé le doyen des candidats, Jacques Cheminade, pointé à moins de 1% des voix. «Là, pour une fois, on sera sur un pied d'égalité», s'est de son côté réjouie Nathalie Arthaud, candidate communiste révolutionnaire, regrettant que l'on mette «dans la tête des électeurs qu'ils doivent départager entre cinq». A 19 jours du scrutin, il devient pour tous de plus en plus crucial de convaincre, alors qu'environ un tiers des électeurs disent vouloir s'abstenir, un record pour une élection présidentielle qui parvient d'habitude à mobiliser environ 80% des Français. Autre particularité, le nombre d'indécis n'a jamais été aussi fort à trois semaines du vote, y compris chez ceux qui se disent certains d'aller voter. Un Français sur trois environ (38% selon l'institut BVA, 31% pour l'Ifop) n'a pas encore décidé pour qui il va voter ou peut encore changer d'avis. Une incertitude qui complique le travail des instituts de sondage, sous haute surveillance après l'incapacité de leurs homologues anglo-saxons à anticiper l'élection de l'Américain Donald Trump et le vote pour le Brexit au Royaume-Uni. Comme pour nourrir la défiance envers les pronostics des sondeurs, les primaires organisées à droite comme à gauche fin 2016 et début 2017 avaient conduit à l'éviction surprise des favoris de chaque camp: les ex-Premiers ministres de droite Alain Juppé et socialiste Manuel Valls.