L'Elysée attend le nouveau locataire Cette élection présidentielle, à nulle autre pareille, est suivie avec un intérêt certain par toutes les formations de l'extrême droite en Europe, surtout en Autriche, aux Pays-Bas et en Allemagne. A trois jours du scrutin de la présidentielle française, les sondages donnent toujours Marine Le Pen en pole position, soit devancée soit talonnée par Emmanuel Macron. Mais depuis sa «sortie» sur la rafle du Vél d'Hiv', opérée à contretemps et a pris à contre-pied les éventuels futurs électeurs, l'égérie du FN a plutôt tendance à perdre de précieux points. C'est ce qui l'a conduite à reprendre son discours traditionnel sur les thèmes typiques de l'extrême droite, l'immigration, l'islam et le terrorisme. Peine perdue, la position étant connue et ressassée sur ces thèmes que tente également d'agiter François Fillon, la candidature de Marine Le Pen est lentement mais sûrement érodée à la fois sur son flanc droit et sur son flanc gauche, de sorte que les transfuges semblent revenus de leur «égarement» au profit de leur famille politique naturelle. Ainsi s'explique le rebond, certes modeste, mais incontestable, de Fillon, accompagné hier par Alain Juppé dans une unité de façade et opportunément appuyé par Sens commun, un mouvement qui draine des sympathisants FN séduits par la droitisation renforcée de la campagne des Républicains. Cette élection présidentielle, à nulle autre pareille, est suivie avec un intérêt certain par toutes les formations de l'extrême droite en Europe, surtout en Autriche, aux Pays-Bas et en Allemagne. Mais le discours souverainiste de la candidate du FN se heurte à un son de cloche identique chez d'autres «petits» candidats comme Nicolas Dupont-Aignan qui garde le vent en poupe avec ses 4-5% des intentions de vote, porté par une clientèle droitière déçue moralement par les affaires et les mises en examen de François Fillon comme de Marine Le Pen.Outre cette donne, il y a la montée en puissance de Jean-Luc Mélenchon, candidat de la France insoumise qui est en train de regagner la confiance d'une partie du milieu ouvrier, un temps désespérée au point de s'en remettre à la porte-parole du FN. Même en durcissant son discours sécuritaire et en agitant le thème de la préférence nationale, la candidate du FN ne paraît pas en mesure de freiner la lente érosion qui affecte les milieux évoqués, mais aussi le monde rural où le candidat Jean Lassale parvient à grappiller quelques dizaines de milliers de voix dont le décompte pourrait s'avérer décisif au soir de dimanche prochain. Maigre consolation, le tassement concerne aussi son rival Emmanuel Macron. Après avoir caracolé sans cesse en tête de tous les sondages, l'un comme l'autre tournent désormais autour de 23% des intentions de vote, à l'ombre menaçante du tandem Fillon - Mélenchon qui, lui, bénéficie, depuis deux semaines environ, d'une dynamique favorable le situant à plus ou moins 20%.Bien malin donc sera celui qui pourra dire exactement l'issue du premier tour à la faveur de laquelle on devrait également connaître le vainqueur potentiel du sprint final lors du second tour. Si Le Pen et Fillon durcissent le ton, enfourchant leur habituel anathème contre les communautés immigrées, l'islam et la menace terroriste, le plus souvent amalgamés, Mélenchon maintient sa stratégie d'une campagne apaisée, faisant la part belle aux nouvelles technologies (il a encore refait le coup de l'hologramme cette fois multiplié) et se pose d'ores et déjà l'inconnue du vote des partisans de Benoît Hamon qui dévisse à 8% des sondages et n'a pas caché qu'il appellera à se reporter sur Mélenchon au second tour. Sauf que le risque est peut-être minime sans pour autant être exclu que dimanche soir les deux candidats appelés au second tour pourraient être ceux du FN et des Républicains. Auquel cas, la gauche, radicale ou pas, aura définitivement cessé d'exister., du moins en tant que coalition politique d'importance, laissant place à des formations aux ambitions réciproquement hostiles. C'est d'ailleurs ce que prédisent nombre d'observateurs qui pensent, non sans raisons, que la campagne présidentielle de 2017, atypique et incroyablement incertaine, va sceller la mort du parti fondé par François Mitterrand sur la base d'une synthèse des courants qui le composent. En choisissant de soutenir le candidat centriste Emmanuel Macron, l'aile libérale incarnée par François Hollande et Manuel Valls avait achevé de précipiter la fin de ce parti qui aura marqué son temps surtout par les engagements sans cesse trahis.