L'opposition prévoyait hier un «blocage national» des routes au Venezuela en proie à une profonde crise économique et politique, après des manifestations émaillées de violences contre le président socialiste Nicolas Maduro qui a lancé un appel à reprendre le dialogue. Le décès dimanche d'une manifestante pro-Maduro, une femme de 47 ans blessée mercredi - jour anniversaire de la révolution de 1810 ayant conduit à l'indépendance - a porté à 21 le nombre des morts dans ces manifestations depuis le 1er avril. Dimanche, une manifestation improvisée d'opposants à M. Maduro a été dispersée à San Cristobal (ouest) en marge d'un match de football entre le club local Deportivo Tschira et le Caracas FC. Samedi, l'opposition avait organisé «une marche du silence» vers les évêchés de Caracas et plusieurs autres villes comme Maracaibo, Barquisimeto ou San Cristobal. Des milliers de manifestants souvent vêtus de blanc ont défilé sans incident majeur -hormis quelques heurts dans la capitale - pour la première fois en trois semaines. Hier, l'opposition, qui réclame des élections générales anticipées dès cette année et le départ de M. Maduro avant la fin de son mandat en décembre 2018, a appelé à un blocage des grandes voies du pays, y compris l'autoroute principale de Caracas. «Des élections oui, je veux des élections maintenant», a lancé dimanche lors de son allocution télévisée hebdomadaire M. Maduro mais en se référant aux élections régionales - qui devaient se tenir en décembre dernier mais ont été reportées - et municipales prévues cette année. «Je suis prêt pour ce que dit le pouvoir électoral», a insisté M. Maduro qui avait remporté de justesse la présidentielle de 2013 après la mort de Hugo Chavez. Il a renouvelé son invitation à l'opposition pour reprendre le dialogue gelé depuis décembre et demandé l'aide du pape François. «Je lance d'ici un appel au pape François pour nous accompagner dans le dialogue, parce qu'il existe une conspiration à Rome et ici aussi contre le dialogue au Venezuela», a lancé M. Maduro. Le gouvernement accuse l'Eglise d'être un «acteur politique» au côté de l'opposition. Le Pérou a avancé dimanche soir l'idée d'une médiation du Vatican avec douze pays de la région. L'an dernier, une médiation menée par le Saint-siège avec l'Union des nations sud-américaines (Unasur) avait échoué. «Je suggère que le Vatican fasse la médiation avec les douze pays de l'OEA qui suivent la crise au Venezuela», a déclaré le ministre péruvien des Affaires étrangères Ricardo Luna. Il n'a pas identifié ces pays de l'Organisation des Etats Américains. Onze pays latino-américains (Argentine, Brésil, Chili, Colombie, Costa Rica, Guatemala, Honduras, Mexique, Paraguay, Pérou, Uruguay), ainsi que les Etats-Unis, également membres de l'OEA, ont plaidé pour des élections. Selon M. Luna, la situation est «hors de contrôle» au Venezuela où M. «Maduro ne cherche pas le dialogue». M. Maduro, qui a pour sa part reçu l'appui de la guérilla colombienne des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes), a également affirmé détenir des «preuves» de l'implication dans les désordres des députés d'opposition José Guerra y Tomas Guanipa. La coalition de l'opposition Table pour l'unité démocratique (MUD) avait auparavant dénoncé «une séquence de persécution politique contre d'importants dirigeants». La crise politique actuelle est née de la victoire de l'opposition de centre droit aux législatives de fin 2015, qui a mis fin à l'hégémonie chaviste, alors que l'économie de ce pays pétrolier sombrait avec la chute des cours du brut. La situation s'est enflammée début avril, l'opposition dénonçant un «coup d'Etat» après la décision de la Cour suprême, réputée proche du président Maduro de s'arroger les pouvoirs du Parlement, déclenchant un tollé diplomatique qui l'a poussée à renoncer 48 heures après. «Nous allons continuer à descendre dans la rue», a promis samedi l'un des dirigeants de l'opposition, Henrique Capriles, ancien candidat à l'élection présidentielle.