«L'amnistie et la réconciliation représentent une question d'intérêt national.» Le débat sur l'amnistie générale et la réconciliation nationale prend une bonne tournure, à en croire les déclarations faites, hier au forum d'El Moudjahid, par des juristes, des cadres de l'Etat et des représentants de la société civile qui, sans aller par quatre chemins, s'entendent sur le fait que le principe d'amnistie générale constitue bel et bien, «la case départ pour une nouvelle ère de paix et de sécurité». M.Mbarek Serraï, porte-voix de la Commission nationale pour l'amnistie générale, le premier à avoir pris la parole, annonça, sans s'attarder, le lancement de la deuxième étape du travail que faisait ladite commission et qui consiste en un appel qui sera adressé à l'ensemble des spécialistes, des intellectuels et cadres de l'Etat les incitant à «accompagner et animer» la campagne sur l'amnistie et la réconciliation nationale. Il a jugé nécessaire de lancer un débat de société objectif et démocratique dans le but de repérer le bon chemin afin de mettre en oeuvre la démarche présidentielle. Sur sa lancée, il utilisait un langage virulent à l'adresse des Ong internationales, dont Amnesty International qui, «une décennie durant», «n'a pas cessé de faire de la fausse propagande contre l'Algérie». Quant à M.Farouk Ksentini, président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'Homme, il a profité de l'occasion pour réitérer sa position en disant que «l'amnistie et la réconciliation représentent une question d'intérêt national». Il se raccroche à l'idée que cette même question n'a rien de contraire au principe des droits de l'Homme. Il n'avait, en fait à communiquer que son attachement sans relâche au principe de l'amnistie qui, selon sa pensée, «n'est qu'un devoir et un droit de chaque Algérien». Le débat devint de plus en plus chaud et intéressant surtout avec l'intervention de certains représentants de la société civile à l'instar de Mme Saïda Benhabilès, présidente de l'Association de la promotion de la femme rurale. Sa voix se fit entendre, grave, solennelle comme une prière. D'emblée, elle a tiré à boulets rouges sur Amnesty International dénonçant sa présence actuelle en Algérie. «Je n'accepte pas la présence de cette Ong en Algérie car elle a vraiment failli à ses missions. Il faut que tout le monde sache que le peuple algérien n'a pas besoin d'être téléguidé». Haussant le ton, elle dira que cette organisation non gouvernementale est en Algérie dans le but de mettre en cause le principe de l'amnistie générale et de la réconciliation nationale. Elle a défendu bec et ongles, au nom de toutes les femmes algériennes, la suggestion du président Bouteflika allant dans le sens de réconcilier les Algériens avec eux-mêmes. Pour que cette démarche réussisse, elle juge nécessaire «d'éradiquer toutes les causes de la crise algérienne, dont l'injustice sociale qui ne cesse de sévir», dit-elle d'une voix plus sonore. Sur le plan juridique, Miloud Brahimi, avocat à la Cour suprême et spécialiste en droit international relève un vide juridique et l'absence de textes de loi et/ou décret devant accompagner cette démarche initiée par le président de la République, mais devant garantir aussi sa réussite. «Il faut mettre à flot le droit algérien, tout en essayant de cerner la notion d'amnistie et de réconciliation». En d'autres termes, il faut inscrire la démarche présidentielle dans un contexte juridique, répéta-t-il sur un ton incitatif. Lui emboîtant le pas, Mme Benbraham, avocate elle aussi, annonça immédiatement un texte de loi qui est en train de se préparer actuellement, devant envelopper le principe de l'amnistie générale. Elle explique, dans un langage juridique, que ladite laquelle démarche «ne peut se faire sans codification. Pour ce qui est de ce principe, il est destiné au bien être et à la sécurité de l'individu». Elle a ajouté, pour bien expliquer, dit-elle, la philosophie de ce concept, que l'amnistie «est une finalité d'un nombre de textes et la suite logique de la loi de la Rahma et de la concorde civile». Elle dira aussi que la proposition du président est logique et que l'élaboration d'une loi stricte est nécessaire. Elle s'insurge contre la présence d'Amnesty International en Algérie. Car, a-t-elle expliqué, cette organisation qui est venue pour mettre en cause l'amnistie générale «ne savait pas que c'est un acte de droit législatif visant l'arrêt d'une poursuite et/ou le pardon». Lequel principe, a-t-elle développé, «est né en 403 avant JC et est pratiqué dans plusieurs pays du monde». En définitive, le soutien des juristes, des représentants de la société civile et des cadres de l'Etat à la démarche du président devrait, à coup sûr, engager cette question vers un horizon meilleur. L'élaboration d'un texte de loi et/ou d'un décret devant accompagner cette affaire, devra aussi définir clairement les choses. Le temps joue, sans l'ombre d'un doute en faveur d'une mise en oeuvre «effective» de cette démarche qui, d'après les conférenciers, ne devra être «qu'un lever de soleil annonçant un nouveau jour pour l'Algérie».