Des massacres en série ont secoué plusieurs villes irakiennes hier. Lors de son escale technique, lundi, à Alger, sur la route vers Brasilia pour le Sommet pays arabes-Amérique du Sud, le président irakien, Jalal Talabani, dans une déclaration à la presse a affirmé que la situation sécuritaire en Irak «s'améliorait progressivement». Or, l'Irak a vécu une première semaine de mai meurtrière avec un bilan macabre avec, entre le 1er mai et la journée d'hier, quelque 140 personnes tuées dans divers attentats, ce qui dément à tout le moins les propos optimistes du président irakien quant au retour progressif de la sécurité dans le pays. De fait, la journée d'hier a été particulièrement sanglante avec une demi-douzaine d'attentats, dont trois dans la capitale Bagdad, donnant la mort à près de 80 personnes. Les attentats les plus meurtriers ont eut lieu à Tikrit, ancien fief de l'ex-président Saddam Hussein, et à Hawija, ville située à l'ouest de Kirlouk (au nord de Bagdad) avec respectivement 31 et 30 victimes dans ces deux attentats suicides et à la voiture piégée. A Bagdad, trois attentats ont été perpétrés dans la capitale irakienne, le bilan s'élevait à trois morts et plusieurs dizaines de blessés. A Hawija, important centre de recrutement - la plupart des victimes postulaient à un poste dans les services de sécurité - l'attentat suicide a visé hier l'un de ces centres laissant sur le terrain trente morts et 31 blessés parmi les jeunes candidats. Hawija a été auparavant une place forte de la rébellion d'où les opérations militaires ponctuelles menées contre la guérilla par les forces armées américaines et irakiennes. Un attentat, tout aussi sanglant, a été commis, hier également, à Tikrit lequel s'est soldé par la mort de 38 personnes et faisant plusieurs dizaines de blessés. A Tikrit, l'attentat ne visait aucun objectif militaire, car ayant été perpétré contre une gare routière où les voyageurs se pressaient. Cette nette recrudescence de la violence intervient quelques jours à peine après la formation du cabinet du Premier ministre Ibrahim Al-Jaâfari, marquant la détermination de la guérilla à ne point laisser de répit à un gouvernement qui voit s'amasser devant lui les difficultés alors que sa tâche, préparer les institutions du futur Irak, est déjà suffisamment délicate dans un pays qui n'arrive toujours pas à trouver ses marques. C'est encore le groupe du Jordanien Abou Mousab Al-Zarqaoui qui a revendiqué ces attentats, promettant, dans un communiqué «davantage» d'attaques anti-américaines, indiquant «l'unité des candidats au martyre offrira ses héros et s'en prendra aux apostats (...). Ce sera (tel) un volcan en ébullition». Dans un second communiqué, le même groupe affirme avoir « fait sentir le goût de la peur et de la terreur aux Américains (...), qui ont répliqué en bombardant des maisons de gens désarmés » dans la région d'Al-Qaïm. «Le nombre des Américains tués se compte par dizaines, dépassant même la centaine», assure le groupe de Zarqaoui, qui souligne que ses «combattants résistent toujours, (poursuivent) le jihad et assènent des coups aux ennemis de Dieu». Des sources proches de la coalition indiquent toutefois que l'authenticité du texte ne peut être établie. La recrudescence de la violence dans le nord de l'Irak peut avoir un rapport avec l'opération militaire, baptisée Matador que l'armée américaine mène depuis le début du mois dans l'ouest du pays près de la frontière avec la Syrie, région considérée par les officiers militaires américains comme un «sanctuaire» de la guérilla et du réseau d'Al Qaîda en Irak. Ainsi, quelque 1000 soldats et marines, appuyés par d'importants moyens aériens, poursuivaient l'opération Matador qui a débuté dimanche près d'Al-Qaïm contre les insurgés de cette région. «Entre 75 et 100 insurgés» dont des non-Irakiens ont été tués depuis le début de l'opération, a affirmé mardi le capitaine Jeffrey Pool. Selon l'armée américaine, les rebelles se fournissent en armes dans cette région, «pour mener leurs attaques dans les villes plus peuplées». En corrélation avec l'opération Matador, les insurgés ont enlevé, mardi, le gouverneur de la province d'Al-Anbar, Nawaf Al-Raja Al-Mahaloui, exigeant en échange de sa libération, l'arrêt de l'offensive américaine, ont indiqué le même jour des sources de sécurité. Aussi, loin de l'optimisme de commande montré par le président irakien Jalal Talabani, la situation en Irak demeure dramatique et les derniers massacres ne sont pas faits pour rassurer sur le devenir d'un pays en proie à des violences qui ne se sont pas démenties depuis la chute du régime baasiste à Bagdad.