Des miliciens de Fadjr Libya en patrouille à Sabrata fin février 2016 Les manifestations des milices ont commencé dès le lendemain de la rencontre d'Abou Dhabi, même si la teneur des discussions n'a pas, à ce jour, été révélée... Une nouvelle rencontre entre le président du GNA, Fayez al Serraj et le maréchal Khalifa Haftar était prévue au Caire, dans le prolongement de celle qui a eu lieu à Abou Dhabi (EAU) mais elle a été empêchée par les milices de Fadjr Libya (Aube de la Libye) qui sont de retour dans la capitale Tripoli. Cette rencontre avait pour but de concrétiser la feuille de route discutée sous les auspices des Emirats arabes unis et de l'Egypte, le 2 mai dernier, à laquelle les milices islamistes s'opposent et menacent de retirer leur soutien au gouvernement d'union nationale conduit par Al Serraj. La colère de Fadjr Libya est montée d'un cran, obligeant le chef du GNA à reporter son voyage au Caire. Pour montrer leur détermination, les milices ont investi le ministère des Affaires étrangères où des photos du «criminel de guerre Khalifa Haftar», maculées de sang, ont été accrochées. Du coup, le ministre en charge du secteur, Mohamed Tahar Siala s'est retrouvé bloqué à Tunis tandis que l'une des milices islamistes, commandée par Salah Badi, a averti qu'elle n'hésiterait pas, si nécessaire, à «brûler Tripoli».La menace n'est pas à prendre à la légère tant ces contestations étaient prévisibles. Le pouvoir du GNA est faible et al Serraj n'a pas les moyens d'imposer sa volonté aux milices récalcitrantes. Les manifestations des milices ont commencé dès le lendemain de la rencontre d'Abou Dhabi, même si la teneur des discussions n'a pas, à ce jour, été révélée. Toujours est-il que les deux protagonistes ont été appelés par leurs parrains respectifs à travailler d'un commun accord afin de mettre en place une armée nationale libyenne capable de faire face aux défis sécuritaires qui se posent partout dans le pays, notamment dans les régions du Sud, et de conforter le Conseil présidentiel issu de l'accord de décembre 2015 sous l'égide de l'ONU, en y intégrant les représentants de l'Est. Il se trouve que l'armée libyenne de l'Ouest, qui a apporté un soutien conséquent au GNA a annoncé, au terme d'une réunion de ses officiers dimanche soir, qu'elle rejette l'autorité de Khalifa Haftar, rejoignant en cela la position de Fadjr Libya. Parmi les diverses motivations de ces factions, il convient de rappeler que la victoire de la coalition partis politiques-membres indépendants de la société civile aux élections législatives de juin 2014 a convaincu les milices islamistes que le pouvoir n'est pas dans les urnes mais dans le nombre de divisions armées. Maniant les armes et les intimidations, elles recourent aux mêmes méthodes qu'elles reprochent au maréchal Haftar, rendant aléatoire le dialogue, déjà difficile, entre le gouvernement d'union nationale et le Parlement basé à Tobrouk. Et la menace d'envahir la capitale est brandie de manière récurrente pour compromettre les progrès éventuels en vue de sceller la réconciliation entre les différentes parties au conflit. A peine a-t-on entendu qu'un accord de principe serait sur le point d'être conclu entre Al Serraj et Haftar, bien que les détails sur les modalités de sa mise en application soient méconnus, voilà qu'une nouvelle levée de boucliers s'amorce qui vise surtout à rappeler les lignes rouges tracées par les milices dont les intérêts se rejoignent. On sait qu'elles profitent largement des trafics en tous genres et de la contrebande, atouts auxquels elles ne sont pas prêtes à renoncer. Si les Frères musulmans et les partis qui s'y attachent visent clairement la prise de pouvoir, d'autres milices, plus ou moins en connexion avec ce qui reste des forces de l'Etat islamique, ont seulement besoin que la situation perdure pour un profit continu. D'où cette appréhension du dialogue politique consensuel et de la recherche d'une réconciliation, source de paix et de stabilité et donc d'un nouvel équilibre social, politique, tribal et régional, comme un facteur dérangeant, voire compromettant, qu'il faut dynamiter à tout prix. Cela dit, la volonté et la détermination des pays voisins ainsi que de la communauté internationale peuvent et doivent venir à bout de toutes ces résistances. Ce n'est pas une chose facile mais il n'y a pas d'autre voie que celle-ci...