Désormais, la nuitée à l'hôpital coûtera aussi cher que dans un hôtel. Pour l'Algérien, les consultations et séjours gratuits à l'hôpital qu'il a connus « jadis » ne seront plus qu'un souvenir. Le nouveau barème prévu par le non moins récent projet de loi fait monter les enchères. Les patients devront payer 20% de la facture d'hospitalisation, de consultation et d'analyse. C'est ce que l'on appelle le ticket modérateur. Les malades hospitalisés devront débourser, de leur propre poche, une contribution estimée entre 600 et 1200 DA. Quant à la consultation, celle-ci ira de 200 DA pour le médecin généraliste à 400 DA pour le spécialiste. Pour des examens plus «poussés», une somme variant entre 300 et 1400 DA est requise. Selon des sources généralement bien informées, ces mesures ne s'appliquent pas aux maladies chroniques, aux démunis non assurés et aux assurés pris en charge à 100%. L'intention des initiateurs de ce projet de loi est de redorer le blason du secteur de la santé, longtemps malade, puisqu'ils prévoient, au seul chapitre de la contribution financière du citoyen, pas moins de 3,5 milliards de dinars. Par ricochet, ce sont les praticiens des hôpitaux qui verront leur standing rehaussé, puisque 50% seront alloués aux spécialistes hospitalo-universitaires, aux spécialistes et généralistes de la santé publique sous forme d'intéressement. L'on assistera ainsi à moins de désertions en masse des médecins du secteur public vers le privé. Ce dernier bénéficiant d'un prestige supérieur à celui attribué à nos centres hospitaliers par la vox populi. Pour des mesures qui risquent d'être impopulaires, les Algériens auront-ils pour autant des garanties pour une médecine moderne de qualité, sur les plans accueil, hébergement, restauration et soins? Aujourd'hui, ce sont les députés qui prennent à bras le corps cette question et ce, avant même que ce projet d'arrêté interministériel ne soit présenté à l'APN. En effet, hier, certains d'entre eux ont choisi d'axer leur intervention, lors des débats sur la déclaration de politique générale du gouvernement, sur les lacunes des systèmes de santé. Dans ce sens, ils ont appelé à la nécessité de réviser la loi sur la santé n° 85-05 du 16 février 1985, portant promotion de la santé, tout en affirmant l'importance d'élaborer une nouvelle politique de santé «adaptée à la situation du pays». Ils ont, à ce sujet, proposé de renoncer à la gratuité des soins, du fait de la situation économique que traverse le pays actuellement, affirmant que cela n'altérerait en rien les aspects positifs de la médecine gratuite, notamment l'augmentation de l'espérance de vie et la baisse de la mortalité infantile. Mais ce projet de loi aura-t-il les reins solides? Il aura d'abord à subir le test des députés, après un passage obligatoire au Conseil de gouvernement. A la veille des élections législatives, cette décision, considérée comme «impopulaire», a de fortes chances d'être bloquée ou du moins révisée, à défaut d'être annulée. L'on note que les réactions n'ont pas tardé concernant cet avant-projet. La Centrale syndicale, par la voix de son secrétaire général, Sidi Saïd, a exprimé dans ses correspondances adressées au Chef du gouvernement, son opposition à son contenu, en précisant: «Cette désapprobation concerne aussi bien le fond que la forme de ce projet texte, dont la portée et les conséquences sociales ne sont pas aussi légères que semblent l'appréhender ses initiateurs.» Sur un autre chapitre, l'on précise que les associations de malades chroniques contactées par nos soins ont tenu à exprimer leur mécontentement quant au fait que le gouvernement ne les a pas consultés pour l'élaboration de cet avant-projet, «en dépit du fait que nous sommes les premiers concernés par la question», précise M.Ahmed Meziani, président de l'Association de porteurs de prothèses artificielles cardiaques.