Abou Mazen semble avoir réussi son examen de Washington après sa rencontre avec le président américain. Pour sa première sortie officielle aux Etats-Unis, depuis son élection à la tête de l´Autorité palestinienne en janvier dernier, Mahmoud Abbas donne l´impression d´avoir convaincu ses interlocuteurs américains, et notamment le président George W. Bush, de sa volonté d´approfondir les réformes nécessaires à la mise à niveau des Territoires palestiniens. A en croire les déclarations des uns et des autres, et singulièrement celles faites par les Palestiniens, la visite officielle du président Mahmoud Abbas aux Etats-Unis a été un succès total. Certes ! Toutefois restent des zones d´ombre que les bonnes paroles de MM. Abbas et Bush n´ont pas réellement estompées. George W. Bush a ainsi réaffirmé devant Abou Mazen son soutien à la création d´Etat palestinien, indiquant " nous nous rencontrons à un moment où une grande réalisation historique est à portée de main : la création d´un Etat palestinien pacifique et démocratique. Le président Abbas veut atteindre ce but en rejetant la violence et en oeuvrant à des réformes démocratiques ". Cette déclaration du président américain répétée à maintes occasion ces deux dernières années n´apporte en réalité rien de nouveau, si ce n´est confirmer l´ambiguïté de la position américaine dans le conflit israélo-palestinien. De fait, il faut relever au passage la qualificative équivoque employée par M.Bush pour appeler à un " Etat palestinien pacifique et démocratique ". Le président Bush, affirme certes qu´une " solution viable de deux Etats doit assurer une contiguïté en Cisjordanie et un Etat composé de territoires éparpillés ne marchera pas ". Mais il ne dit pas comment préserver cette homogénéité du futur Etat palestinien, quand Israël continue de poursuivre la construction du mur en Cisjordanie, -construction mise à l´index par la communauté internationale et condamnée par la Cour internationale de justice de l´ONU (CIJ)- qui accentue le morcellement des Territoires palestiniens rendant par là-même improbable la création d´un Etat palestinien dans une période de temps raisonnable. Le président américain a également indiqué qu´ " Israël ne doit entreprendre aucune activité en violation des obligations de la Feuille de route ou portant préjudice aux négociations finales des statuts de Gaza, de la Cisjordanie ou de Jérusalem. Donc Israël doit retirer les colonies sauvages et arrêter l´expansion des colonies ". Or, le désengagement unilatéral d´Israël de la bande de Gaza, la construction du mur en Cisjordanie, la déstructuration de Jérusalem-Est sont déjà en soi une entrave grave à la Feuille de route. De fait, Israël décide seul, souverainement, de l´importance des territoires qu´il compte concéder aux Palestiniens et de tempo de ses retraits ne tenant aucun compte des mises en garde de la communauté internationale et celles, mitigées, de son protecteur américain. Or, cela va totalement à l´encontre de l´esprit même de la Feuille de route qui organise les conditions devant permettre l´édification de l´Etat palestinien. Mais c´est Israël qui, en dernier ressort, décide de tout. Ainsi, le Quartette (USA, UE, ONU et Russie) sensé superviser le processus de paix, dit de la Feuille de route, semble plus s´en remettre au bon vouloir d´Israël que contraindre l´Etat hébreu à honorer ses obligations et appliquer ses recommandations pour parvenir à une paix juste et équitable entre Palestiniens et Israéliens. De fait, peu surpris par les déclarations du président Bush, Israël estime que l´hôte de la Maison-Blanche n´a rien dit de nouveau et que ses propos " manifestement l´expression d´un souci d´équilibre " ne nécessitent aucun autre commentaire. En effet, si George W. Bush maintient la condamnation du Hamas, un mouvement " terroriste ", selon lui, n´a pas, en revanche, condamné les exactions israéliennes qui mettent autrement en péril le processus de paix au Proche-Orient. Le président Bush réaffirme que la Feuille de route est le seul moyen de parvenir à la paix, mais se garde de condamner Israël qui, par ses initiatives, entrave la mise en application du plan de paix international. Mahmoud Abbas, tout en disant sa satisfaction du résultat de ses entretiens avec M.Bush, s´est d´autre part félicité du prochain retrait israélien de Ghaza, insistant toutefois sur le fait que ce retrait,- initiative unilatérale du Premier ministre israélien, Ariel Sharon- doit se faire dans le cadre de la Feuille de route. Et Abou Mazen d´affirmer : " Nous avons assuré le président Bush du fait que l´Autorité palestinienne était prête à se coordonner avec Israël pour assurer le succès du retrait de Gaza et de zones dans le nord de la Cisjordanie et à assurer ses responsabilités dans le cadre du retrait israélien " ajoutant " nous considérons que cela fait partie du processus pour mettre fin à l´occupation. Mais, en tant que tel, ce retrait ne doit pas se faire au détriment de la Cisjordanie ". Le fond du problème est en fait là: quelles sont les intentions réelles d´Israël qui poursuit, imperturbable, la construction du mur qui défigure la Cisjordanie.