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Des scandales à la pelle à Oran
FONCIER AGRICOLE, IMMOBILIER ET CREDITS
Publié dans L'Expression le 02 - 06 - 2005

Les gens parlent et même les élus de l'APW se mêlent à ce grand déballage
Les langues se sont déliées ces derniers jours à Oran pour évoquer ce que la vox populi n'hésite plus à qualifier de crasse en faisant allusion aux nombreuses atteintes au patrimoine de la wilaya. Les propos de Bachir Frik, qui avait déclaré au cours de son procès qu'il a été victime d'un clan qui avait lancé une véritable OPA sur les richesses de la ville ne laissent plus de marbre. Les gens parlent et même les élus de l'APW se mêlent à ce grand déballage.
Il faudra reconnaître que cette euphorie qui a pris la rue oranaise est née des assurances des pouvoirs publics qui ont affiché clairement que le règne de l'impunité est révolu et qu'aujourd'hui nul n'est au-dessus de la loi. Pour preuve, bon nombre de citoyens prennent pour exemple les démêlés avec la justice de l'ancien wali de Blida que des cercles présentaient comme proche du chef de l'Etat. Le Président Bouteflika, en assurant que force doit rester à la loi, a donné une lueur d'espoir aux Oranais qui ont vu leur ville dépecée durant la période 2000/2004. Même les propos du ministre de la Justice, garde des Sceaux au cours de sa dernière visite dans la wilaya de Mascara, sont venus eux aussi à point pour signifier que la récréation est terminée et que l'impunité est du passé.
Fellahs par correspondance
Oran parle ces derniers jours de 2 citoyens algériens installés à Londres qui ont réussi en 2002 à s'approprier plus de 72 hectares de terres agricoles dans le cadre de la loi sur les concessions agricoles. Dans la liste nominative établie des attributions par la Direction des services agricoles, il est précisé que ces deux citoyens ont présenté des cartes nationales établies à Londres et ont déclaré comme adresse le complexe des Andalouses.
Ceci prouve qu'ils ne sont pas résidents dans la wilaya, une grave entorse à la loi qui n'avait pas empêché le DSA et le secrétaire général de la wilaya d'Oran à l'époque, de leur établir un arrêté en bonne et due forme. Ce cas est aggravé car cette terre attribuée à ces deux «fellahs par correspondance» relève du patrimoine forestier protégé par la loi 12/84 qui définit les conditions générales du régime forestier. En un mot, la DSA a attribué une terre qui ne lui appartient pas et pis encore, elle a cautionné une atteinte au patrimoine forestier. Les griefs retenus contre ces deux ressortissants algériens installés à Londres ne s'arrêtent pas là. Après s'être vus bénéficiaires d'une terre agricole, ils ont demandé un crédit dans le cadre de la générale des concessions agricoles. L'ancien directeur des services agricoles rejette leur demande au motif de son illégalité, mais après son départ, son successeur leur permet de bénéficier d'un pactole estimé à plus d'un milliard de centimes. La lettre de rejet de la demande de crédit et celle par qui l'argent est tombé dans leur escarcelle existent et nous en détenons des copies.
Ce cas n'est pas isolé puisque le Tout-Oran parle ces derniers jours d'une attribution tout aussi bizarre. Il s'agit d'un arrêté établi pour un citoyen qui a bénéficié de 5 parcelles de terres agricoles. Ce «sandwich»n'est pas innocent parce que ses auteurs ont délibérément établi un seul arrêté pour 5 assiettes pour éviter un cas de double, voire triple ou quintuple affectations, un cas puni par la loi et qui constitue aujourd'hui le motif de la guerre que livre l'actuel DSA à certains fellahs, dont certains sont en situation régulière. Le problème du foncier agricole ne s'arrête pas à ces deux cas. Le scandale qui secoue actuellement le secteur à Oran révèle aussi le cas d'un cardiologue en service qui a acquis une terre patrimoine de l'Etat auprès d'un fellah déchu. Les services de la DSA, pourtant au courant du problème, ont légalisé cette transaction sans broncher. Un autre cas de terres agricoles implantées dans des communes différentes attribuées sur la base d'un seul arrêté est signalé. Les listes des bénéficiaires établies pourtant par les services agricoles pullulent de noms d'industriels, de fonctionnaires, de femmes célibataires et d'individus ne remplissant aucun critère. «Ce sandale éclatera un jour. La justice commence à s'intéresser au dossier et on parle d'une commission venue d'Alger qui a entamé un véritable travail qui va commencer à donner ses fruits bientôt», nous dira un fellah.
L'autre affaire qui secoue ces derniers jours la rue oranaise est le dossier du Calpi qui a permis à des individus de bénéficier d'assiettes foncières sans remplir les conditions définies pour chaque projet d'investissement.
Parmi les cas qui retiennent l'attention, celui du terrain de l'ex-marché Karguentah attribué à un industriel au prix de 3 milliards alors que le Tout-Oran sait que cette assiette d'une superficie de 2000 m² à une valeur foncière de près de 20 milliards. Il semble d'après certaines sources que le bruit qu'avait créé cette affaire avait poussé les autorités locales à surseoir à cette transaction, mais cela n'a pu être vérifié. Un terrain mitoyen à l'ex-siège de la Sonacob à El Hamri, d'une superficie de 5200 m², qui devait servir au projet de construction d'un parking auto, a été cédé à 2 milliards. L'heureux attributaire, un entrepreneur, a trouvé sur les lieux de la charpente métallique pour près de 4 milliards qu'il n'avait pas payés puisqu'il était censé avoir acheté un terrain nu.
Une longue chronique
Les coopératives immobilières ont servi de moyen d'enrichissement illégal et rapide. Il y a quelques jours, le cas de la coopérative Essaâd a été soulevé. Cette dernière installée à Bir El Djir devait en principe contenir au départ 100 lots, mais son président, un ancien élu, sans permis de construire, est arrivé à se faire établir un autre permis de lotir où sont ajoutés 10 autres lots. Cette coopérative qui ne possède pas de permis de construire, défraye la chronique ces derniers jours tout comme la coopérative des 36 lots à l'entrée de la cité El Minzah (ex-Canastel) qui a été créée sur une assiette relevant du patrimoine foncier et donc protégée.
Le maire de la localité de Bir El Djir qui avait refusé de signer le permis de construire avait reçu des menaces et subi les pires pressions. Les coopérateurs, d'anciens responsables locaux, ont tout fait pour se faire établir les documents légalisant leur situation, mais cela bute sur le transfert de propriété du patrimoine forestier vers les domaines et aussi sur des aspects juridictionnels.
Oran vit ces derniers jours au rythme des scandales à répétition. Les bruits sur une commission d'enquête pluridisciplinaire d'Alger, s'ils venaient à se confirmer seraient un baume au coeur de milliers de citoyens qui ont vu leur ville dépecée, écartelée sans pouvoir lui venir en aide.


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